Adénocarcinome du cardia quoi de neuf

Introduction

Le cardia est une zone frontière entre l’œsophage et l’estomac. Comme toutes les frontières, anatomiques ou géographiques, ses limites sont floues, fluctuantes avec le temps et l’histoire. Son identité même est quelquefois contestée. Pour DeMeester, l’évolution épidémiologique parallèle, les facteurs de risque similaires entre l’adénocarcinome de l’œsophage et du cardia, plaident en faveur d’une même maladie [1]. La classification internationale des maladies (CIM10) définit les tumeurs de l’œsophage par le code générique C15 et les cancers de l’estomac par le code C16. Le cancer du cardia est classé comme un cancer gastrique proximal et codé C16.1. Cependant, les cancers de l’estomac proximal n’ont pas les mêmes facteurs de risques que les cancers du corps ou de l’antre [3]. La différence majeure entre l’adénocarcinome du bas œsophage et celui du cardia concerne le drainage lymphatique [2].

Une définition anatomo-clinique a été proposée en 1996 par Siewert : l’adénocarcinome du cardia est un adénocarcinome dont le centre est situé au plus à 5 cm au-dessus ou en dessous de la jonction œsogastrique (ligne Z) [2, 4]. Pour certains, cette définition est plus stricte, limitée à 2 cm au dessus et 3 cm en dessous de la ligne Z en l’absence de muqueuse de Barrett (métaplasie intestinale) [5]. Pour d’autres, la notion de cardia est trop restrictive et remplacée par la notion de jonction œso-gastrique, principalement dans les études thérapeutiques.

Epidémiologie et facteurs de risque

L’incidence du cancer du cardia augmente rapidement depuis les années 70 dans les pays occidentaux [6]. L’incidence de cancer du cardia a augmenté de 77% entre les années 1974-76 et 1996-98 selon les données du registre américain du National Cancer Institute passant de 1,9 à 3,4 pour 100000/an [7]. En France, peu de données épidémiologiques récentes sont disponibles sur le cancer du cardia. La publication la plus récente rapporte l’évolution entre 1978 et 1995 dans le département du Calvados. La seule localisation au cardia n’a pas connu pendant cette période d’évolution significative; cependant l’association des localisations adénocarcinome de l’œsophage + cardia a enregistré une augmentation d’incidence [8]. Il est souligné dans ces articles, la difficulté de démembrer avec précision les cancers du cardia en raison des erreurs fréquentes de codage avec l’adénocarcinome du bas œsophage [5]. Dans le rapport de l’institut de veille sanitaire de 2003 sur le cancer en France, les données sont fournies par organe (œsophage et estomac) sans plus de précision. Ces résultats ne permettent pas d’estimer l’évolution épidémiologique récente en France, concernant le cancer du cardia [9].

» Les facteurs de risque du cancer du cardia

HELICOBACTER PYLORI

Pour le cancer de l’estomac non cardial, l’infection à Helicobacter pylori (HP) est un facteur de risque démontré [10]. Pour le cancer du cardia, l’infection à HP n’est pas un facteur de risque [10-13]. Au contraire, certaines études concluent à un effet protecteur de l’infection à HP pour le cancer du cardia [12, 13]. L’étude la plus récente suggère que l’augmentation d’incidence du cancer du cardia est une conséquence de la diminution de la prévalence de l’infection à HP. Cette étude cas-témoins a utilisé les données d’une population de 29133 sujets, âgés de 55 à 69 ans, recrutés pour une étude nutritionnelle. Les auteurs ont comparé les 234 cas de cancer gastrique (173 non cardia, 61 cardia) apparus dans cette cohorte à 234 témoins. La séropositivité pour HP (HP+) était statistiquement liée à la présence d’un cancer du cardia (Odds Ratio ajustés = 0,31, IC95% = 0,11 à 0,89). Le calcul du risque de développer un cancer du cardia et cancer non cardial chez les sujets HP+ était de 12 et 63 par 100000personnes-années. Cependant, chez les HP- le risque était respectivement de 37 et 8 par 100 000 personnes-années. Ces résultats suggèrent que la diminution du risque de cancer de l’estomac non cardial par la diminution de la prévalence de l’infection à HP est limitée par l’augmentation du risque du cancer du cardia chez les sujets non infectés par HP [12].

L’explication classique est que l’infection à HP provoque une gastrite atrophique dont la conséquence est une diminution de la sécrétion acide. Cette diminution de la sécrétion acide limite le reflux acide gastro-œsophagien et l’agression de la muqueuse du bas œsophage. Les mécanismes sont probablement plus complexes car, paradoxalement, l’atrophie gastrique, liée ou non à HP, semble significativement associée à un risque élevé pour le cancer du cardia (Odds ratio = 4,5 IC95% 2,5 à 7,8) [14].

figure1

 

Figure 1. – Classification des cancers du cardia selon Siewert [2].
Le type est défini en fonction de la distance entre le centre de la tumeur et la ligne Z

(-5 à -1 cm : type I, -1 à + 2 cm type II, + 2 à + 5 cm type III).

 

INDICE DE MASSE CORPOREL (IMC)

La relation entre la masse corporelle et le risque d’adénocarcinome de l’œsophage et du cardia a été étudiée dans plusieurs études avec des résultats contradictoires. La méta-analyse publiée récemment permet de dégager des conclusions [15]. Ce travail a analysé 14 études regroupant 2509 cancers du cardia et 2488 adénocarcinomes de l’œsophage. Les principaux résultats montrent qu’un IMC >25 est associé à un risque élevé de cancer de l’œsophage (odds ratio ≥ 2 dans les deux sexes). Pour le cancer du cardia, malgré une hétérogénéité des études un IMC élevé (>25) est également associé à un risque élevé (odds ratio = 1,5 IC95% 1,3 à 1,8).

REFLUX GASTRO-ŒSOPHAGIEN

La présence d’un reflux gastro-œsophagien est un facteur de risque démontré pour la survenue d’un adénocarcinome de l’œsophage et du cardia [16]. L’importance du risque relatif est cependant différente avec un odds ratio de 43,5 (IC95% 18,3 à 103,5) pour l’œsophage et de 4,4 (IC95% 1,7 à 11,0) pour le cardia. Le risque de cancer reste élevé après traitement chirurgical du reflux pour l’œsophage comme pour le cardia avec un odds ratio respectivement de 14,1 et 5,3 [17].

CONDUITE ALIMENTAIRE (EXEMPLE DU CHEWING GUM)

L’utilisation du chewing gum a été incriminée dans les facteurs susceptibles d’augmenter le risque de cancer du cardia car : a) son utilisation a précédé l’augmentation d’incidence de ce cancer; b) certains mécanismes biologiques supportent cette hypothèse. La salivation provoquée par l’utilisation de chewing gum augmente la concentration salivaire en nitrites convertis secondairement en substances carcinogènes. Cette hypothèse a été testée par une équipe suédoise sur les données d’une étude cas-témoins. Le résultat de ce travail ne montre pas d’association significative entre la consommation de chewing gum et le cancer du cardia [18].

Le poids relatif des principaux facteurs de risque dans la survenue du cancer du cardia (œsophage ou gastrique) a été étudiée sur la base d’une population américaine [19].

Les données concernant le cancer du cardia sont probablement biaisées par la difficulté de définition anatomique de ces lésions. Cette difficulté mise en évidence dès les études épidémiologiques se retrouve dans l’analyse des données sur la cancérogenèse et les facteurs de risque. Le cardia est à la jonction des deux voies de cancérogenèse : la voie du reflux gastro-œsophagien via l’œsophage de Barrett; la voie gastrique via l’infection à HP [20]. En fonction des études, des modalités de sélection des patients, les facteurs de risques et les caractéristiques biologiques sont plus ou moins proches de ceux décrits pour l’adénocarcinome de l’œsophage ou de l’estomac.

Les explorations pré-thérapeutiques du cancer du cardia

Elles ont pour objectifs de faire le bilan d’extension de la maladie néoplasique, le bilan des co-morbidités associées et de préciser le site anatomique (type de Siewert).

La description endoscopique initiale a toute son importance avec le repérage de la lésion par rapport à la ligne Z, la distance pôle inférieur et supérieur par rapport aux arcades dentaires.

L’échoendoscopie (EE) a montré sa supériorité par rapport à la tomodensitométrie pour les déterminations de l’envahissement tumorale en profondeur (T) et de l’atteinte ganglionnaire (N) des cancers de l’œsophage [21]. Pour la définition du stade ganglionnaire l’EE classe correctement 75% des patients lorsque la tumeur est située dans l’œsophage (N0/1). En effet, les critères de malignité (taille> 1 cm, hypoéchogénicité, homogénéité, aspect rond bien limité) sont réunis dans seulement 20 à 40% des adénopathies tumorales [22]. Les études concernant le cancer du cardia sont plus rares. Les résultats montrent que le stade T est souvent surestimé en raison de la difficulté de visualisation de la séreuse dans la région cardiale [23]. L’EE est l’examen le plus performant pour le diagnostic de l’envahissement ganglionnaire (72 à 89%) [24, 25]. L’EE avec ponction des ganglions suspects a probablement moins d’influence sur la décision thérapeutique pour le cancer du cardia que pour le cancer de l’œsophage. En effet, la présence d’une adénopathie métastatique coeliaque est une métastase (M1a) qui contre-indique la résection chirurgicale pour un cancer de l’œsophage alors que c’est une adénopathie régionale (N+) pour un cancer du cardia.

L’utilité de la coelioscopie et de l’écho-coelioscopie pour le bilan locorégional reste débattue; cependant, elle permet la détection chez 23% des patients de métastases à distance méconnue par la tomodensitométrie [24, 26].

Le PET-FDG, comme dans les autres localisations, permet de détecter des métastases non vues à la tomodensitométrie et le bilan le plus performant semble être l’association EE, tomodensitométrie et PET-FDG [27]. Cependant, les études ont été réalisées sur de petits effectifs par des études monocentriques.
En routine, le bilan actuel d’un adénocarcinome invasif du cardia doit comporter un échoendoscopie et une tomodensitométrie thoraco-abdominale. Les autres techniques sont encore du domaine de l’évaluation. En particulier, le PET-FDG n’a pas été comparé à la coelioscopie pour la détection des métastases.

Les nouveautés thérapeutiques

Le traitement du cancer du cardia ou de la jonction œso-gastrique comporte les techniques de résection endoscopique (mucosectomie), la résection chirurgicale, la chimiothérapie, la radio-chimiothérapie et les techniques palliatives de désobstruction (prothèses).

La mucosectomie est réservée aux adénocarcinomes intramuqueux bien limités en surface après exploration par échoendoscopie haute fréquence. Il n’y a pas de données spécifiques à la localisation cardiale.

Pour les maladies non métastatiques, la résection chirurgicale est généralement envisagée (T1-3, N0-1, M0). Le type de résection est fonction de la situation anatomique de la lésion. Pour les cancers type I, la résection recommandée par l’équipe de Siewert comporte une œsophagectomie transthoracique et un curage ganglionnaire deux champs (laparotomie médiane et thoracotomie droite, anastomose œso-gastrique intrathoracique), et pour le type III une gastrectomie totale [2]. Ce choix est fondé sur la connaissance du drainage lymphatique de la région cardiale. Le type III est classiquement de plus mauvais pronostic que les typesI et II car le diagnostic est fait à un stade plus avancé de la maladie [4, 28]. Peu d’études randomisées ont été publié sur ce sujet. Une méta-analyse portant sur 7527 patients a étudié l’efficacité de l’œsophagectomie transhiatale (sans ouverture du thorax par voie abominale et cervicale) ou transthoracique. Dans cette étude, était inclus des cancers de l’œsophage et du cardia. La survie des patients était identique dans les deux groupes avec des complications pulmonaires plus fréquentes dans le groupe transthoracique [29]. La plus grande étude randomisée montre une morbidité significativement supérieure et une tendance à une survie plus longue pour le groupe traité par résection transthoracique [30]. Pour le type II, le choix de l’intervention est difficile car les données fondées sur le drainage lymphatique indiqueraient une œsogastrectomie totale. En pratique, selon le bilan d’extension et en particulier les données de l’EE, le geste est orienté soit vers une œsophagectomie transthoracique ou une gastrectomie totale avec anastomose œso-jejunale. Certains proposent, en cas d’absence d’envahissement ganglionnaire à l’EE, une gastrectomie partielle et œsophagectomie partielle par voie intra abdominale [1, 3].

Ces données permettent de proposer pour le type I : une œsophagectomie transthoracique avec curage ganglionnaire deux champs; pour le typeIII, une gastrectomie totale et pour les types II, soit le traitement identique au type I soit un traitement plus limité (gastrectomie partielle et œsophagectomie partielle par voie abdominale) en cas d’absence d’atteinte ganglionnaire à l’EE [1, 3].

Pour les stades localement avancés (T3 et/ou N+) différents traitements complémentaires à la chirurgie ont été évalués.

1) Dans le type I assimilé dans les études à l’adénocarcinome de l’œsophage

La chimiothérapie néoadjuvante par 5fluorouracile et cisplatine (2 cures) a été évaluée dans deux grands essais randomisés [30, 31]. Le premier essai américain a inclus 400 patients et n’a pas montré de bénéfice en terme de survie globale [31]. L’essai anglais sur 800 patients montre une amélioration significative de la survie médiane, 13,3 mois pour la chirurgie seule versus 16,8 mois dans le bras chimiothérapie puis chirurgie. La chimiothérapie préopératoire n’a pas augmenté la mortalité postopératoire qui était de 10% dans les deux groupes [32]. Dans cet essai, le bilan préthérapeutique ne correspondait pas à ce qui paraît actuellement nécessaire. Le niveau de preuve est cependant relativement élevé et on peut proposer une chimiothérapie néoadjuvante par deux cures de 5Fluororuracile-cisplatine à la chirurgie d’exérèse pour les adénocarcinomes de l’œsophage T3 et/ N+.
La radiochimiothérapie néoadjuvante a été testée dans 4 études randomisées ayant inclus au moins 100 patients [33-36]. Une seule étude montre un bénéfice significatif en survie favorable au bras radiochimiothérapie plus chirurgie [33]. Cette étude est critiquée sur le bilan préthérapeutique (pas de TDM systématique) et sur le résultat très médiocre du bras chirurgie seule (6% de survie à 3 ans). L’étude multicentrique française de Bosset et coll. est plus proche de nos pratiques [34]. Elle montre que la mortalité postopératoire est significativement plus élevée dans le bras radiochimiothérapie préopératoire que dans le bras chirurgie seule avec 12,3 versus 3,6% (p=0,012). Cependant, la survie sans récidive était significativement plus longue dans le bras radiochimiothérapie (OR 0,6 IC95% 0,4-0,9 p=0,003). Ce résultat plaide en faveur de l’efficacité de cette association; néanmoins, la survie globale n’était pas différente dans les deux bras. Le critère principal de jugement d’une étude de phase III en cancérologie est la survie globale et par conséquent, le niveau de preuve pour l’utilisation en routine d’une radiochimiothérapie préopératoire systématique reste insuffisant même si les arguments indirects sont multiples et convergents. De plus, dans ces études certaines ont inclus exclusivement ou très majoritairement des cancers épidermoïdes de l’œsophage. Le type histologique semble influencer l’évolution post-opératoire [37].

2) Les cancers du cardia de Type II et III ont été inclus dans les études de traitement du cancer de l’estomac.

La radiochimiothérapie postopératoire (5FU-Ac Fol + 45 Gy) a montré son efficacité dans une étude randomisée ayant inclus 556 patients [38]. La population étudiée était composée de lésions T3 dans plus de 60% des cas avec un envahissement ganglionnaire dans 85% des cas. La localisation de la tumeur était cardiale dans 20% des cas. A 3 ans, en l’absence de traitement adjuvant, le risque relatif de décès était augmenté de 35% et le risque de récidive était augmenté de 52%. La survie sans récidive à 3 ans était de 31% dans le bras chirurgie contre 48% dans le bras chirurgie + radiochimiothérapie. La survie globale à 3 ans était de 41% dans le bras chirurgie seule et de 50% dans le bras chirurgie + radiochimiothérapie. La médiane de survie était significativement plus longue dans le bras radiochimiothérapie (27 versus 36 mois p<0,05). L’analyse de la courbe de survie du bras chirurgie montre que la survie globale à 5 ans est de 28%. Le résultat de cette large étude est incontestablement en faveur de la radiochimiothérapie post-opératoire; cependant, les conclusions sont limitées à la population étudiée. Cette population présentait la particularité d’avoir bénéficié d’une chirurgie incomplète, avec dans plus de 50% des cas un curage inférieur à D1. Une étude coréenne prospective comparative non randomisée sur 990 malades a étudié la chirurgie seule et la chirurgie suivie d’une radiochimiothérapie identique à celle utilisée dans l’étude américaine [39]. Dans les deux groupes, l’analyse du statut ganglionnaire a porté sur plus de 25 ganglions chez 85% et 87% des patients respectivement. Le bénéfice en faveur du groupe radiochimiothérapie a été confirmé sur la survie globale à 5 ans pour les stade IIIA (61,6% vs. 43,9%, p=0,0013) et IIIB (40,8% vs. 20,5%, p=0,0045). Ces deux études convergentes permettent de conclure que la radiochimiothérapie améliore la durée de vie des patients opérés d’un adénocarcinome gastrique ou cardial T3 et/ou N+.

La chimiothérapie péri-opératoire a également été validée par deux études prospectives randomisées [40, 41]. L’étude anglaise a comparé la chirurgie seule à la chirurgie encadrée par 3 cures de chimiothérapie par Epirubicine, cisplatine, 5Fluorouracile (ECF) (3 cures avant et 3 cures après la chirurgie). Dans cette étude, 550 patients ont été inclus dont 25% porteurs d’une tumeur du cardia. Le risque de récidive était significativement diminué dans le bras chimiothérapie, hazard ratio = 0,7 (IC95% 0,56-0,88) p=0,002. Le risque de décès était significativement diminué dans le bras chimiothérapie hazard ratio = 0,75 (IC95% 0,60 – 0,93) p=0,009. Le taux de survie à 5 ans des patients du groupe chirurgie seule était particulièrement faible (23%) et les critères de qualité de la chirurgie ne sont pas connus. La survie du groupe chimiothérapie et chirurgie était de 36% à 5 ans [40]. L’étude française a comparé la chirurgie seule à la chirurgie encadrée par 2 cures de 5fluorouracile et cisplatine [41]. Parmi les 224 patients inclus, 64% présentaient une tumeur du cardia. Le pourcentage de patients vivants sans récidive à 5 ans était significativement supérieur dans le groupe chimiothérapie (34 vs. 17%, p=0,018).

Pour les tumeurs du cardia, la chimiothérapie péri-opératoire peut être recommandée selon la modalité proposée par l’étude Française (2 cures de 5 fluorouracile-Cisplatine ou l’équivalent actuel par 4 cures de LV5FU2-cisplatine).

Pour les malades métastatiques, les protocoles de chimiothérapie utilisés sont ceux étudiés dans le cancer de l’estomac métastatique. Dans cette indication, les nouveaux médicaments antiangiogéniques ou anti-EGFr n’ont pas encore démontré leur supériorité par rapport aux schémas classiques (ECF, 5FU-cisplatine). Il cependant important de noter que le schéma ECF nécessitant une perfusion très prolongée de 5Fluorouracile a été optimisé avec le remplacement du 5FU par une prodrogue administrable par voie orale (la capecitabine) et du cisplatine par l’oxaliplatine moins néphrotoxique [42].

Le traitement de la dysphagie a été amélioré par l’arrivée des prothèses métalliques auto-expansibles. Pour les tumeurs du bas œsophage ou du cardia, ces prothèses sont placées en transcardiale exposant au reflux gastro-œsophagien (RGO) et au risque de pneumopathie d’inhalation. L’apparition des prothèses anti-reflux a justifié leur évaluation sur les phénomènes de reflux et de dysphagie. Les 4 études randomisées réalisées sur ce sujet ont inclus 157 patients [43-46]. La première étude publiée en 2002 sur 50 patients montrait un effet significatif sur le nombre de patients décrivant un RGO après la pose de prothèse (76% vs. 12%, p<0,01) sans diminuer l’efficacité sur la dysphagie [43]. Les 3 autres études ne montrent pas d’amélioration de la symptomatologie de RGO [44-46]. Une étude coréenne récente a évalué deux prothèses anti-reflux, l’une dite standard et un nouveau procédé «Dostent®», le groupe témoin était traité par une prothèse ouverte [44]. L’évaluation était réalisée par une ph métrie des 24h. Aucune différence n’était relevée entre le résultat après prothèse ouverte ou antireflux classique; en revanche, la diminution du temps à pH < 4 était significative avec le procédé Dostent®.

Les résultats des prothèses anti-reflux semblent discordants sur le RGO; cependant, aucune étude ne montre de détérioration de l’efficacité sur la dysphagie. La prothèse Dostent® mérite une évaluation sur un plus grand nombre de patients.

Conclusion

L’adénocarcinome du cardia a une incidence qui, très probablement, augmente en France comme dans les autres pays occidentaux. Le surpoids et le reflux gastro-œsophagien sont les deux facteurs de risques principaux. La classification de Siewert reste la classification la plus cliniquement pertinente. Les explorations pré-thérapeutiques reposent sur l’échoendoscopie et la tomodensitométrie. Les autres explorations (coelioscopie, PET-FDG) sont en évaluation mais apportent probablement plus de précision dans la définition de l’extension métastatique. La stratégie de traitement est fonction du type de Siewert. Type I : le traitement est similaire à celui des cancers de l’œsophage; pour les TypesIII, le traitement est celui d’un cancer de l’estomac. Le traitement des Types II est plus difficile et justifie pleinement la discussion multidisciplinaire.

RÉFÉRENCES

1. DeMeester SR. Adenocarcinoma of the esophagus and Cardia: A review of the disease and its treatment. Ann Surg Oncol 2006; 13: 12-30.
2. Siewert JR, Stein HJ. Carcinoma of the gastroesophageal junction-classification, pathology and extent of resection. Dis Esophagus 1996; 9: 173-82.
3. Marsman WA, Tytgat GNJ, Ten Kate FJW, van Lanschot JJB. Differences and similarities of adenocarcinnomas of the esophagus and esophagogastric junction. J Surg Oncol 2005; 92: 160 8.
4. Pedrazzani C, Bernini M, Giacopuzzi S, Pugliese R, Catalano F, Festini M, et al. Evaluation of Siewert classification in gastro-esophageal junction adenocarcinoma: What is the role of endoscopic ultrasonography? J Surg Oncol 2005; 91: 226-31.
5. Lindblad M, Ye W, Lindgren A, Lagergren J. Disparities in the classification of esophageal and cardia adenocarcinomas and their influence on reported incidence rates. Ann Surg 2006; 243: 479-85.
6. Blot WJ, Devesa SS, Kneller RW, Fraumeni JF Jr. Rising incidence of adenocarcinoma of the esophagus and gastric cardia. JAMA 1991; 265: 1287 9.
7. Corley DA, Kubo A. Influence of site classification on cancer incidence rates: an analysis of gastric cardia carcinomas. J Natl Cancer Inst 2004; 96: 1383-7.
8. Desoubeaux N, Le Prieur A, LaunoyG, Maurel J, Lefevre H, Guillois JM, Gignoux M. Recent time trends in cancer of the oesophagus and gastric cardia in the region of Calvados in France, 1978-1995: a population based study. Eur J Cancer Prev 1999; 8: 479-86.
9. http://www.invs.sante.fr/cancer_
1983_2002/default.htm
10. Eslick GD, Lim LLY, Byles JE, Xia HHX, Talley NJ. Association of Helicobacter pylori infection with gastric carcinoma: a meta-analysis. Am J Gastroenterol 1999; 94: 2373-9.
11. Hansen S, Melby KK, Jellum E, Vollset SE. Helicobacter pylori infection and risk of cardia cancer and non cardia gastric cancer. A nested case-control study. Scand J Gastroenterol 1999; 34: 353-60.
12. Kamangar F, Dawsey SM, Blaser MJ, Perez-Perez GI, Pietinen P, Newschaffer CJ, et al. Opposing risks of gastric cardia and noncardia gastric adenocarcinomas associated with Helicobacter pylori seropositivity. J Natl Cancer Inst 2006; 98: 1432-4.
13. Ye W, Held N, Lagergren J, EngstrandL, Blot WJ, McLaughlin JK, et al. Helicobacter pylori infection and gastric atrophy: Risk of adenocarcinoma and squamous-cell carcinoma of the esophagus and adenocarcinoma of the gastric cardia. J Natl Cancer Inst 2004; 96: 388-96.
14. Wu AH, Crabtree JE, Bernstein L, Hawtin P, Cockburn M, Tseng CC, Forman D. Role of Helicobacter pylori CagA+ strains and risk of adenocarcinoma of the stomach and esophagus. Int J Cancer 2003; 103: 815-21.
15. Kubo A, Corley DA. Body mass index and adenocarcinomas of the esophagus or gastric cardia: a systematic review and meta-analysis. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 2006; 15: 872-8.
16. Largergren J, Bergstrom R, Lindgren A et al. Symptomatic gastroesophageal reflux as a risk factor for esophageal adenocarcinoma. N Engl J Med 1999; 340: 825-31.
17. Ye W, Chow WH, Lagergren J, Yin L, Nyren O. Risk of adenocarcinomas of the esophagus and gastric cardia in patients with gastroesophageal reflux diseases and after antireflux surgery. Gastroenterology 2001; 121: 1286-93.
18. Lagergren J, Jansson C, Viklund P. Chewing gum and risk of oesophageal adenocarcinoma: a new hypothesis tested in a population-based study. Eur J Cancer 2006; 42: 2359-62.
19. Engel LS, Chow WH, Vaughan TL, Gammon MD, Risch HA, Stanford JL et al. Population attributable risks of esophageal and gastric cancers. J Natl Cancer Inst 2003; 95: 1404-13.
20. Carneiro F, Chaves P. Pathologic risk factors of adenocarcinoma of the gastric cardia and gastroesophageal junction. Surg Oncol Clin N Am 2006; 15: 697-714.
21. Kelly S, Harris K, Berry E, Hutton J, Roderick P, Cullingworth J et al. A systematic review of the staging performance of endoscopic ultrasound in gastro-esophageal carcinoma. Gut 2001; 49: 534-39.
22. Penman ID, Shen EF. EUS in advanced esophageal cancer. Gastrointest Endosc 2002; 56 (Suppl): S2-S6.
23. Kienle P, Buhl K, Kuntz C, Hartmann C, Axel B, Herfarth C, et al. Prospective comparison of endoscopy, endosonography and computed tomography for staging of tumours of the oesophagus and gastric cardia. Digestion 2002; 66: 230-6.
24. Wakelin SJ, Deans C, Crofts TJ, Allan PJ, Plevris JN, Paterson-Brown S. A comparison of computerised tomography, laparascopic ultrasound and endoscopic ultrasound in the preoperative staging of oesophago-gastric carcinoma. Eur J Radiol 2002; 41: 161 7.
25. Räsänen JV, Sihvo EIT, Knuuti J, Minn HRI, Luostarinen MES, Laippala P, et al. Prospective analysis of accuracy of positron emission tomography, computed tomogrphy and endoscopic ultrasonography in staging of adenocarcinoma of the esophagus and the esophagogastric junction. Ann Surg Oncol 2003; 10: 954-60.
26. Hulsher JB, Nieveen van Dijkum EJ, de Wit LT, van Delden OM, van Lanschot JJ, et al. Laparoscopy and lapraoscopic ultrasonography in staging carcinoma of the gastric cardia. Eur J Surg 2000; 166: 862-5.
27. Sihvo EI, Rasanen JV, Knuuti MJ, Minn HR, Luostarinen ME, Viljanen T, et al. Adenocarcinoma of the oesophagus and the esophagogastric junction: positron emission tomography improves staging and prediction of survival in distant but not in locoregional disease. J Gastroenterol Surg 2004; 8: 988-96.
28. Siewert JR, Feith M, Werner M, HubertS. Adenocarcinoma of the esophagogastric junction: results of surgical therapy based on anatomical/topographic classification in 1002 consecutive patients. Ann Surg 2000; 232: 353 61.
29. Hulscher JB, Tijssen JG, Obertop H, van Lanschot JJ. Transthoracic. Resection compared with limited transhiatal resection for carcinoma of the esophagus: a meta-analysis. Ann Thorac Surg 2001; 72: 306-13.
30. Hulscher JB, van Sandick JW, de Boer AG, Wijnhoven BP, Tijssen JG, Fockens P, et al. Extended transthoracic resection compared with limited transhiatal resection for adenocarcinoma of the esophagus. N Engl J Med 2002; 347: 1662-9.
31. Kelsen DP, Ginsberg R, Pajak TF, Sheahan DG, Gunderson L, MortimerJ, et al. Chemotherapy followed by surgery compared with surgery alone for localized esophageal cancer. N Engl J Med 1998; 339: 1979-84.
32. Medical Research Council Oesophageal Cancer Group. Surgical resection with or without preoperative chemotherapy in oesophageal cancer: a randomised controlled trial. Lancet 2002; 359: 1727-33.
33. Walsh T, Noonan N, Hollywood D, Kelly A, Keeling N, Hennessy TPJ. A comparison of multimodal therapy and surgery for esophageal adenocarcinoma. N Engl J Med 1996; 335: 462 67.
34. Bosset JF, Gignoux M, Triboulet JP, Tiret E, Mantion G, Elias D et al. Chemoradiotherapy followed by surgery compared with surgery alone in squamous-cell cancer of the esophagus. N Engl J Med 1997; 337: 161-7.
35. Urba SG, Orringer MB, Turrisi A, Iannettoni M, Forastiere A, Strawderman M. Randomized trial of preoperative chemoradiation versus surgery alone in patients with locoregional esophageal carcinoma. J Clin Oncol 2001; 19: 305-3.
36. Burmeister BH, Smithers BM, Gebski V, Fitzgerald L, Siles RJ, Dewvitt P et al. Surgery alone versus chemoradiotherapy followed by surgery for resectable cancer of the oesophagus: a randomised controlled phase III trial. Lancet Oncol 2005; 6: 659-68.
37. Alexiou C, Khan OA, Black E, Field ML, Onyeaka P, Beggs L, et al. Survival after esophageal resection for carcinoma: the importance of the histologic cell type. Ann Thorac Surg 2006; 82: 1073-7.
38. Macdonald JS, Smalley SR, BenedettiJ, Hundahl SA, Estes NC, Stemmermann GN et al. Chemoradiotherapy after surgery compared with surgery alone for adenocarcinoma of the stomach or gastroesophageal junction. N Engl J Med 2001; 345: 725-30.
39. Kim S, Lim DH, Lee J, Ki Kang W, MacDonald JS, Park CH et al. An observational study suggesting clinical benefit for adjuvant postoperative chemoradiation in a population of over 500 cases after gastric resection with D2 nodal dissection for adenocarcinoma of the stomach. In J Radiat Oncol Biol Phys 2005; 63: 1279-85.
40. Cunningham D, Allum WH, Stenning SP, Thompson JN, Van de Velde CJ, Nicolson M, et al. Perioperative chemotherapy versus surgery alone for resectable gastroesophageal cancer. N Engl J Med 2006; 355: 11-20.
41. Ychou M, Pignon JP, Lasser P, Conroy T, Bouché O, Boige V et al. Phase III preliminary results of preoperative fluorouracil (F) and cisplatin (P) versus surgery alone in adenocarcinoma of stomach and lower esophagus (ASLE): FNLCC 94012-FFCD 9703 trial J Clin Oncol 2006; 24: 18S: 4026.
42. Cunningham Md, S. Rao, N. Starling, T. Iveson, M. Nicolson, F. Coxon, et al. Randomised multicentre phase III study comparing capecitabine with fluorouracil and oxaliplatin with cisplatin in patients with advanced oesophagogastric (OG) cancer: The REAL 2 trial. J Clin Oncol, 2006; 24, 18S: LBA4017.
43. Laasch HU, Marriott A, Wilbraham L, Tunnah S, England RE, Martin DF. Effectiveness of open versus antireflux stents for palliation of distal esophageal carcinoma and prevention of symptomatic gastroesophageal reflux. Radiology 2002; 225: 359-65.
44. Homs MY, Wahab PJ, Kuipers EJ, Steyerberg EW, Grool TA, HaringsmaJ, et al. Esophageal stents with antireflux valve for tumors of the distal esophagus and gastric cardia: a randomized trial. Gastrointest Endosc 2004; 60: 695-702.
45. Wenger U, Johnsson E, Arnelo U, Lundell L, Lagergren J. An antireflux stent versus conventional stents for palliation of distal esophageal or cardia cancer: a randomized clinical study. Surg Endosc 2006; 20: 1675 80.
46. Shim CS, Jung IS, Cheon YK, Ryu CB, Hong SJ, Kim JO, et al. Management of malignant stricture of the esophagogastric junction with a newly designed self-expanding metal stent with an antireflux mechanism. Endoscopy 2005; 37: 335-9.