[Atelier 7] Proctologie pratique (1) – Fissures anales : quel traitement médical en 2002 ?

Dans notre expérience, les Fissures Anales (FA) représentent un motif de consultation fréquent, et la troisième indication chirurgicale, après les hémorroïdes et les suppurations.

La pathogénie de la FA semble répondre de plusieurs facteurs, mécanique, sphinctérien, vasculaire. Dans la pratique, il n’est pas toujours possible de déterminer lequel de ces facteurs est prépondérant. Il est plus clair, en revanche, que certaines FA font suite à une circonstance exceptionnelle, telle que l’accouchement, un alitement prolongé, une constipation occasionnelle… D’autres FA entrent plus volontiers dans le cadre d’une  » maladie fissuraire « , caractérisées par leur résistance au traitement médical, et leur tendance à la récidive.

Les indications chirurgicales sont claires : FA récidivante, FA résistant au traitement médical, FA infectée, FA d’aspect douteux, FA associée à une autre pathologie anale. Sans entrer dans le détail des différentes techniques chirurgicales, nous soulignerons ici seulement les craintes de tout chirurgien proctologue de provoquer, par son intervention, une altération irréversible de la continence anale.

Le traitement médical, presque toujours tenté de première intention, repose sur la nécessité de lever le spasme sphinctérien de façon suffisamment prolongée pour autoriser la cicatrisation de la FA, sans prendre de risque fonctionnel durable. Dans tous les cas, la régularisation du transit et le traitement antalgique gardent une place primordiale. Pour ce qui concerne la levée du spasme anal, les choses peuvent paraître moins évidentes : à l’opposé des moyens simples, bains de siège chauds, auto-massages et suppositoires, d’autres méthodes ont été proposées, donnant lieu à de nombreuses publications.

Les dérivés nitrés , en application locale d’une pommade à 0,2 % deux fois par jour, ont été proposés pour leur action myorelaxante démontrée sur le sphincter lisse. Les espoirs soulevés par les premières études encourageantes ont été tempérés par les données des travaux suivants montrant des résultats moins favorables, surtout à court et moyen terme, et par la fréquence des effets indésirables.

La toxine botulique A dont on connaît l’action relaxante sur les muscles striés, inhiberait l’activité des muscles lisses par un mécanisme mal élucidé. Cette toxine a été testée dans plusieurs études, avec des résultats discordants. L’intérêt de cette substance est limité par son coût, ses difficultés d’utilisation, et l’absence de données à moyen et long terme.
Les inhibiteurs calciques ont une action myorelaxante démontrée sur le canal anal. Une étude contrôlée récente a montré que la nifédipine en application locale (préparation à 2 %) était plus efficace qu’une pommade à l’hydrocortisone sur les symptômes et la cicatrisation.

Conclusion

Les travaux actuellement publiés ne permettent pas au praticien de faire un choix objectif parmi ces trois  » sphinctérotomies chimiques réversibles « . Rappelons qu’aucune d’elles ne bénéficie actuellement de l’AMM dans le traitement de la FA. Les moyens médicaux classiques restent donc d’actualité en attendant de nouvelles études.

RÉFÉRENCE

  • SIPROUDHIS L, DE PARADES V, PARISOT V. – La fissure anale à l’épreuve de l’evidence based medecine. Le Courrier de colo-proctologie 2000 ; 1 : 8-13.

POUR EN SAVOIR PLUS…

  • DE PARADES V, PARISOT C. – La fissure anale. Encycl Méd Chir (Eselvier, Paris), Gastro-entérologie, 9-087-A-10, 1997, 4 p.
  • STAUMONT G, SUDDUCA JM. – La fissure anale : de nouveaux concepts physiopathologiques et thérapeutiques. Gastroentérol Clin Biol 1998 ; 22 : B148-B154.
  • LUND JN, SCHOLEFIED JHA. – Randomised, prospective, double-blind, placebo-controlled trial of glyceryl trinitrate ointment in treatment of anal fissure. Lancet 1997 ; 349 : 11-14.
  • HYMAN NH, CATALDO PA. – Nitroglycerin ointment for anal fissures : effective treatment or just a headache ? Dis Colon Rectum 1999 ; 42 : 383-385.
  • MARIA G, CASSETA E, GUI D et al. A comparison of botulinum toxin and saline for the treatment of chronic anal fissure. N Engl J Med 1998 ; 338 : 217-220.
  • SIPROUDHIS L, REYMAN JM, PIGOT F et al. Toxine botulique et fissure anale chronique : progrès ou intox ? Gastroentérol Clin Biol 2000 ; 24 : A85.
  • ANTROPOLI C, PERROTI P et al. Nifedipine for local use in conservative treatment of anal fissures : preliminary results of a multicenter study. Dis Colon Rectum 1999 ; 42 : 1011-1015.