Hyperferritinémie et NASH

Objectifs pédagogiques

  • Comment confirmer le diagnostic et quelle est la place de la biopsie hépatique ?
  • Faut-il évaluer la surcharge hépatique en fer et comment ?
  • Quel est l’impact de la surcharge en fer sur le pronostic de la NASH ?
  • Quelle est la prise en charge ?

La stéatose non alcoolique survient le plus souvent chez des patients ayant des anomalies métaboliques et une insulinorésistance, celle-ci étant un élément clé de la physiopathogénie des lésions de stéato-hépatite non alcoolique (NASH). La prévalence exacte de la stéatose métabolique n’est pas connue mais probablement élevée, parallèlement à l’épidémie d’obésité dans le monde. Dans la majorité des cas, la stéatose est pure et d’évolution le plus souvent bénigne alors que la NASH, présente dans 20 % des cas, est susceptible d’évoluer vers la cirrhose et le carcinome hépatocellulaire. Le diagnostic de NASH repose sur l’examen histopathologique du foie et la classification selon Kleiner [5]. Ainsi, l’enjeu consiste à sélectionner les patients éligibles à la biopsie hépatique. En l’absence de marqueurs de NASH fiables, l’indication de la biopsie repose sur les marqueurs non invasifs de fibrose. En effet, il a été montré que la sévérité de la fibrose était le principal critère prédictif de morbi/mortalité chez les patients ayant une NASH.
Au cours de la stéatose métabolique, une hyperferritinémie inférieure à 1 000 ng/ml associée à un coefficient de saturation de la transferrine normal est constatée dans 20 à 30 % des cas. Elle peut être secondaire à l’inflammation et à la cytolyse, ou entrer dans le cadre d’une hépatosidérose dysmétabolique et être associée à une surcharge hépatique en fer. Cette surcharge est le plus souvent modérée, la concentration hépatique en fer étant toujours inférieure à 100 mmol/g. La mesure de la concentration hépatique en fer peut être réalisée sur prélèvement tissulaire ou indirectement en imagerie par résonnance magnétique (normale < 36 mmol/g). Au point de vue histopathologique, la surcharge en fer est mixte (parenchymateuse et non parenchymateuse) et le plus souvent à ¬prédominance macrophagique. L’hétérozygotie pour la mutation HFE282 semble plus fréquente chez les patients ayant une NASH et pourrait favoriser la surcharge en fer. Le niveau sérique d’hepcidine, protéine antibactérienne qui inhibe l’absorption du fer, est généralement élevé.
L’impact de l’hépatosidérose dysmétabolique sur la sévérité de l’atteinte hépatique au cours de la stéatose métabolique reste débattu. Des études ont montré que le niveau de ferritine et/ou l’existence d’une mutation HFE étaient associés à une atteinte hépatique plus sévère en termes de stéatohépatite et de fibrose. L’association entre surcharge en fer intrahépatique et sévérité de la fibrose a fait l’objet de nombreuses études avec des résultats contradictoires. La surcharge était associée à une fibrose plus sévère lorsqu’elle était parenchymateuse dans une étude, non parenchymateuse dans une autre étude. Une étude américaine n’a pas confirmé cette association et, ainsi, les sociétés savantes américaines ne recommandent pas de prise en charge spécifique de la surcharge en fer chez les patients ayant une stéatose métabolique. En revanche, il est clairement établi que que l’hépatosidérose dysmétabolique favorise l’insulino-résistance et le diabète de type 2 et, de façon moins évidente, les maladies cardiovasculaires. L’hépatosidérose dysmétabolique pourrait également favoriser le cancer, en particulier le carcinome hépatocellulaire chez les patients ayant une NASH.
Les règles hygiéno-diététiques n’ont pas d’impact sur la surcharge en fer au cours de la stéatose métabolique. Seules les saignées sont efficaces en termes de réduction de la charge en fer et sont bien tolérées. Si la déplétion en fer améliore l’insulinosensitivité, l’impact sur les lésions hépatiques reste débattu. Dans un essai randomisé publié récemment sur un petit nombre de patients ayant une stéatose métabolique avec hyperferritinémie, la déplétion martiale par saignées (médiane 16) était associée à un taux plus élevé d’amélioration de l’histologie hépatique par rapport aux seules règles hygiéno-diététiques. D’autres études avec des effectifs plus importants sont nécessaires avant de recommander les saignées au cours de la NASH.

Références

  1. Lemoine M, Serfaty L. Foie métabolique. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Hépatologie 2011 7-040-B-20.
  2. Dongiovanni P, Fracanzani AL, Fargion S, Valenti L. Iron in fatty liver and in the metabolic syndrome: a promising therapeutic target. J Hepatol 2011;55:920-32.
  3. Chalasani N, Younossi Z, Lavine JE, Diehl AM, Brunt EM, Cusi K, Charlton M, Sanyal AJ. The diagnosis and management of non-alcoholic fatty liver disease: practice Guideline by the American Association for the Study of Liver Diseases, American College of Gastroenterology, and the American Gastroenterological Association. Hepatology 2012;55:2005-23.
  4. Valenti L, Fracanzani AL, Dongiovanni P, Rovida S, Rametta R, Fatta E, Pulixi EA, Maggioni M, Fargion S. A randomized trial of iron depletion in patients with nonalcoholic fatty liver disease and hyperferritinemia. World J Gastroenterol 2014;20:3002-10.
  5. Kleiner DE, Brunt EM, Van Natta M, Behling C, Contos MJ, Cummings OW, et al. Design and validation of a histological scoring system for nonalcoholic fatty liver disease. Hepatology 2005;41:1313-21.

Les Six points forts

  1. Le diagnostic de stéato-hépatite non alcoolique repose idéalement sur la biopsie hépatique dont l’indication peut être orientée par les tests non invasifs de fibrose.
  2. La gravité de la stéato-hépatite est liée à l’existence d’une fibrose hépatique.
  3. L’hyperferritinémie associée à la stéatose métabolique est le plus souvent modérée avec une concentration hépatique en fer inférieure à 100 µmol/g et peut être évaluée par l’IRM hépatique.
  4. L’importance de l’hyperferritinémie et/ou l’existence d’une mutation HFE hétérozygote serait associée à une atteinte hépatique plus sévère.
  5. L’hépato-sidérose hépatique favorise l’insulino-résistance et le diabète de type 2 et pourrait favoriser les maladies cardio-vasculaires et le carcinome hépatocellulaire par le biais de la NASH.
  6. La déplétion en fer par saignées pourrait améliorer l’insulino-résistance mais son impact sur la NASH est débattu.