“Wait and see” : la préservation d’organe améliore la qualité de vie dans le cancer du rectum après radiochimiothérapie

Position du problème

La stratégie « wait and see » dans le cancer du rectum propose l’abstention chirurgicale après radiochimiothérapie néo-adjuvante en cas de réponse complète ou quasi-complète (complétée dans ce dernier cas par une résection locale transanale endoscopique, TEM). Elle s’associe à une surveillance armée trimestrielle associant examen clinique, IRM, endoscopie. L’objectif de cette stratégie, qui n’est pas validée pour le moment, est d’améliorer la qualité de vie et de diminuer les troubles fonctionnels associées à la chirurgie rectale. Cependant, la radiochimiothérapie étant elle même à l’origine de troubles fonctionnels, le bénéfice en terme de qualité de vie et de résultats fonctionnels reste à démontrer.

Méthode

Une équipe néerlandaise a appliqué cette stratégie chez 100 patients en réponse complète (n=85) ou quasi-complète et complétée par une TEM (n=15) après radiochimiothérapie. Les résultats de cette cohorte ont été présentés dans 4 abstracts avec des effectifs et des méthodologies variables: les performances de la surveillance par IRM de diffusion (n=72) et les résultats fonctionnels corrélés à la dosimétrie (manométrie et scores fonctionnels de VAIZEY de LARS, n=19) ont été présentés en communication orale, tandis que les analyses des mêmes scores fonctionnels et de la qualité de vie, (n=29 comparés à un groupe contrôle opéré)  et les résultats oncologiques (n=100) ont tous deux été présentés sous forme de poster.

Résultat

D’après cette cohorte de 100 patients, la stratégie semble relativement sûre avec une survie globale de 98% et une survie sans récidive locale de 85% à 2 ans. Les résultats fonctionnels et la qualité de vie étaient évalués par  questionnaires chez 29 patients avec traitement conservateur et 29 patients opérés appariés sur leur caractéristiques cliniques. Les résultats étaient significativement meilleurs pour les scores fonctionnels, sexuels, et les scores généraux de qualité de vie chez les patients non opérés. Dans une cohorte de 19 patients « wait and see », la dégradation des scores fonctionnels était associée à une dosimétrie plus forte sur le canal anal. Enfin, la surveillance par IRM de diffusion, comparativement à l’IRM standard, permettait une augmentation de la sensibilité et de la concordance inter-observateurs, avec toutefois plus de faux positifs.

Conclusion

La stratégie « wait and see » est une option pour le moment non validée. Les résultats fonctionnels et de qualité de vie retrouvés dans cette étude sont plutôt séduisant. Cependant on peut s’interroger sur la qualité des données, devant le « morcellement » des résultats avec parfois des critères qui se recoupent dans les différents abstracts. Enfin, il faut souligner la faiblesse des effectifs. Cependant, malgré les faiblesses méthodologiques, ces résultats participent à la preuve de concept et fournissent un rationnel supplémentaire pour tester cette stratégie dans un essai randomisé.

Simon Pernot