Scores endoscopiques des MICI

Objectifs pédagogiques

  • Pourquoi faut-il systématiquement utiliser un score lors de la réalisation d’une endoscopie au cours des MICI ?
  • Quels sont les principaux scores endoscopiques utiles en pratique clinique ?
  • Quels sont les « trucs » et « astuces » des principaux scores ?

Pourquoi faut-il systématiquement utiliser un score lors de la réalisation d’une endoscopie au cours des MICI ?

Traiter les patients atteints de maladie inflammatoire chronique intestinale (MICI) en se basant sur les symptômes n’a pas permis de modifier l’histoire naturelle de ces maladies chroniques et invalidantes. Plusieurs études ont pu démontrer qu’une cicatrisation muqueuse était notamment associée à de meilleurs taux de réponse/rémission clinique, à un moindre recours à la chirurgie et à un plus faible nombre d’hospitalisations dans la maladie de Crohn (MC) et dans la rectocolite hémorragique (RCH), ainsi qu’à une diminution du risque de cancer colo-rectal dans la RCH. L’objectif principal des essais cliniques évaluant l’efficacité des anti-TNF dans la MC est ainsi passé de l’obtention d’une simple réponse clinique en 1997 à une cicatrisation muqueuse endoscopique. Le consensus ECCO recommande l’obtention systématique d’une rémission clinique et endoscopique dans la RCH. Dans ce contexte, l’utilisation systématique d’un score endoscopique relève de la bonne pratique. L’utilisation systématique d’un score endoscopique doit permettre une meilleure évaluation de l’activité et de la sévérité de la MICI. Comme l’objectif thérapeutique majeur dans les MICI en 2014 est désormais de maintenir une rémission profonde prolongée, de nombreuses dimensions dépendent désormais du score endoscopique : la nécessité ou non d’optimiser le traitement médical, la définition de l’échec du traitement médical (et donc l’indication à une intervention chirurgicale), le pronostic de la MICI, la possibilité ou non de pouvoir arrêter un traitement immunosuppresseur, et également un meilleur suivi de la MICI.

Quels sont les principaux scores endoscopiques utiles en pratique clinique ? Quels sont les « trucs » et « astuces » des principaux scores ?

Vingt-cinq ans après la publication des premiers scores endoscopiques, (le CDEIS fut publié en 1989 par le GETAID et le score de la MAYO CLINIC en 1987), leur utilisation se heurte encore à la difficulté d’intégration d’une évaluation complexe multifocale (maladie de Crohn) et à la reproductibilité de certains items (rectocolite hémorragique).

Dans la maladie de Crohn, la principale difficulté est celle d’évaluer la cicatrisation muqueuse d’une maladie pour laquelle les lésions sont discontinues, hétérogènes et touchant plusieurs segments coliques et/ou grêliques (iléo-coloscopie totale nécessaire à l’évaluation). Dans la MC, le seuil CDEIS de 3 n’a toujours pas été validé ou plutôt pas publié in extenso puisque ces données avaient été présentées sous forme d’abstract à l’UEGW 2005. En raison de la complexité du score CDEIS, une équipe belge a développé et publié en 2004 le SES-CD. Ce dernier score n’est, en fait, pas plus simple à utiliser en pratique clinique et le seuil définissant une rémission endoscopique n’est pas déterminé. En pratique et même dans certains essais cliniques, une cicatrisation muqueuse dans la MC est donc simplement définie par l’absence d’ulcères, sachant que la définition d’un ulcère ne fait pas non plus l’objet d’un consensus… Quoi qu’il en soit, c’est le score CDEIS qui est recommandé en pratique clinique en 2014. Sa difficulté de mise en œuvre, d’évaluation quantitative et qualitative des différents segments atteints invite à proposer le recours à un simple tableur Excel permettant de reprendre les différents items du score et un calcul rapide de ce score doit être disponible dans les salles d’endoscopie. Une formation des médecins pratiquant des endoscopies chez des patients avec une MICI doit également être encouragée. Il faut notamment leur rappeler que seules les lésions ne faisant aucun doute (ulcérations creusantes dans le CDEIS par exemple) doivent prises en compte. Il est par ailleurs indispensable de bien connaître la définition des lésions élémentaires qui sont utilisées dans ces scores.

Le score de Rutgeerts, développé dans les années 1990 et qui évalue la récidive endoscopique post-opératoire, a, quant à lui, connu un succès sans précédent pour un score endoscopique. Ceci s’explique par le fait que ce score a une valeur pronostique (prédiction de la récidive clinique) et qu’il est très simple d’utilisation. Le fait d’observer au maximum 5 ulcérations aphtoïdes iléales doit être considéré comme une rémission endoscopique.

Dans la RCH, on dispose de données nombreuses évaluant l’activité endoscopique de la maladie et le score le plus répandu est celui de la MAYO CLINIC. Ce score est de plus en plus utilisé en pratique quotidienne car il ne nécessite qu’une recto-sigmoïdoscopie et le calcul de ce score est simple. La rémission endoscopique est définie de façon consensuelle par un sous-score endoscopique de la MAYO CLINIC égal à 0 ou 1. D’autres scores comme le score de Baron modifié ont été développés. Les principales limites des scores endoscopiques dans la RCH sont leur faible reproductibilité de certains items subjectifs comme la friabilité muqueuse et la difficulté à distinguer les lésions d’intensité légère des lésions modérées (sous-score endoscopique MAYO à 1 versus un score MAYO à 2 par exemple). Un nouveau score, l’UCEIS, a été développé récemment et validé ; ce score est plus reproductible puisque l’item « friabilité » n’a pas été inclus et les 3 paramètres retenus étaient les suivants : érosions/ulcères, saignement, vascularisation. Ce score est appelé à remplacer très rapidement les autres scores endoscopiques dans la RCH. Il reste à identifier le seuil de l’UCEIS définissant la rémission endoscopique.

Références

  1. Peyrin-Biroulet L, Ferrante M, Magro F, Campbell S, Franchimont D, Fidder H, et al. Results from the 2nd Scientific Workshop of the ECCO (I): Impact of mucosal healing on the course of inflammatory bowel disease. Journal of Crohns & Colitis 2011;5:477-83.
  2. Pineton de Chambrun G, Peyrin-Biroulet L, Lemann M, Colombel JF. Clinical implications of mucosal healing for the management of IBD. Nat Rev Gastroenterol Hepatol 2010;7:15-29.
  3. Schroeder KW, Tremaine WJ, Ilstrup DM. Coated oral 5-aminosalicylic acid therapy for mildly to moderately active ulcerative colitis. A randomized study. N Engl J Med 1987; 317:1625-9.
  4. Mary JY, Modigliani R. Development and validation of an endoscopic index of the severity for Crohn’s disease: a prospective multicentre study. Groupe d’Études Thérapeutiques des Affections Inflammatoires du Tube Digestif (GETAID). Gut 1989;30: 983-9.
  5. Travis SP, Schnell D, Krzeski P, Abreu MT, Altman DG, Colombel JF, Feagan BG, Hanauer SB, Lichtenstein GR, Marteau PR, Reinisch W, Sands BE, Yacyshyn BR, Schnell P, Bernhardt CA, Mary JY, Sandborn WJ. Reliability and initial validation of the ulcerative colitis endoscopic index of severity. Gastroenterology 2013;145:987-95.
  6. Rutgeerts P, Geboes K, Vantrappen G, Beyls J, Kerremans R, Hiele M. Predictability of the postoperative course of Crohn’s disease. Gastroenterology 1990;99:956-63.

Les cinqs points forts

  1. L’utilisation systématique d’un score endoscopique doit permettre une meilleure évaluation de l’activité et de la sévérité de la MICI, une cicatrisation muqueuse étant devenue un objectif thérapeutique majeur dans ces maladies.
  2. Le score CDEIS est le seul score endoscopique validé dans la maladie de Crohn. Il nécessite un court apprentissage et son utilisation peut être facilitée par la mise à disposition de l’endoscopiste d’un tableur reprenant ce score.
  3. Le score de Rutgeerts doit être mentionné dans tout compte-rendu endoscopique effectué dans le suivi post-opératoire d’une maladie de Crohn.
  4. Le score UCEIS doit rapidement remplacer tous les autres scores endoscopiques dans la RCH car il est plus reproductible et a récemment été validé.
  5. Le seuil définissant une rémission endoscopique doit encore être validé dans la maladie de Crohn et dans la RCH.