What’s new in hepatology in 2013?

En attendant les nouveautés de l’AASLD 2013, voici les communications orales en hépatologie ainsi que quelques mises au point présentées à l’UEG Week de Berlin (octobre 2013).

Alcool :

La maladie alcoolique du foie est trèsfréquenteparticulièrement dans nos régions (Europe, Amérique du sud),la France étant le quatrième pays le plus consommateur d’alcool au monde après la RépubliqueTchèque et l’Estonie. Alors que la mortalité générale en lien avec la prise d’alcool avait diminué jusqu’en 1998, elle est actuellement en court de progression créant ainsi un véritable problème de santé publique. Les nouveaux modes de consommation d’alcool tel que le Binge Drinking serait à l’origine de la recrudescence de la maladie alcoolique(1).
Pour le diagnostic de la fibrose, plusieurs méthodes sontdisponibles: la Ponction Biopsie Hépatique, geste invasif, avec un risque de complications et un manque de compliance des patients mais restant legold standard, ou les tests non invasifs. Parmi ces tests, le fibroscan permettrait un diagnostic fiable de cirrhose en tenant compte de certains éléments (absence de cholestase et de nodules). Ainsi une valeur de fibroscan<6kPa correspondrait à une fibrose F0, une valeur  >30kPa à une fibrose F4. Entre ces 2 valeurs seuils, la mesure nécessite l’absence de cytolyse (6-8kPa=F1-2, >8kPa=F3) (2-3[CB1] ).
 
Hépatite Alcoolique Aigue (HAA) :Le traitement de l’HAA reste pour le moment une corticothérapie per os. Son association avec la Pentoxyfilline ou le N-Acetyl cystéine n’a pas permis d’améliorer la survie à 6 mois de ces patients. Le pronostic étant très sévère, différents scores pronostics ont été élaborés ces différentes années : le score de Lille, le GASH (Glasgow AlcoholicHepatits score), le MELD, le score ABIC (Age, bilirubine INR, créatinine score), le score de Maddrey. L’équipe de Papastergiou et al (4) a comparé ces différents scores sur 71 patients présentant une HAA histologiquement prouvée. La mortalité à 30 et à 90 jours était étudiée. Tous les scores cités ont montré une bonne valeur prédictive négative chez plus de 90% des patients. Ils sont donc fiables dans leur utilisation en clinique.

NASH (Non AcoholicSteatoHepatitis) :

La prévalence de la NAFLD (Non AlcoholicFattyLiverDisease) et de la NASH est en nette progression au cours des dernières années (respectivement  25-30% et 3-13%). Avec l’alcool, elles représenteront la majorité des causes de cirrhoses en 2030. Leurs prévalencessont plus importantes chez les obèses, les patients avec une hyperglycémie, un diabète, une hyperlipidémie, une HTA, un VHC ou un syndrome métabolique (5).
La NAFLD est souvent en lien avec la présence d’un syndrome métabolique (cf. critère IDF : augmentation du tour de taille et au moins 2 autres critères parmi : HTA, hypertriglycéridémie, hypocholestérolémie de type HDL, hyperglycémie ou diabète). Cependant, il peut y avoir une NAFLD sans syndrome métabolique. La physiopathologie serait alors différente : alors qu’avec le syndrome métabolique le mécanisme prépondérant est l’insulinorésistance, en l’absence de syndrome métabolique, les mécanismes pourraient être génétiques (rôle du gène PNPLA3), en lien avec la présence d’unmicrobiote (production endogène d’éthanol par E. Coli) ou la consommation de fructose dans les sodas et jus de fruits. Ces différents mécanismes encore méconnus pourraient interagir avec l’insulinorésistance, potentiellement présente même en l’absence de syndrome métabolique (6).
La NASH peut se compliquer d’un Carcinome Hépato-Cellulaire (CHC) sans la présence d’une cirrhose. De plus, en cas de NASH, la taille et le nombre des nodules sont plus importants en l’absence de cirrhose. Il n’y a pas encore de recommandations pour le dépistage du CHC dans ce cas (5).
 
HelicobacterPylori (HP) :La présence d’HP est associée au syndrome métabolique, à l’athérosclérose, aux maladies cardiovasculaires et au diabète. La NAFLD est aussi associée à l’obésité, au diabète de type 2, aux dyslipidémies et à l’hypertension artérielle. Le but de l’étude de Shen et al (7) était d’étudier l’association entre la présence d’HP etune NAFLD. 9091 patients ont été inclus : 20,6% avait des IgG anti-HP positifs et 26,1% présentait une NAFLD. La prévalence de la NAFLD était significativement plus haute dans le groupe de patients anti-HP positif (p<0,001). En étudiant le groupe HP positif, les patients avaient un BMI,un taux de cholestérol total, et de VDLC-cholestérol plus haut. La présence d’HP était significativement associée à la NAFLD.

Complications de la cirrhose

Hypertension portale (HTP) :Les bétabloquants non sélectifs sous couramment utilisés dans la prévention de la rupture de varices œsophagiennes. Pourtant, ils présentent souvent des effets indésirables sur le plan cardiovasculaire et pourraient même être délétères dans les cirrhoses avancées. Les inhibiteurs de la 5-phosphodiestérase sont utilisés dans le traitement de l’hypertension de l’artère pulmonaire et certaines études ont montré qu'ils pouvaient donner une augmentation du flux de la veine porte et une diminution de la pression portale chez les rats avec un foie normal. Kreisel et al (8) ont mené une étude de phase 2 impliquant l’utilisation de l’Udéfanil, un inhibiteur de la 5-phosphodiestérase à différents dosages (12,5, 25, 50, 75 et 100 mg/j) sur 30 patients avec une cirrhose, un gradient de pression portal >12mmHg et un faible risque hémorragique. Une mesure de la pression portale était réalisée à J0 et J6. Ils ont constatéaux posologies de 75 ou 100mg,  une diminution significative de la pression portale (J0 = -20% (p=0.006), J6 = -12% (p=0.042)). Cependant, cette diminution était moins importante à J6 qu’à J0. Aucun effet indésirable cardiovasculaire n’a été enregistré. L’utilisation de l’Udéfanilpourrait être une piste intéressante dans le traitement de l’HTP.
 
TIPS :Un nouvel essai étudiant l’utilisation de l’EarlyTIPS (couvert) dans les hémorragies sur rupture de varices a été mené aux Pays-Bas : 71 patients cirrhotiques ont été étudiés : ils étaientrandomisés soit dans le groupe EarlyTIPS (n=37), soit dans le groupe avec traitement standard incluant le traitement endoscopique au traitement par bétabloquant en prophylaxie secondaire de la rupture de varice (n=35). La majorité des patients était Child A ou B (35 et 49%), la cirrhose était d’origine OH dans 42% des cas. Dans le groupe Early TIPS, sa pose était réalisée dans les 6  jours. La médiane de suivi a été de 18 mois. La récidive hémorragique était significativement plus basse dans le groupe EarlyTIPS (2 versus 11). Par contre, il n’y avait pas de différence sur la mortalité (8 versus 7). La fréquence de l’apparition d’une encéphalopathie hépatique (EH) était plus importante chez les patients ayant bénéficié d’un TIPS mais globalement réduiteaprès traitement médical approprié. (25% d’EH, 2 patients ont eu un recalibrage du TIPS). La pose d’un Early TIPS après une rupture de varice œsophagienne diminue donc le risque de survenue d’un deuxième épisode, cependant, il ne semble pas diminuer la mortalité dans cette étude (9).
Infection du liquide d’ascite:La présence de fragments d’ADN bactériens dans le liquide d’ascite a été identifiée comme un marqueur de translocation bactérienne dans la cirrhose et semble être un facteur augmentant la mortalité en l’absence d’infections actives. Dans une étude de Bruns et al (10), la présence de fragments d’ADN bactériens était associée à une réponse systémique cytokinique (diminution du taux d’IL-6 dans le liquide d’ascite et hausse du taux d’IL-10 dans le sang) chez les patients cirrhotiques (221 patients cirrhotiquesdécompensés inclus avec une infection prouvée (urinaire, pulmonaire, sepsis) et au moins 2 critères de SIRS). Par contre, sa présence ne permettait pas de prédire la survie à 3 mois
CHC :Yamamoto et al (11) ont étudié l’effet du Deferasirox un nouveau chélateur du fer sur le développement de la fibrose et de l’apparition de lésionsprénéoplasiques in vitro et in vivo sur un modèle murin. In vitro, la croissance cellulaire était inhibée avec le Deferasirox. In vivo, il semblait significativement diminuer la progression de la fibrose et l’apparition de cellules néoplasiques.
 
Les résultats de l’étude GIDEON (Stal et al (12)): il s’agissait d’une étude prospective ayant inclus plus de 3200 patients avec un CHC non reséquable traité par Sorafenib (SOR). Dans cette analyse était comparés les patientsrecevant du SOR et ayant précédemmentbénéficiéou non d’une chimio embolisation (CE) ou les patients recevant du SOR  en association ou non à une CE (cCE). En Europe, 1113 patients ont été inclus dans 22 pays.33% avait eu une CE avant SOR  et 5% une cCE. La dose médiane de SOR était de 780 mg/j, la durée de traitement était plus longue chez les patients ayant eu une CE (20 versus 16 semaines) ou une cCE (31 vs 16 semaines). Cependant, il y avait plus de patients BCLC-A et B dans le groupe ayant eu une CE et plus de BCLC-B ou C dans le groupe sans CE, indiquant qu’une majorité des patients n’ayant pas bénéficié d’une CE n’y était en fait pas éligible. Les effets indésirables mineurs ousévères étaient comparables dans les différents groupes.
Le Sorafenib est donc le traitement adapté aux CHC évolués. Il permet une amélioration significative de la survie. Cependant, certains patients présentent des effets indésirables sévères ou ne répondent pas aux traitements. Une évaluation précoce de la réponse semble être importante et pourrait permettre de sélectionner plus précocement les patients répondeurs en évitant les toxicités non nécessaires et en diminuant les coûts de traitement. L’équipe de Garcovich et al (13) a évalué l’échographie de contraste chez 28 patients et selon les critères m-RECIST à J0, J15 et J30 du début du traitement. A 2 mois, la moitié des patients étaient considérés comme répondeurs au Sorafenib.  Ceux-ci présentaient une nette réduction de la perfusion tumorale indiquant un réelintérêt de cette méthode d’évaluation précocede la réponse tumorale.

Virus :

VHB :L’Entecavir est un analogue nucléosidique utilisé dans le traitement de l’hépatite B. les résistances à ce traitement sont rares par rapport aux anciens traitements tels que la Lamivudine mais existentnéanmoins. Le but du travail de Lee et al (14) était d’étudier les facteurs de risques de résistance de cette molécule. Sur 112 patients inclus (patients naïfs traités par Entecavir (n=74) ou en deuxième ligne (n=38)), 8 patients ont développé des résistances au traitement. Les facteurs de résistances retrouvésétaient : patient âgé, une charge virale élevée au début du traitement, une réponse incomplète ou l’absence de réponse au traitement. Un traitement antérieur par un autre analogue nucléosidique n’était pas significativement associéau développement de résistances.
 
VHC :Les nouvelles molécules sont en attente pour éradiquer le VHC. De nombreuses études sont en cours sur le Sofosbuvir (inhibiteur de polymérase, action sur les génotypes 1 à 6, meilleur profil de tolérance), le Faldaprevir et le Simeprevir. Certaines molécules pourraient permettre de retirer l’interféron du traitement de base de l’hépatite C (15).
 
VHE : l’hépatite E est un virus à ARN présent surtout dans les pays en voie de développement. Néanmoins on a noté une recrudescence des cas dans les pays développés. Sa forme la plus grave est l’hépatite fulminante qui peut se manifester surtout chez les femmes enceintes, ou peut aggraver une hépatopathie sous-jacente. Le diagnostic se fait par dosage des IgM anti-VHE ainsi que la PCR dans le sang et dans les selles, indispensable dans les pays à zone endémique faible comme la France. Chez les immunodéprimés on peut proposer un traitement par Ribavirine en cas de chronicisation. Un vaccinestactuellement en coursd’élaboration. (16)

BIBILIOGRAPHIE :

1: Cortez-Pinto H, The burden of alcohol worldwild, IP 091
2: Lackner K, Histology or non-invasive methods for initial assessment and follow-up? Histology, IP 093
3: Müller S, Histology or non-invasive methods for initial assessment and follow-up? Non-invasive methods, IP 094
4: Papastergiou V, Karatapanis S, Tsochatzis E, Thalassinos E, Pieri G, Burroughs A : Comparaisopn of seven prognostic models for short-term mortality in biopsy-proven alcoholic hepatitis, OP 272 
5: Bellentani S, How frequent is NAFLD in Europe and in the world?, IP 166
6: Serfaty L, NAFLD in the absence of the metabolic syndrome, IP 167
7: Shen Z, Qin Y, Lu Y, Yu C, Li Y: association between helicobacter pylori infection diagnosed by serological status and nonalcoholic fatty liver disease: a cross-selectional study,OP 333
8: Kreisel W, Deibert P, Kupcinskas L, Sumskiene J, Appenrodt B, Neagu M et al: the phosphodiesterase-5-inhibitor udenafil, a new option for therapy of portal hypertension,OP 273
9: Holster IL, Moelker A, Tjwa ET, Wils A, Kuipers EJ, Pattynama P et al:  early transjugular intrahepatic portosystemic shunt (TIPS) as compared to endoscopic treatment reduces rebleeding but not mortality in cirrhotic patients with a 1st or 2nd episode of variceal bleeding: a multicenter randomized controlled trial,OP 277
10:Bruns T, Reuken A, Gerber L, Appenrodt B, Peter J, Herrmann A et al, the prognostic significance of bacterial DNA fluid from critically ill cirrhotic patients.(OP 276)
11: Yamamoto N, Yamasaki T, Uchida K, Takami T, Fujisawa K, Maeda M et al, the new oral iron chelator prevents liver fibrosis and preneoplastic lesions in liver cancer and liver cirrhosis model, OP 330
12: Garcovich M, Zocco MA, Lupascu A, Di Stasio E, Roccarina D, Annichiarico BE et al, early prediction of response to Sorafenib in patients with advanced hepatocellular carcinoma: the role of dynamic contrast enhanced ultrasound,P 1182
13: Stal PI, Bronowicki JP, Mathurin P, Serejo F, Ratziu V, Bodoky G et al, Real life management of HCC with sorafenib and TACE in Europe from GIDEON (Global Investigation of therapeutic Decisions in HCC and Of its treatment with sorafenib),P 1196
14: Lee DS, Jung YS, Moon CM, Park JH, Park DI, Cho YK et al: clinical characteristics of patients with chronic hepatitis B who developed genotypic resistance to entecavir,OP 229
15: Berg T, Hepatology: what’s new in 2013: Viral hepatits, IP 458
16: Aggarwal R, when Europe meets the rest of the world: infectious liver diseases: Hepatitis E, IP 148
 
 

Anne-Laure Le Toux
Service d’Hépatologie et Gastroentérologie,
CHU Caen, Bd cote de nacre, 14033 Caen Cedex