[Atelier] Optimiser le traitement de l’hépatite B

Objectifs pédagogiques

  • Savoir identifier les patients à traiter et à ne pas traiter
  • Savoir utiliser les antiviraux
  • Connaître les modalités pratiques de surveillance
  • Connaître les situations particulières de mise en route d’un traitement (traitement préemptif, grossesse, profession)

Identification des patients à traiter ou à ne pas traiter

Chez les patients antigène (ag) HBs+, le bilan initial doit comporter?:

  • la recherche de l’agHBe et de l’anticorps (ac) anti-HBe?;
  • la mesure de la charge virale du VHB (ADN-VHB) avec une technique de PCR en temps réel avec des seuils de détectabilité à 10-15 UI/mL?;
  • un bilan hépatique comportant ALAT, ASAT, GGT, phosphatases alcalines, bilirubine totale, albumine, taux de prothrombine (ou INR), AFP et une NFS?;
  • une échographie abdominale?;
  • une recherche de co-infection par le VHC, le VIH et le VHD et la recherche de comorbidités?;
  • une biopsie hépatique en cas d’augmentation des transaminases.

L’indication du traitement reposera sur l’analyse répétée de la charge virale VHB, des transaminases et sur l’activité et la fibrose histologique. Les méthodes non invasives d’évaluation de la fibrose ne sont pas entièrement validées dans l’hépatite chronique B, cependant elles pourraient avoir une place notamment pour confirmer le portage inactif, l’état d’immunotolérance ou la cirrhose.

Les patients qui ne doivent pas être traités sont?:

les porteurs inactifs caractérisés par?: un agHBe négatif, des ALAT normales et une charge virale indétectable ou < 2 000 UI/mL sur plusieurs dosages, une échographie hépatique normale et éventuellement une évaluation non invasive confirmant l’absence de fibrose?;

les immunotolérants caractérisés par?: un agHBe+, des ALAT normales sur plusieurs dosages et une charge virale très élevées, le plus souvent > 107 UI/mL, une échographie hépatique normale et éventuellement une évaluation non invasive confirmant l’absence de fibrose?;

les patients avec une hépatite minime caractérisés par?: une élévation des ALAT < 2N et/ou une charge virale > 2 000 UI/mL et des lésions histologiques minimes avec un score d’activité < A2 et de fibrose < F2.

Dans tous les cas, les patients doivent être suivis régulièrement pendant toute leur vie. Ce suivi se fera 4 fois par an la première année et au moins 2 fois par an les années suivantes.

Les patients qui présentent une charge virale > 2 000 UI/mL et/ou une élévation des ALAT et des lésions histologiques modérées ou sévères avec un score d’activité ≥ A2 ou de fibrose ≥ F2 doivent être traités. En cas de cirrhose, un traitement à base d’analogue devra être proposé même si les ALAT sont normales ou la charge virale est faible (< 2 000 UI/mL) ou indétectable. En cas de cirrhose décompensée, le patient doit être adressé rapidement dans un service d’hépatologie adossé à un centre de transplantation hépatique. Le traitement doit être débuté rapidement et le bilan pré-TH devra être entrepris dès que possible.

Quels traitements et quelle surveillance??

Les traitements qui ont l’AMM en France sont?: le peginterféron a-2a (Pegasys®), la lamivudine (Zeffix®), l’adefovir (Hepsera®), l’entecavir (Baraclude®), le tenofovir (Viread®) et la telbivudine (Sebivo®). L’efficacité du peginterféron semble être meilleure chez les patients agHBe+ avec des ALAT > 3N et une charge virale inférieure à 2 × 106 UI/mL. La durée de traitement est de 48 semaines. L’entecavir et le tenofivir sont les 2 analogues les plus efficaces avec une barrière génétique de résistance très élevée. Ils doivent être préférés aux autres analogues.

L’objectif du traitement est le contrôle de la réplication virale qui sera accompagnée le plus souvent par une ­normalisation des ALAT et une amélioration histologique. Chez les patients agHBe+, l’objectif thérapeutique sera également une séroconversion HBe. La durée de traitement est de 48 semaines avec le peginterféron. Dans ce cas, les ALAT doivent être évaluées tous les mois en même temps que la NFS. La charge virale doit être mesurée tous les 3 mois pour vérifier la réponse primaire. Chez les patients agHBe+, la sérologie HBe devra être réalisée à la 24e et la 48e semaine de traitement. Le peginterféron doit être évité chez les cirrhotiques.

Avec les analogues, le traitement se fera le plus souvent au long cours. La charge virale et les ALAT devront être contrôlées toutes les 12 semaines jusqu’à négativation de l’ADN du VHB puis toutes les 12 à 24 semaines. Chez les patients agHBe+, les agHBe devront être recherchés tous les 6 à 12 mois.

En cas de séroconversion, l’arrêt du traitement par analogue pourra être envisagé 6 à 12 mois plus tard. Il ­faudra également évaluer la tolérance du traitement avec notamment évaluation régulière de la fonction rénale et du phosphore. Il est également recommandé de faire régulièrement une évaluation de la minéralisation osseuse.

Situations particulières

Traitement pré-emptif

Il est recommandé de mettre en route un traitement pré-emptif par analogue chez tout patient agHBs+ chez qui une chimiothérapie ou un traitement immunosuppresseur ou immunomodulateur doit être prescrit (corticoïdes, methotrexate, anti-TNF…). Ce traitement devra être démarré au mieux quelques semaines avant le traitement immunosuppresseur et se terminer 6 à 12 mois après l’arrêt de l’immuno­suppression. Un traitement pré-emptif devra être discuté au cas par cas chez les patients agHBs- mais ac antiHBc+ qui doivent recevoir du rituximab car des réactivations virales ont été décrites dans cette population avec ce traitement.

Grossesse

Le dépistage de l’agHBs est obligatoire au 3e trimestre de la grossesse. Si l’agHBs est positif, le nouveau-né doit bénéficier d’une séro-vaccination durant les premières heures de la vie. Malgré cela, le risque d’infection du nouveau-né est d’environ 5?%. Ce risque augmente en fonction de la charge virale chez la mère. Des études ont montré que la prescription d’analogue lors du 3e trimestre de grossesse diminuait significativement le risque de transmission materno-fœtale. Cette stratégie pourrait être intéressante chez les femmes avec une charge virale très élevée (> 106 UI/mL??). Le tenofovir semble être l’analogue de choix.

Personnel de santé

Pour diminuer le risque de transmission soignant-malade, il est recommandé de traiter les soignants agHBs+ avec une charge virale > 2 000 UI/mL avec de l’entecavir ou du tenofovir pendant toute la vie professionnelle. Idéalement, l’ADN du VHB devra être indétectable pour prévenir tout risque de transmission. Contrairement au Royaume Uni, aucune mesure d’exclusion professionnelle n’est préconisée en France.

Références

  1. EASL Clinical Practice Guidelines: management of chronic hepatitis B. J Hepatol 2009;50:227-42.

Les 4 points forts

  • Le traitement est indiqué chez les patients ayant une charge virale > 2 000 UI/mL et/ou une élévation des ALAT et des lésions histologiques modérées ou sévères avec un score d’activité  A2 ou de fibrose  F2.
  • Chez le patient cirrhotique, un traitement doit être mis en route indépendamment du niveau des transaminases ou de la charge virale.
  • Le dépistage du VHB doit être réalisé chez tout patient devant recevoir une chimiothérapie ou un traitement immuno-modulateur. Si l’agHBs est positif, un traitement pré-emptif par analogue doit être mis en route quelle que soit la charge virale.
  • Un traitement par tenofovir lors du 3e trimestre de grossesse pourrait diminuer le risque de transmission virale materno-fœtale, surtout si la mère a une charge virale très élevée.