Nouvelles modalités de l’exploration écho-endoscopique du pancréas

Objectifs pédagogiques

  • Connaître les principes des nouvelles techniques en EE pancréatique
  • Place de l’échoendoscopie de contraste et de l’élastométrie
  • Résultats du prélèvement et apport des nouvelles aiguilles à biopsies

Introduction

L’écho-endoscopie (EE) est une technique d’imagerie du pancréas utilisée depuis plus de 30 ans, bien plus ancienne donc que le scanner spiralé (15 ans) ou l’IRM avec séquence de cholangiopancréatographie par IRM (CP-IRM). Grâce aux hautes fréquences utilisées et la proximité des organes à étudier (quelques mm), son pouvoir de résolution spatiale, c’est-à-dire sa capacité à détecter deux cibles différentes, très proches l’une de l’autre, est de 0,1 mm, 10 fois supérieur à celui du meilleur scanner spiralé ou de la meilleure IRM. Depuis 1992 et l’avènement des sondes linéaires électroniques, l’écho-endoscopie pancréatique à visée diagnostique et de caractérisation tissulaire s’est enrichie de l’étude Doppler et surtout du prélèvement écho-endoscopiquement guidé à l’aiguille fine (EUS-FNA), avec étude cytologique et histologique. Ce type de ponction a progressivement remplacé le prélèvement percutané écho- ou scanographiquement guidé, moins précis et grevé d’un risque d’ensemencement tumoral non négligeable compte tenu de la longueur du trajet (> 5 cm) entre la peau et la cible pancréatique.

De technique d’expert, au milieu des années 90 [1], l’écho-endoscopie pancréatique est progressivement devenue une technique de routine en raison d’un maillage complet du territoire (300 centres en exercice) en secteur public (150) et libéral (150) et de l’explosion des indications. Entre 2006 et 2010, le nombre d’examen bilio-pancréatique a augmenté de 42 % (enquête du Club francophone d’écho-endoscopie (CFE)). Cette augmentation des indications de l’écho-endoscopie pancréatique est directement reliée à 2 phénomènes épidémiologiques observés dans l’ensemble des pays occidentaux et au Japon.

  1. L’augmentation inexpliquée et inexorable de l’incidence du cancer du pancréas : 5 000 cas au milieu des années 90 en France, 12 580 cas en 2012 (données PMSI national).
  2. L’augmentation très importante de la découverte fortuite de lésions kystiques du pancréas (LKP) en raison des progrès technologiques et de la diffusion de l’imagerie en coupe, scanner multi-barrette et IRM, mais également des progrès de l’image échographique de plus en plus performante pour l’examen du pancréas.

La prévalence des LKP asymptomatiques découvertes fortuitement dans la population adulte est d’environ 2,5 % :

  • 2,6 % dans une série de 2 832 patients étudiés en scanner mutibarrette [2] dont 8,7 % après 80 ans et 0 % avant 40 ans ;
  • 2,4 % [3] dans une série de 2 803 patients d’âge moyen 51 ans étudiés par IRM lors d’un bilan de médecine préventive.

Ces chiffres sont à rapprocher d’une série autopsique japonaise [4] qui rapportait 24,3 % de LKP après 80 ans essentiellement des TIPMP.

  1. En corollaire de ces deux phénomènes épidémiologiques, on observe une augmentation régulière du recours au prélèvement pancréatique écho-endoscopiquement guidé utilisé pour guider les choix thérapeutiques puisqu’il représente maintenant 20 % des indications d’écho-endoscopie pancréatique (PMSI 2011 et enquête du CFE).
  2. Un certain nombre de nouveautés est progressivement apparu dans la 2e partie des années 2000, afin d’améliorer les possibilités de caractérisation tissulaire de l’écho-endoscopie pancréatique et est l’objet de cette mise au point. Il s’agit :
  3. des nouvelles aiguilles de prélèvement ;
  4. de l’élastographie ;
  5. de l’écho-endoscopie de contraste ;
  6. de l’endomicroscopie confocale.

État des lieux sur la caractérisation tissulaire pancréatique par écho-endoscopie

En préambule, il faut s’arrêter un instant sur le changement historique dans la prise en charge des cancers du pancréas qui se profile devant nous : alors que la chirurgie à visée curative ne peut bien évidemment être proposée aux 40 % de cancers du pancréas d’emblée métastatiques et aux 30 % localement avancés non résécables, il est de plus en plus clair que cette chirurgie à visée curative, en raison de ses résultats médiocres (15 % de survie à 5 ans chez les 20 % de patients dont la tumeur a été réséquée), perd progressivement sa place de gold standard dans la prise en charge initiale des -cancers opérables, ce phénomène s’accélérant depuis le développement rapide des chimiothérapies. Ainsi, il est vraisemblable qu’à l’avenir la délivrance d’une chimiothérapie néoadjuvante après obtention d’une preuve histologique deviendra le standard de la prise en charge des cancers du pancréas opérables à l’exclusion peut-être des rares cancers T1 (< 2 cm de diamètre) découverts fortuitement ou révélés par une pancréatite aiguë.

Masse solide

1) Quelle est la valeur du prélèvement écho-endoscopiquement guidé (EUS-FNA) pour la caractérisation tissulaire des masses solides du pancréas ?

Dans une méta-analyse récemment publiée [5] incluant 41 études et 4 766 patients, la sensibilité pour établir un diagnostic tissulaire correct est de 86,8 % (95 % IC : 85,5-87,9) et la spécificité de 95,8 % (95 % IC : 94,6-96,7).Élément essentiel à connaître, la valeur prédictive négative pour écarter le diagnostic de cancer du pancréas n’est que de 60 % ce qui signifie qu’un prélèvement écho-endoscopiquement guidé non contributif pour le diagnostic de cancer n’exclut pas ce diagnostic.

2) Que faut-il penser de la découverte en imagerie d’une masse solide pancréatique ?

  • 6 à 10 % des « tumeurs » analysées sur les pièces de DPC effectuées pour suspicion de cancer sont des lésions bénignes [6], 25 % d’entre elles étant des pancréatites auto-immunes ;
  • 10 à 15 % des cancers du pancréas ne sont pas des adénocarcinomes : cancer endocrine, cancer épidermoïde, cancer à cellules rondes, sarcome, métastase intra-pancréatique, localisation pancréatique d’un lymphome malin non Hodgkinien.

3) Parmi les adénocarcinomes ductulaires du pancréas, de multiples variants extrêmement rares, ont été identifiés dans la classification OMS 2010 :

  • cancer adénosquameux,
  • cancer indifférencié avec cellules géantes ostéoclastiques,
  • cancer mucineux non kystique,
  • cancer médullaire,
  • cancer hépatoïde,
  • cancer anaplasique.

4) Dans les études prospectives contrôlées consacrées aux masses solides pancréatiques, sans métastase identifiée, adressées au prélèvement écho-endoscopiquement guidé, seulement 55 à 70 % sont des adénocarcinomes, tandis que 15 à 25 % sont des masses inflammatoires, 6 à 15 % sont des tumeurs endocrines et 5 à 15 % sont des métastases intra-pancréatiques d’autres cancers ou des tumeurs rares [7-9].

5) De plus, le pancréas est le 3e organe le plus fréquemment impliqué dans des erreurs d’interprétation cytopathologique de constituants cellulaires -normaux ou inflammatoires conduisant au diagnostic erroné de tumeur [10].

6) Enfin, la pancréatite auto-immune est une entité particulièrement « piégeuse » d’un point de vue cytologique lors des prélèvements écho-endoscopiquement guidés à l’aiguille fine (25 G, 22 G) puisque dans deux études publiées récemment, il y avait 45 % de faux positifs de suspicion d’adénocarcinome ou d’autre tumeur dans la première [11], et 50 % d’atypies sévères et 10 % de faux positif de tumeur dans la deuxième [12].

Lésions kystiques du pancréas (LKP)

Le terme de LKP regroupe de nombreuses entités dominées par les pseudo-kystes et les tumeurs kystiques. L’histoire clinique et l’imagerie en coupes permettent le plus souvent le diagnostic positif des différents types de LKP mais le diagnostic différentiel demeure difficile en cas de LKP uni ou pauciloculaire (£ 6) entre cystadénome mucineux, cystadénome séreux macro-kystique, TIPMP, voire pseudo-kyste ou TNE kystique. Brugge et al. [13] ont montré que dans cette situation, pour le diagnostic différentiel entre LKP mucineuse et non mucineuse, l’imagerie en coupe avait une précision diagnostique de 40 %, l’écho-endoscopie de 50 %, l’étude cytologique du liquide de 30 % et l’étude de l’ACE intra-kystique de 80 %. Il est maintenant bien établi que certaines lésions mucineuses ont un ACE < 5 ng/ml, certains cystadénomes séreux macro-kystiques ont un ACE > 5 ng/ml et que certaines TIPMP ont une amylase intra-kystique normale et un ACE bas. Au total, 15 à 20 % des LKP uni- ou pauci-loculaires non communicantes restent sans diagnostic précis au terme d’un bilan exhaustif [13, 14].

Nouvelles méthodes de caractérisation tissulaire du pancréas

Compte tenu de l’ensemble des éléments détaillés ci-dessus, il apparaît clairement que :

1) Obtenir une caractérisation tissulaire doit être un objectif constant de la prise en charge des maladies pancréatiques tumorales ou non tumorales, solides ou kystiques qui peuvent être si proches en apparence et si différentes en prise en charge et pronostic.

2) L’écho-endoscopie avec prélèvement à l’aiguille fine avec étude cytologique et si possible histologique et immunocyto et histochimique, malgré ses performances excellentes et inégalées présente des limites non négligeables surtout en terme de sensibilité mais également parfois en terme de spécificité.

3) C’est la raison pour laquelle un certain nombre de nouvelles modalités d’explorations écho-endoscopiques ont été développées depuis 5 ans. Nous étudierons successivement :

  • la place des différentes aiguilles de prélèvement,
  • l’élastographie,
  • l’écho-endoscopie de contraste,
  • l’endomicroscopie confocale.

Place des différentes aiguilles de prélèvement

1) De 1992 à 1998, un seul type d’aiguille en partie auto-clavable de 22 G était utilisable.

De 1998 à 2008, nous avons disposé d’aiguilles à usage unique de 22 G et de 19 G et d’une aiguille à guillotine de 19 G (Trucut Needle). À partir de 2008, est apparue l’aiguille de 25 G, puis les aiguilles coupantes de 25, 22 et 19 G, dans le but d’obtenir plus facilement des micro- ou des macro-fragments tissulaires à visée histologique, et plus récemment une aiguille de 19 G en Nitinol, plus flexible afin de biopsier plus facilement à travers le duodénum.

2) La revue de la littérature effectuée par le comité technique de l’ESGE en 2011, éditée en 2012 sous forme de recommandations [15], a statué sur les aiguilles disponibles de 25 G, 22 G et 19 G dites standard et sur l’aiguille 19 G Trucut qui n’est plus disponible maintenant. Elle classait les résultats obtenus en fonction du niveau de preuve allant de 1++ (méta-analyse de grande qualité ou essai randomisé contrôlé parfait) à 4, les recommandations édictées allant du grade A (au moins une méta-analyse 1++ ou une revue systématique d’essais randomisés contrôlé) au grade D (niveau de preuve < 2-).

  • L’utilisation des aiguilles de 25 G, 22 G et 19 G pour le prélèvement pancréatique fourni les mêmes résultats (1+) avec la même sécurité (1-).
  • Bien que l’aiguille de 19 G fournisse plus de matériel cyto-histologique que les aiguilles plus fines et, si le prélèvement est techniquement réalisable, fournisse de meilleurs résultats, cet avantage est annulé par le taux d’échec trop important en cas de prélèvement transduodénal (1-).
  • Utiliser une aiguille de 19 G n’est pas recommandé pour un prélèvement trans-duodénal (grade C).
  • Le prélèvement écho-endoscopiquement guidé (EUS-FNA) utilisant une aiguille standard (22 G) fournit des micro-biopsies adéquates pour une étude histopathologique dans la majorité des tumeurs pancréatiques (2+).
  • Combiner l’étude histologique et l’étude cytologique des prélèvements obtenus en utilisant une aiguille fine standard (22 G) améliore les résultats de l’EUS-FNA (2-) et la sensibilité pour la détection des cancers du pancréas (2+).
  • L’avantage supplémentaire de l’étude histologique est d’obtenir une étude immuno-histochimique et ainsi une meilleure caractérisation des différents types de tumeur solide (2-).

3) L’aiguille de 22 G coupante (22 G Procore Cook®) est-elle supérieure à l’aiguille 22 G standard ?

Nous disposons de 2 études prospectives randomisées contrôlées.

L’une [16] et l’autre [17] n’ont pas montré de différence significative en termes de fiabilité diagnostique. Cependant, une « core biopsie » histologiquement analysable était plus souvent obtenue avec l’aiguille coupante (80 %) qu’avec l’aiguille standard (66 %).

4) Concernant l’aiguille de 19 G coupante (19 G Procore Cook®).

Nous ne disposons que d’une série prospective [18] qui a inclus 47 lésions pancréatiques, avec une fiabilité diagnostique de 89,4 % et une étude histologique adéquate obtenue dans 95,7 % des cas. Cependant, il faut noter quelques échecs en trans-duodénal et des problèmes techniques dans 20 % des cas.

5) Concernant l’aiguille de 19 G en Nitinol (19 G Flex, Boston Scientific®)

Plusieurs études comparatives avec une 22 G standard sont en cours afin de préciser sa place dans les prélèvements effectués par voie trans-duodénale et une étude princeps est disponible [19]. Elle rapporte 100 % de succès technique et 93,7 % d’histologie adéquate obtenue.

6) Cas particulier des suspicions de pancréatite auto-immune (PAI)

Dans un certain nombre de situations, il y a suffisamment d’arguments cliniques, morphologiques et biologiques spécifiques pour retenir le diagnostic de pancréatite auto-immune et proposer une corticothérapie si nécessaire. C’est le cas devant une atteinte diffuse, surtout si elle est associée à une maladie auto-immune ou une maladie inflammatoire chronique de l’intestin ou à un taux élevé d’IgG 4 sérique.

En revanche, en présence d’une masse focale ou d’une forme diffuse mais sans maladie autoimmune associée et sans signature biologique (taux d’IgG 4 sérique normal) et morphologique (absence de cholangite) spécifique, il convient de documenter positivement histologiquement le diagnostic de PAI, car l’étude cytologique ou en cell-block que l’on obtient avec une aiguille de 22 Gauge n’est pas suffisante [20] et surtout peut être faussement inquiétante [11, 12] et conduire à une exérèse pancréatique injustifiée. C’est ici que l’aiguille de 19 G et sa capacité à obtenir des macro-fragments histologiques prend toute sa place. Une étude japonaise [21] portant sur 44 PAI, a récemment montré qu’il était possible d’obtenir un prélèvement histologique adéquat dans 93 % des cas en utilisant une aiguille de 19 G, conduisant à un diagnostic de PAI certain dans 43 % des cas et à un diagnostic de pancréatite chronique idiopathique dans 50 % des cas sans aucun faux positif de cancer. Dans notre expérience de 17 pancréatites auto-immunes qui justifiaient un prélèvement, l’utilisation d’une aiguille de 19 G coupante pour biopsier le corps ou la queue à travers l’estomac et d’une aiguille de 19 G flexible sans stylet pour biopsier la tête et/ou le crochet à travers le duodénum nous a fourni une histologie contributive dans 88 % des cas, permettant le diagnostic de 11/13 des PAI de type I (LPSP) et de 4/4 des PAI de type II (IDDP). Compte tenu de ce qui est publié dans la littérature et de mon expérience portant sur plus de 5 000 prélèvements de masses solides pancréatiques, mes recommandations concernant l’utilisation des différentes aiguilles sont résumées sur la Figure 1.

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Figure 1. Proposition d’algorithme pour l’utilisation des aiguilles de prélèvements écho-endoscopiquement guidés
des masses solides du pancréas

Élastographie

Il s’agit d’une technique échographique de caractérisation tissulaire développée à partir de 2005 dont le rationnel repose sur la différence d’élasticité entre les tissus tumoraux et la fibrose, la graisse ou les tissus normaux. Un code couleur a été arbitrairement attribué aux différentes élasticités tissulaires, du rouge (tissus mous normaux) au bleu (tissus très durs tumoraux).

Après avoir été évaluée en pathologie mammaire, thyroïdienne et prostatique, cette technique a été appliquée à l’écho-endoscopie puis développée et évaluée par notre compatriote et ami Marc Giovannini [22].

À partir de 2008, une analyse semi-quantitative a été proposée afin de diminuer la subjectivité de la méthode : elle consiste à évaluer l’élasticité d’une lésion en la comparant à un tissu non normal de référence (la paroi digestive normale), en établissant un rapport (strain ratio) entre la dureté du tissu analysé et celle du tissu mou de référence. Plus le strain ratio est élevé plus la lésion est dure et donc tumorale. Cependant, le strain ration élevé d’une lésion, s’il permet de suspecter sa nature tumorale ne permet pas d’affirmer sa nature maligne comme en témoigne le strain ratio très élevé de tumeurs endocrines bénignes (totalement bleues).

Les résultats de ces deux méthodes sont résumés dans le Tableau I.

Tableau I. Valeur de l’élastographie pour différencier
une masse pancréatique tumorale d’une lésion non tumorale

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Une méta-analyse publiée en 2013 [31] rapporte une excellente sensibilité de 95 % pour le diagnostic de masse tumorale pancréatique mais une sensibilité de seulement 67 % liée à la difficulté de différencier un foyer de pancréatite chronique très fibreux d’une lésion tumorale.

Au total, si l’élastométrie paraît supérieure à l’élastographie, ces deux méthodes présentent malgré tout un déficit de spécificité gênant en terme de caractérisation des masses solides pancréatiques.

Écho-endoscopie de contraste

1) Principe

L’écho-endoscopie de contraste est fondée sur le recueil du signal de vibration (oscillation volumétrique) de la micro-bulle d’un gaz inerte (perfluorocarbone) contenu dans une capsule de petit diamètre (7 m pour passer le filtre pulmonaire) circulant dans la microvascularisation tissulaire, capable de résister à la pression sanguine avant d’exploser ou de se dissoudre.

En Europe, le seul agent de contraste échographique de 2e génération utilisable est le Sonovue® (Bracco, Milan). Au Japon, c’est le Sonazoïd®. L’intensité de la vibration dépend de la flexibilité de la capsule, du gaz utilisé et de l’index mécanique (IM) des ultrasons. Pour qu’une réponse spécifique (produisant des harmoniques) puisse être captée par la sonde, il faut que l’IM soit bas (entre 0,1 et 0,6) afin que le mode vibratoire soit asymétrique. En écho-endoscopie de contraste, l’adénocarcinome pancréatique apparaît en hyposignal, le foyer inflammatoire en isosignal, tandis que la tumeur endocrine ou la métastase apparaît en hypersignal.

2) Valeur de l’écho-endoscopie de contraste dans les masses solides du pancréas

La comparaison des performances de l’écho-endoscopie de contraste par rapport à l’écho-endoscopie classique a été publiée par Fusaroli et al. en 2010 [7]. Les résultats sont résumés dans le Tableau II.

Tableau II. Comparaison entre l’écho-endoscopie et l’écho-endoscopie
de contraste pour le diagnostic d’adénocarcinome pancréatique

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La précision diagnostique de l’écho-endoscopie de contraste pour le diagnostic d’adénocarcinome était significativement meilleure (82 %) que l’image standard (57 %) avec une sensibilité de 96 % (IC : 85-99 %) et une spécificité de 64 % (IC : 47-78 %).

3) La comparaison entre le contraste et le scanner multidétecteur pour le diagnostic des cancers du pancréas a été publiée par M. Kitano et al. en 2012 [32] : elle est résumée dans le Tableau III.

Tableau III. Performances diagnostiques de l’EE de contraste et du scanner
multi-détecteur pour le diagnostic d’adénocarcinome pancréatique

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L’écho-endoscopie de contraste est significativement plus sensible (91,2 %) que le scanner multi-détecteur (70,6 %) pour les cancers de petite taille £ 2 cm et plus sensible mais non significativement quelle que soit la taille (95,1 % / 91,7 %).

4) La comparaison entre l’écho-endoscopie de contraste et l’EUS-FNA pour le diagnostic d’adénocarcinome pancréatique a été étudiée par M. Kitano et al. [32] et par la série prospective multicentrique française [9].

Les résultats sont résumés dans le Tableau IV.

Tableau IV. Comparaison entre EUS-FNA et écho-endoscopie avec contraste
pour le diagnostic d’adénocarcinome pancréatique

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Dans ces deux études ainsi que dans l’étude de P. Fusaroli [7], la valeur prédictive négative du contraste pour exclure le diagnostic d’adénocarcinome était supérieure à 90 %, ce qui constitue une grande avancée diagnostique.

De plus, les faux négatifs d’adénocarcinomes pancréatiques de l’EUS-FNA étaient tous hypovasculaires dans ces trois études, [7, 9, 32] ce qui signifie qu’en cas de lésion pancréatique solide suspecte d’être un adénocarcinome non documenté par l’EUS-FNA mais hypovasculaire en contraste, il faut remettre en cause le résultat du prélèvement et rebiopsier rapidement ou proposer une exérèse chirurgicale.

5) Une méta-analyse portant sur 12 études et incluant 1139 patients [33] a rapporté une sensibilité de 94 % (95 % IC, 0,91-0,95), une spécificité de 89 % (95 % IC, 0,85-0,92), et une aire sous la courbe de 0,97 pour le diagnostic d’adénocarcinome pancréatique.

6) Cas particulier des tumeurs neuro-endocrines du pancréas (TNE). La sensibilité du caractère hypervasculaire des TNE en écho-endoscopie de contraste varie de 69 % chez Fusaroli et al. [7] à 77 % (94 % si on rajoute les lésions isovasculaires) chez Kitano et al. [32] et 100 % dans l’étude multicentrique française [9]. Même si la spécificité de ce signe n’est pas de 100 % (cystadénome séreux pseudosolide, rate accessoire), le caractère hypervasculaire associé à la précocité de la prise de contraste (< 10 secondes après la fin de l’injection intraveineuse) est hautement évocateur du diagnostic.

7) L’utilisation du contraste améliore le choix du site du prélèvement écho-endoscopiquement guidé, au sein d’une masse pancréatique suspecte d’être tumorale dans 8 % des cas dans l’étude de Fusaroli [7] et dans 10 % des cas dans l’étude multicentrique française [9], en repérant et évitant ainsi les zones totalement avasculaires, a priori nécrotiques et les zones isovasculaires a priori pancréatitiques pour privilégier les zones hypovasculaires, sièges de l’adénocarcinome.

8) Enfin, la méthode semble reproductible puisque dans l’étude multicentrique française [9], il existe une bonne concordance interobservateurs et une excellente concordance intraobservateurs sans différence significative de performance entre les écho-endoscopistes juniors et seniors.

Au total, l’écho-endoscopie de contraste grâce à une excellente sensibilité et valeur prédictive négative obtenue sans perte exagérée de spécificité, et une bonne reproductibilité est une méthode de caractérisation tissulaire incontestablement très intéressante dans la prise en charge diagnostique des masses solides du pancréas.

Endomicroscopie confocale

Cette nouvelle technique d’imagerie également dénommée biopsie optique est proposée depuis une dizaine d’années avec des développements significatifs dans l’endobrachyœsophage, la maladie cœliaque, la caractérisation des polypes du côlon, la surveillance des MICI… La miniaturisation de la fibre laser a permis des développements dans la caractérisation par voie rétrograde des sténoses biliaires et plus récemment dans la caractérisation des lésions kystiques du pancréas (LKP). Bien qu’à un stade préliminaire, les premiers résultats sont suffisamment encourageants pour être dès maintenant explicités : 60 % de la sensibilité et 100 % de spécificité pour le diagnostic de TIPMP [34], 69 % de sensibilité et 100 % de spécificité pour le diagnostic de cystadénome séreux macro-kystique [35]. Compte tenu de ces résultats qui ne peuvent que s’améliorer avec l’expérience, il est envisageable que l’endomicroscopie confocale écho-endoscopiquement guidée connaisse les mêmes indications que le prélèvement écho-endoscopiquement guidé dans les LKP à savoir les lésions uni ou pauciloculaires non communicantes sans histoire clinique ou morphologique évoquant une pancréatopathie aiguë ou chronique sous-jacente.

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Les Cinq points forts

  1. Lors  des  prélèvements  écho-endoscopiquement  guidés  des  masses solides pancréatiques, l’étude cytologique doit être combinée à l’étude histologique et immuno-histochimique pour optimiser les résultats.

  2. Pour  le  diagnostic  positif  de  l’adénocarcinome  pancréatique,  le prélèvement  écho-endoscopiquement  guidé  possède  une  très  bonne fiabilité diagnostique mais une valeur prédictive négative insuffisante : 60 % (capacité à exclure le diagnostic en cas de prélèvement négatif).

  3. Les nouvelles aiguilles de prélèvement écho-endoscopiquement guidé (19 G Pro-Core ou 19 G flexible) améliorent les résultats dans certaines situations difficiles (pancréatite auto-immune).

  4. L’élastométrie  qui  est  plus  performante  que  l’élastographie  possède une excellente sensibilité (> 90 %) mais une spécificité imparfaite pour le diagnostic différentiel entre adénocarcinome et foyer de pancréatite très fibreux.

  5. L’écho-endoscopie  de  contraste  possède  une  excellente  fiabilité (>  90 %)  et  une  meilleure  valeur  prédictive  négative  (90 %)  que  le prélèvement écho-endoscopiquement guidé (60 %) pour le diagnostic d’adénocarcinome pancréatique.