Obstacle biliaire tumoral distal (hors ampullome) : Quand et comment drainer ?

POST’U 2021

Pancréas

Objectifs pédagogiques

  • Connaître le bilan morphologique avant le drainage biliaire
  • Connaître les critères de non résécabilité
  • Connaître les alternatives de drainage biliaire endoscopique
  • Connaître leurs indications et complications respectives

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Nous vous invitons à tester vos connaissances sur l’ensemble des QCU tirés des exposés des différents POST'U. Les textes, diaporamas ainsi que les réponses aux QCM seront mis en ligne à l’issue des prochaines journées JFHOD.

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Les 5 points forts

  1. L'adénocarcinome pancréatique et le cholangiocarcinome sont les principales causes d'obstruction biliaire distale maligne (OBDM).
  2. L'association de l'imagerie (scanner/IRM), réalisée avant tout drainage biliaire, et des examens endoscopiques (Échoendoscopie +/- CPRE) aide à identifier la cause sous-jacente.
  3. La majorité des patients (70 %) atteints d'une obstruction biliaire distale maligne ne peuvent pas être opérés au moment du diagnostic. L’endoscopie a un rôle crucial pour traiter l'obstruction biliaire.
  4. La première modalité de drainage biliaire en cas d’OBDM est la CPRE avec pose de prothèse métallique.
  5. Le drainage biliaire par voie échoendoscopique est en pleine expansion et sa place est encore à définir par rapport à la CPRE en cas d’OBDM.

LIEN D’INTÉRÊTS

Aucun

MOTS-CLÉS

sténose biliaire, cholangiocarcinome, cancer du pancréas

Introduction

L’obstruction biliaire distale maligne (OBDM) reste un défi diagnostique et thérapeutique qui nécessite une approche multidisciplinaire. L’adénocarcinome pancréatique et le cholangiocarcinome sont les principales causes d’OBDM. Le diagnostic précoce est difficile à établir car l’obstruction biliaire peut être la première manifestation de la maladie sous-jacente, parfois à un stade avancé. La majorité des patients (70 %) atteints d’une OBDM ne peut pas être opérée au moment du diagnostic (1). L’association des symptômes cliniques, de la biologie, de l’imagerie et des examens endoscopiques aide à identifier la cause sous-jacente. Les nouvelles techniques endoscopiques telles que la cholangioscopie, l’échographie endobiliaire ou la microscopie confocale ont été développées avec des résultats prometteurs mais variables. Comme le nombre de patients atteints d’OBDM ayant une chirurgie curative est limité, l’endoscopie a un rôle crucial dans le traitement palliatif via l’obtention d’un drainage biliaire de qualité. La CPRE avec pose de prothèse métallique a une place centrale dans le drainage biliaire. L’échoendoscopie thérapeutique a également évolué au cours des dernières décennies avec un rôle de plus en plus important.

Cette revue vise à explorer les causes, les modalités diagnostiques des OBDM, ainsi que les options thérapeutiques du drainage biliaire, selon le type et le stade de la lésion tumorale.

Étiologie, épidémiologie et histoire naturelle

L’OBDM est le résultat d’une compression extrinsèque du canal biliaire ou d’une sténose tumorale intrinsèque du canal biliaire, qu’elle soit primitive ou secondaire à des métastases (2). Les deux principales étiologies de l’OBDM sont l’adénocarcinome pancréatique (principalement situé dans la tête ou le crochet) et le cholangiocarcinome (CC). Les autres causes sont représentées par le carcinome ampullaire /duodénal et les maladies métastatiques qui s’infiltrent dans la tête du pancréas et dans le canal cholédoque (Tableau 1) (3). La prise en charge spécifique de l’ampullome ne sera pas abordée dans ce texte.

 

Diagnostic différentiel Symptômes Imagerie Preuve histologique Diagnostic différentiel avec une affection bénigne Critères de résécabilité
Cancer du pancréas Ictère (prurit)

Amaigrissement / anorexie

Douleurs épigastriques à irradiation postérieure

Dyspepsie / satiété précoce

Nausées, vomissements

Apparition ou déséquilibre d’un diabète

Pancréatite aiguë

Scanner > IRM/CP-IRM > Échographie EEH EEH + ponction Pancréatite auto-immune Pancréatite chronique Pancréatite du sillon < 180° d’envahissement veineux sur la veine mésentérique supérieur ou la veine porte

Absence de contact avec l’artère mésentérique supérieure, le tronc cœliaque ou l’artère hépatique commune

Cholangiocarcinome Ictère nu

Prurit

Douleur de l’hypochondre droit

Amaigrissement / anorexie

IRM/CP-IRM
> Scanner >
Echographie
EEH
EEH + ponction
CPRE + brossage
+ biopsies
endobiliaire à la
pince
Cholangioscopie
Cholangite
sclérosante primitive
Cholangite à IgG4
Autres cholangites
(éosinophiles, VIH,
ischémique, …)
Métastases (estomac/
colo/sein/poumon
/mélanome/
rein/carcinome
hépatocellulaire
Symptômes liés aux
maladies primitives
Scanner >
IRM/CP-IRM >
Échographie
EEH
EEH + ponction Tuberculose

Tableau 1 : Diagnostic différentiel – Présentation clinique – Modalités d’imagerie et d’obtention de l’histologie chez les patients atteints d’OBDM

Diagnostic

Caractéristiques cliniques et prise en charge initiale

Les symptômes cliniques les plus fréquents en cas d’OBDM sont l’ictère, l’amaigrissement et l’anorexie avec un impact significatif sur la qualité de vie, la morbidité et la mortalité (4) (Tableau 1). Un examen physique complet est nécessaire à la recherche de l’ictère, la présence d’une organomégalie ou de lymphadénopathies.

Les examens biologiques doivent inclure la bilirubine totale, la bilirubine conjuguée, les phosphatase alcaline (PAL), la gamma glutamyl transférase (GGT), l’alanine aminotransférase (ALAT), l’aspartate aminotransférase (ASAT). Le taux de bilirubine peut être un facteur prédictif de maladie maligne : plus le taux de bilirubine est élevé au moment de la présentation, plus la probabilité de maladie maligne est grande (5). Une vaste étude rétrospective portant sur 830 patients a montré que les patients présentant un rétrécissement biliaire et des tests hépatiques normaux sont peu susceptibles de présenter une lésion maligne pancréato-biliaire primitive (6).

L’ictère sévère pouvant être accompagné d’une insuffisance rénale ou d’une dénutrition, la créatinine et l’albumine sont nécessaires.

Les marqueurs tumoraux les plus couramment utilisés en cas d’OBDM sont le CA 19-9 et l’ACE. Un CA 19-9 > 37U/mL a montré une sensibilité d’environ 74 % chez les patients atteints d’OBDM, mais une très faible spécificité (7,8). En effet, le CA 19-9 peut également être augmenté en cas de pathologies non malignes, notamment en cas de cholestase, d’angiocholite, de cirrhose, de pancréatite aiguë et d’autres cancers tels que le cancer de l’estomac ou du côlon (9). L’ACE a montré 33-68 % de sensibilité et 75-95 % de spécificité pour le diagnostic du CC (7). Bien qu’ils puissent être utiles comme marqueurs pronostiques, leur utilité diagnostique est limitée (10).

Lorsqu’une lésion maligne du bas cholédoque est suspectée sur la base des antécédents, de l’examen physique et des premiers résultats de biologie, les examens d’imagerie telles que l’échographie abdominale, la tomodensitométrie ou l’imagerie par résonance magnétique (IRM) et la cholangiopancréato-IRM (CP-IRM) constituent l’étape suivante indispensable pour établir le diagnostic. Il est impératif d’avoir un bilan d’imagerie en coupe (TDM +/- IRM) avant toute décision de drainage.

Diagnostic différentiel, imagerie et examens endoscopiques

Cancer du pancréas

Dans le cas d’une OBDM secondaire à un cancer du pancréas, celui-ci est généralement localisé dans la tête du pancréas ou dans l’uncus. Environ 70 % des patients atteints de cancer du pancréas présentent une OBDM (11). C’est la cause la plus fréquente d’obstruction du bas cholédoque. Pour établir le diagnostic et le stade de la maladie, l’imagerie radiologique et l’endoscopie sont indispensables pour évaluer la résécabilité et obtenir un diagnostic anatomopathologique.

La précision diagnostique de l’échographie abdominale est d’environ 82 à 86 % pour le diagnostic des tumeurs du pancréas situées dans la tête (12). Lorsque la tumeur mesure moins de 3 cm de diamètre, la précision diagnostique est plus faible. Le scanner améliore la détection des tumeurs et l’évaluation de l’extension locale et régionale et de l’envahissement vasculaire pour établir la résécabilité de la lésion. La sensibilité du scanner varie de 89 % à 95 % et est actuellement la préférence des cliniciens pour évaluer la résécabilité préopératoire d’un patient atteint d’un cancer du pancréas (13, 14). Le scanner est facilement accessible, rapide et peu coûteux. L’IRM/CP-IRM avec gadolinium ou mangafodipir est aussi sensible que la tomodensitométrie pour la détection du cancer du pancréas, le diagnostic et l’évaluation de l’atteinte vasculaire (15).

L’échoendoscopie est un examen clef de la prise en charge des cancers du pancréas. Dans une méta-analyse (11 études – 678 patients), l’échoendoscopie a montré une plus grande sensibilité dans la détection des tumeurs que le scanner, ce qui a également été confirmé pour les tumeurs de moins de 3 cm de diamètre (16). En ce qui concerne la classification TNM des cancers du pancréas (Tableau 2), l’échoendoscopie est supérieure au scanner pour identifier le stade T. Pour la précision du stade N, aucune supériorité n’a été observée, pour le stade M, le scanner est évidemment supérieur pour l’évaluation des métastases à distance. L’échoendoscopie atteint une sensibilité de 92 % et une spécificité de 96 % pour le diagnostic du cancer du pancréas. L’échoendoscopie avec ponction permet surtout d’obtenir une preuve histologique avec une sensibilité de 90 % (17).

Des échantillons cytologiques peuvent également être obtenus au moment de la CPRE en cas d’indication d’un drainage biliaire, celle-ci n’étant plus pratiquée à visée diagnostique. La sensibilité du brossage biliaire varie de 30 à 60 % avec une valeur prédictive positive élevée (PPV) mais une valeur prédictive négative faible (NPV) (18). La ponction sous échoendoscopie est cependant bien supérieure au brossage biliaire obtenu lors de la CPRE dans les cancers du pancréas (19).

 

Catégorie T Taille de la tumeur, mesurée dans sa plus grande dimension Modifications par rapport à la 7e classification*
T1 Tumeur ≤ 2 cm

T1a Tumeur ≤ 0,5 cm

T1b Tumeur > 0,5 cm et < 1 cm

T1c Tumeur > 1 cm et ≤ 2 cm

T2 Tumeur > 2 et ≤ 4 cm Basée sur la taille et non pas sur l’invasion extrapancréatique (avantage : plus objective, meilleure corrélation avec la survie)
T3 Tumeur > 4 cm
T4 Tumeur envahissant l’axe cœliaque l’artère mésentérique
supérieure et/ou à l’artère hépatique commune
Basée sur l’envahissement des artères et non pas la
notion de résécabilité
Catégorie N Adénopathies régionales
(subdivision dans la nouvelle classification)
N0 Pas de métastase ganglionnaire régionale
N1 1 à 3 ganglions régionaux métastatiques Distinction N1/N2.
N2 ≥ 4 ganglions régionaux métastatiques
Catégorie M Métastases à distance (pas de changement)
M0 Pas de métastase à distance
M1 Présence de métastase(s) à distance

Tableau 2 : Classification TNM (8e édition 2017) des adénocarcinomes du pancréas

Cholangiocarcinome (CC)

Introduction – Épidémiologie

Le CC est rare (< 1 % de l’ensemble des cancers), avec un taux d’incidence, en France, de 1,4 et 0,7 cas /100 000 habitants par an chez l’homme et la femme respectivement, et représente environ 10 à 15 % des cancers primitifs du foie. L’incidence varie considérablement dans le monde, probablement en raison des différences dans la prévalence des facteurs de risque; les taux d’incidence les plus élevés sont observés en Asie du Sud-Est (20). L’âge moyen au diagnostic est de 72 ans chez l’homme et 76 ans chez la femme.

En fonction de leur origine anatomique, les CC peuvent être classés en trois entités distinctes, d’étiologie et pathogénie différentes : les CC intrahépatiques, les tumeurs hilaires ou péri-hilaires (tumeur de Klatskin) et les CC distaux développés dans les voies biliaires extra-hépatiques. Les CC distaux qui sont l’objet de cette mise au point sur les OBDM représentent environ 20 à 40 % de tous les CC. Le CC distal apparaît dans la voie biliaire principale, en position distale par rapport à l’insertion du canal cystique et en position proximale par rapport à l’ampoule de Vater. La grande majorité des CC distaux surviennent de novo sans facteurs de risque identifiables ; cependant, quelques facteurs de risque sont à connaître (Tableau 3).

 

Douves Clonorchis sinensis et Opistorchis viverrini  Les parasites infectent le foie après la consommation de poisson d’eau douce et provoquent une inflammation chronique des petits canaux intrahépatiques et de la vésicule biliaire.
Cholangite sclérosante primaire (CSP) Elle provoque une inflammation diffuse et une fibrose des voies biliaires intrahépatiques et extrahépatiques. Les patients atteints de CSP ont une incidence de cholangiocarcinome d’environ 5 à 10 %.
Hépatites B et C et cirrhose ont été Plus récemment reconnues comme des facteurs de risque de cholangiocarcinome, mais surtout de cholangiocarcinome intrahépatique
Drainage biliaire-entérique, y compris la cholédoduodénostomie, la sphinctéroplastie transduodénale et la reconstruction biliaire avec hépaticocojéjunostomie, Généralement pratiquée pour des maladies bénignes, notamment la cholédocholithiase et la sténose biliaire bénigne. Associé à des taux de cholangiocarcinome compris entre 1,9 % pour les patients après une hépaticojéjunostomie et 5,8 % et 7,9 % pour les patients ayant subi une sphincteroplastie transduodénale et une cholédoduodénostomie, respectivement. On pense que la physiopathologie de ce risque accru est le reflux du contenu entérique dans le canal biliaire distal, provoquant des taux croissants de cholangite chronique récurrente, conduisant à une hyperplasie et à une atypie de l’épithélium biliaire et, finalement, à une transformation. L’apparition du cholangiocarcinome se produit généralement entre 1 et 2 décennies après la procédure donnée.
Kyste cholédoque, de type I
(extrahépatique solitaire) et de type
IV (intrahépatique et la dilatation
extra-hépatique impliquant la
confluence canalaire),
Incidence de cholangiocarcinome pouvant atteindre 30 %, qui se produit généralement
chez les jeunes patients. La pathophysiologie de ce risque accru proviendrait d’une
jonction anormale des canaux pancréatiques et biliaires, permettant le reflux des enzymes
pancréatiques dans l’arbre biliaire, ce qui entraîne une inflammation chronique et
dégénérescence kystique.

Tableau 3 : Facteurs de risques de cholangiocarcinome distal

Un CC distal est suspecté sur les éléments cliniques (douleurs abdominales de l’hypochondre droit associé à des signes d’obstruction biliaire progressive). L’angiocholite est une présentation inhabituelle. Bien que l’échographie abdominale et le scanner puissent suggérer un CC, l’IRM est la modalité préférée pour déterminer l’étendue de la maladie. Les séquences d’imagerie pondérées en T2, qui affichent le liquide en forte intensité de signal, peuvent définir le niveau d’une sténose biliaire et identifier des caractéristiques évoquant une malignité telles qu’une sténose de plus de 1 cm de longueur, des contours irréguliers. L’IRM a une sensibilité de 77 % à 86 % avec une spécificité de 63 % à 98 % (21, 22). La classification TNM est décrite Tableau 4.

 

T Critères
TX  Non évaluable
T0 Pas de tumeur primitive
Tis Carcinome in situ / dysplasie de haut grade
T1 Tumeur envahissant la paroi de la voie biliaire sur moins de 5 mm de profondeur
T2 Tumeur envahissant la paroi de la voie biliaire sur plus de 5 mm et moins de 12 mm de profondeur
T3 Tumeur envahissant la paroi de la voie biliaire sur plus de 12 mm de profondeur
T4 Atteinte du tronc cœliaque, de l’artère mésentérique supérieure et/ou de l’artère hépatique commune
N
NX Non évaluable
NO Pas de métastase ganglionnaire régionale
N1 1 à 3 métastases ganglionnaires régionales
N2 ≥ 4 métastases ganglionnaires régionales
M
M0 Pas de métastase à distance
M1 Métastase à distance

Tableau 4 : Classification TNM-UICC-AJCC (8e édition 2017) des cholangiocarcinomes extra-hépatiques distaux (au-delà de l’insertion du canal cystique)

La CPRE joue un rôle important dans le diagnostic du CC, car les biopsies endobiliaires à la pince et le brossage biliaire peuvent établir le diagnostic. Le rendement de la cytologie par brossage varie entre 44 et 80 % pour le CC. La combinaison de la cytologie par brossage (sensibilité 43-45 %) et les biopsies endobiliaires (30-48 %) permet d’obtenir un rendement diagnostique cumulé de 59,4 à 63 % (18, 23). L’aspiration endocanalaire de la bile après biopsies et brossage pour analyse cytologique de la bile peut aider le pathologiste à compléter le diagnostic anatomopathologique.

Le rôle de l’échoendoscopie est également important avec un taux de détection de la tumeur plus élevé que le scanner et l’IRM. Le rendement diagnostique est élevé même chez les patients sans masse identifiable sur l’imagerie en coupes (19). L’échoendoscopie aide à déterminer l’étendue de la maladie et lorsque c’est possible à ponctionner des ganglions lymphatiques régionaux. La sensibilité de la ponction sous échoendoscopie est significativement plus élevée dans le CC distal que dans le CC proximal (81 % contre 59 %, respectivement) (24). Dans l’étude de Weilert et al. qui compare la ponction sous échoendoscopie à la CPRE pour le diagnostic des sténoses biliaires malignes, la sensibilité des deux techniques était similaire (79 %) chez les patients atteints de CC distal (19).

Métastases

De nombreux cancers digestifs et non digestifs peuvent métastaser de manière extrinsèque sous la forme d’une adénopathie ou de manière intrinsèque dans le canal biliaire. Ce sont, par ordre de fréquence, le cancer de l’estomac, du côlon, du sein, du poumon, du rein, le mélanome et le carcinome hépatocellulaire.

Les adénopathies malignes sont une cause rarissime d’OBDM (25).

Diagnostic différentiel des obstructions malignes par rapport aux obstructions bénignes

Il peut être difficile de différencier l’adénocarcinome pancréatique de la pancréatite auto-immune (PAI), car la PAI peut imiter le cancer du pancréas lorsqu’elle se présente sous la forme d’une masse inflammatoire focale (26). L’IRM ainsi que des biopsies de la papille et l’échoendoscopie avec ponction de la masse pancréatique révélant un infiltrat lymphoplasmocytaire riche en IgG4 peuvent conduire au bon diagnostic. La PAI peut également impliquer d’autres organes, comme les voies biliaires, les reins ou le rétropéritoine. Une corticothérapie d’épreuve peut également permettre de différencier la PAI de la tumeur maligne pancréatique.

Le diagnostic différentiel peut également être un vrai challenge chez les patients atteints de pancréatite chronique due à une inflammation récurrente de la tête du pancréas entraînant une fibrose parenchymateuse. Parfois, les techniques d’imagerie telles que la tomodensitométrie, l’IRM ou l’EUS ne permettent pas de différencier facilement le cancer du pancréas de la pancréatite chronique. L’échoendoscopie avec ponction sera cruciale pour la gestion thérapeutique +/-associé à l’échoendoscopie de contraste (27), bien que cet examen puisse aussi être pris en défaut (calcifications), et les biopsies avoir un moins bon rendement dans ce contexte.

De même, le diagnostic différentiel entre les cholangiopathies inflammatoires bénignes (telles que la CSP, la cholangiopathie liée au VIH, la cholangite éosinophiles et celle liée aux IgG4) et le cholangiocarcinome du bas cholédoque peut être difficile (Tableau 1) (28).

Diagnostic endoscopique avancé

En cas de suspicion d’OBDM basée sur la clinique, l’imagerie ou l’endoscopie (CPRE, échoendoscopie) sans preuve histologique via les techniques standards d’échoendoscopie ponction ou de CPRE (brossage, biopsies endobiliaires), des techniques innovantes telles que la cholangioscopie, l’échographie endo-canalaire par mini-sonde ou l’endomicroscopie confocale ont été développées. Ces procédures endoscopiques pouvant être réalisées pendant la CPRE ne sont pas disponibles en routine et sont plus ou moins accessibles.

La cholangioscopie permet une visualisation directe de l’arbre biliaire. Historiquement, elle était réalisée avec un « baby-endoscope » réutilisable, passé dans un duodénoscope thérapeutique (« mother-endoscope »). Plus récemment, un cholangiopancréatoscope à usage unique a été développé, d’abord à partir de fibres optiques puis en version numérique (Spyglass DSII™, Boston Scientific, Marlborough, Massachusetts, USA). Il est également possible de réaliser une cholangioscopie directe avec un endoscope de petit calibre (naso-gastroscope) en l’avançant directement dans le système canalaire biliaire (29) (Tableau 5 Figure 1). La cholangioscopie, quelle que soit la technique utilisée, permet la visualisation directe de l’arbre biliaire et s’avère utile pour distinguer les affections bénignes et malignes en fonction de l’évaluation du réseau vasculaire (vaisseaux irréguliers et tortueux), et de la surface muqueuse endobiliaire (30). Les biopsies guidées par cholangioscopie avec des pinces dédiées permettent un prélèvement de tissu ciblé apportant un avantage indéniable à la technique. Les études utilisant le Spyglass DS™ ont fait état de sensibilités de 85 % et 57 % et de spécificités de 100 % dans le diagnostic des sténoses indéterminées (31).

 

Cholangioscopie per orale à double opérateurs avec système “mother-baby” endoscop Cholangioscopie per orale à opérateur unique avec système “mother-baby” endoscope Cholangioscopie directe
Equipement Duodénoscope

Cholangioscope réutilisable

2 colonnes d’endoscopie

SpyglassDSII (Boston Scientific)

Générateur dédié

Nasogastroscope
Avantage Réutilisable 4 directions

Canal d’irrigation indépendant

Opérateur unique

Coût réduit

Disponibilité

Canal opérateur plus large

Opérateur unique

Limitations 2 opérateurs

Fragilité du matériel

Désinfection du matériel difficile

Usage unique

Moniteur dédié

Coût

Manœuvrabilité

Exploration exclusive de la VBP

Risque d’embolie gazeuse

Tableau 5 : Différents types de cholangioscopie

Exemple d'image de cholangiosocpie

A : Voie biliaire principale normale avec fil guide ; B et C : Sténose tumorale maligne de la voie biliaire principale

Figure 1 : Exemples d’images de cholangioscopie

 

L’échographie endo-canalaire par mini-sonde implique l’introduction d’une sonde ultrasonore radiale spécifique à travers le duodénoscope sur un fil guide pendant la CPRE. Les caractéristiques des sténoses malignes comprennent un épaississement hypoéchogène asymétrique de la paroi biliaire et des contours irréguliers (32). Cette modalité d’imagerie semble utile pour définir une étendue longitudinale et l’invasion d’autres structures (parenchyme pancréatique, veine porte, artère hépatique droite), mais ne permet pas de réaliser des prélèvements endobiliaires directs. Les études ont montré une bonne sensibilité et spécificité (98 %) et une méta-analyse de 5 études a montré une précision de l’IDUS pour les obstructions malignes atteignant 84 %-95 % (33, 34) avec cependant une faible précision dans l’évaluation de l’envahissement ganglionnaire (69 %), en raison d’une profondeur de pénétration limitée des ultrasons. Cette technique a une applicabilité extrêmement limitée et n’est quasiment plus utilisée en raison de son coût élevé, de la fragilité et durée de vie des mini-sondes utilisées et de l’absence de biopsies possibles avec cette technique.

L’endomicroscopie confocale est réalisée à l’aide d’une minisonde endobiliaire dédiée réutilisable, qui est également passée au travers du duodénoscope dans la lumière d’un cathéter lors de la CPRE, après l’administration de 2,5 ml à 5 ml de colorant fluorescent à 10 % par voie intraveineuse. Elle produit des images dynamiques de l’épithélium biliaire à une échelle histologique. Initialement prometteuse, cette technique coûteuse est peu disponible, et son utilité dans le diagnostic a été supplantée par la cholangioscopie, notamment parce qu’elle nécessite un apprentissage sur l’interprétation de l’image, que la classification développée est peu facile d’utilisation et que l’interprétation des images est rendu difficile en cas de prothèse biliaire (35).

Proposition d’algorithme de prise en charge diagnostique

La première étape dans la gestion d’une OBDM consiste à établir le diagnostic et à identifier le stade de la maladie. Selon la disponibilité des modalités d’imagerie, le scanner et /ou l’IRM sont les deux principales techniques d’imagerie pour évaluer l’extension de la tumeur, établir l’envahissement vasculaire et la présence de métastases. Il est indispensable de passer par cette étape d’imagerie en coupes avant toute décision de drainage.

La deuxième étape est axée sur l’obtention d’une preuve histologique :

  • L’échoendoscopie avec ponction est réalisée, en première intention, de la tumeur pancréatique, mais aussi des ganglions lymphatiques environnants, de l’ascite ou des métastases lorsqu’elles sont accessibles à la ponction (par exemple : lésion du foie gauche ou le péritoine).
  • La CPRE est utile avec brossage biliaire, biopsies à la pince +/- cholangioscopie, si aucune masse n’est identifiée.

Ces deux étapes visent à distinguer les patients atteints d’une maladie résécable qui peuvent bénéficier d’une intervention chirurgicale dès le début de leur traitement, de ceux qui auront besoin d’un traitement néoadjuvant ou d’un traitement palliatif en cas de maladie avancée. Les critères de résécabilité sont résumés dans le Tableau 1. Pour l’adénocarcinome pancréatique comme pour le cholangiocarcinome de la voie biliaire distale, il est requis un envahissement veineux sur la veine mésentérique supérieur ou la veine porte < 180°, et l’absence de contact de la tumeur avec l’artère mésentérique supérieure, le tronc cœliaque ou l’artère hépatique commune.

Un algorithme pratique pour la prise en charge des patients chez lesquels on soupçonne une OBDM, et basé sur la littérature, est proposé dans la Figure 2.

 

Algorithme diagnostique proposé pour la gestion des OBDM

Figure 2 : Algorithme diagnostique proposé pour la gestion des OBDM

Prise en charge endoscopique

(Figure 3)

Patients atteints d’un cancer résécable : drainage biliaire préopératoire Indications

Le drainage biliaire préopératoire (DBP) chez les patients atteints d’OBDM est un sujet de controverse. Des études antérieures ont suggéré que l’hyperbilirubinémie était associée à une morbidité et une mortalité postopératoires accrues, et ont donc plaidé en faveur du DBP (36). Néanmoins, en 2010, un essai comparatif randomisé comparant le DBP à l’absence de DPB (202 patients atteints d’OBDM) a fait état de taux plus élevés de complications graves chez les patients ayant un DBP (74 % contre 39 %) sans effet bénéfique du DBP (37). Depuis, de nombreuses études et méta- analyses ont été publiées ; la dernière méta-analyse, comprenant 32 études sur des patients atteints de cancer du pancréas ayant un DBP, a suggéré que l’abstention était associée à un meilleur résultat (38). Les guidelines actuels publiés par l’ESGE recommandent de ne pas pratiquer de DBP de routine chez les patients présentant une OBDM (39). Les indications reconnues du DBP sont l’angiocholite, le prurit invalidant, l’ictère sévère en cas de bilirubine élevée (bilirubine sérique totale > 250 ou 300 mmol/l), la chirurgie retardée (> 2 semaines), et chez les patients ayant une indication de chimiothérapie néoadjuvante pour éviter les effets hépatotoxiques potentiels de la chimiothérapie.

 

Prise en charge endoscopique des patients présentants une OBDM

Figure 3 : Prise en charge endoscopique des patients présentant une OBDM avec preuve histologique

Voie d’abord

Le drainage endoscopique est préféré à la voie percutanée (39). Le drainage percutané présente une morbidité plus élevée en raison du risque

d’hémorragie liée à la ponction, d’infection cutanée et de risque d’essaimage tumoral sur le trajet de ponction. L’ensemencement tumoral secondaire sur le trajet de la voie percutané est une préoccupation majeure et peut compromettre des cas potentiellement résécables (5,2 %) (40). Les données de 3 études rétrospectives ont montré une survie plus longue des patients et une récidive péritonéale ou hépatique moins fréquente dans le groupe endoscopique (41).

Quel type de prothèse ?

Les guidelines de l’ESGE recommandent la mise en place d’une prothèse métallique auto-expansible de 10 mm de diamètre pour le DBP (39). Toutes les études disponibles sont en faveur de la prothèse métallique par rapport à la prothèse plastique, avec moins de ré-intervention endoscopiques et moins de complications y compris en situation néo-adjuvante pour le cancer du pancréas et sans surcoût (42-45). Les prothèses métalliques, en évitant si possible les prothèses trop longues, ne compromettent pas la résection R0.

Pour le type de prothèse métallique, un essai randomisé multicentrique publié en 2019, montre que les prothèses métalliques couvertes ou non-couvertes assurent un DBP similaire chez les patients atteints d’un cancer du pancréas (119 patients) (46). Une occlusion tumorale de la prothèse était plus fréquemment en cas de prothèse non couverte (0 vs. 16,7 % ; p < 0,01) mais les prothèses couvertes présentaient un risque de migration plus élevé (6 vs. 0 % ; p = 0,03).

Lésions non résécables : drainage biliaire palliatif Indications

La majorité des ODBM (70 %) ne sont pas opérables au moment du diagnostic. De plus, l’ODBM est souvent associé à une angiocholite, des symptômes liés à la cholestase (prurit), une perte d’appétit, des nausées, une dénutrition ou une insuffisance rénale. Dans ce contexte, la pose d’une endoprothèse biliaire palliative soulage les symptômes et améliore la qualité de vie (47).

Voie d’abord et type de prothèses

Les guidelines de l’ESGE recommandent le drainage biliaire par CPRE comme première voie d’abord, plutôt que la chirurgie ou la voie percutanée (Figure 4) (39). En effet, bien que la dérivation chirurgicale bilio-digestive ait montré un plus faible taux de récidive de l’ictère (2-5 %) par rapport à la CPRE avec mise en place d’une prothèse biliaire, elle présente une morbidité et une mortalité postopératoires significatives plus élevées, allant jusqu’à 25 % dans certaines séries (48). L’endoprothèse biliaire par CPRE est également préférée au drainage radiologique en raison d’un taux global plus faible d’événements indésirables (8,6 contre 12,3 %), d’un nombre moins élevé d’interventions répétées, d’une hospitalisation plus courte, de coûts moindres et de l’absence de drain biliaire externe (49). Plus récemment, le drainage biliaire guidé par échoendoscopie est apparu comme un outil utile dans le traitement des affections bilio-pancréatique, mais il est actuellement effectué dans les cas où le drainage biliaire par les techniques standard de CPRE a échoué (39).

 

Exemple d'OBDM

Vue en CPIRM (A), avant (B) et après (C) la mise en place d’une prothèse biliaire métallique lors d’une CPRE

Figure 4 : exemple d’OBDM

 

En ce qui concerne le type de prothèse mise en place lors de la CPRE, les données actuelles recommandent l’insertion d’une prothèse métallique pour le drainage palliatif (39). Les prothèses métalliques sont associées à une plus longue perméabilité, à des taux de complications plus faibles, à moins de réinterventions et à une plus longue survie des patients que les prothèses plastiques (50, 51). De plus, en termes de qualité de vie, les prothèses métalliques ont de meilleurs résultats. Bien que la prothèse métallique soit plus coûteuse que la prothèse plastique, aucune différence significative de coûts n’a été observée sur le long terme (52). Le choix d’utiliser des prothèses métalliques couvertes plutôt que des non-couvertes reste controversé. Bien que la prothèse couverte ait été développé dans le but de prolonger la perméabilité de la prothèse, cela n’a pas été démontré de manière définitive. Les prothèses couvertes présentent théoriquement un risque d’occlusion par croissance tissulaire tumorale intra-prothétique plus faible, mais elles ont des taux de migration plus élevés. Aucune des huit méta-analyses comparant les prothèses métalliques couverte et non-couverte n’a démontré de différence significative concernant les résultats cliniques (53). En ce qui concerne le risque théorique de cholécystite ou de pancréatite aiguë après l’insertion d’une métallique couverte, aucune étude n’a démontré un risque plus élevé qu’avec une prothèse non couverte. En résumé, il n’y a actuellement aucun consensus concernant le choix entre couvert et non couvert en cas de malignité prouvée, chacun ayant ses avantages et ses inconvénients.

Drainage biliaire guidé par voie échoendoscopique

Dans les centres experts, le drainage biliaire par voie échoendoscopique (DBE) est une méthode évoluée de drainage biliaire chez les patients atteints d’OBDM pour lesquels la CPRE a échoué (39).

Les différentes techniques de DBE comprennent 1) la technique du rendez-vous (l’accès canalaire est créé via une ponction sous échoendoscopie des voies biliaires intra-hépatiques avec passage antérograde d’un fil guide au travers de la papille dans le duodénum, ce fil guide étant ensuite récupéré par un duodénoscope) ou 2) la création d’un accès direct non anatomique reliant l’arbre biliaire à l’estomac (hépatogastrostomie) ou au duodénum (cholédoduodénostomie) (Figure 5). La technique du rendez-vous est généralement tentée en premier si la papille est accessible car elle offre une voie anatomique de drainage avec la mise en place d’une prothèse biliaire transpapillaire. Cependant, cet accès peut échouer en raison d’une papille inaccessible ou de l’incapacité à faire avancer le fil guide au travers de la papille dans le duodénum (anatomie altérée, obstruction duodénale, sténose duodénale ou présence d’une prothèse duodénale). Chez ces patients, l’hépatogastrostomie ou la cholédoduodénostomie sont des techniques de drainage possibles. Quatre méta-analyses ont rapporté que le DBE était cliniquement efficace dans 87 à 94 % des cas, avec des effets indésirables rapportés dans 16 à 29 % des cas (54). En comparaison avec le drainage par voie radiologique, le DBE est une option intéressante. Dans une méta- analyse incluant 9 études (483 patients), aucun différence n’a été mise en évidence concernant le succès technique du drainage (radiologique vs. échoendoscopique OR 1.78 ; 95 %CI 0,69-4,59), mais le DBE était associé à un meilleur succès clinique (OR 0,45 ; 95 %CI 0,23-0,89), moins de complications (OR 0,23 ; 95 %CI 0,12-0,47), et un taux moins élevé de réinterventions (OR 0,13 ; 95 %CI 0,07-0,24) (55).

Fort de ces arguments, le DBE pourrait apparaître comme une option de drainage de première ligne dans la décompression biliaire maligne en particulier depuis l’apparition des prothèses d’apposition biliaire type HotAxios (Boston Scientific, Marlborough, Massachusetts, USA). Cette prothèse permet la réalisation d’une cholédoduodénostomie en un temps, sans fil guide, grâce un cystostome intégré au cathéter de la prothèse. Dans une méta-analyse récente incluant 5 études comparatives dont 3 essais randomisés (396 patients), le succès technique était similaire entre le DBE et la CPRE (RR0,98 ; 95 %CI 0,93-1,03) et sans différence significative sur les événements indésirables (RR0,84 ; 95 %CI 0,35-2,01) (56). Le temps de procédure et le risque d’occlusion de la prothèse étaient similaires. Le DBE est donc une alternative à la CPRE en cas d’OBDM, mais d’autres études prospectives bien conçues (essai randomisé contrôlé) avec un plus grand nombre de patients sont nécessaires pour délimiter plus clairement les différences potentielles en termes d’événements indésirables et de coûts en situation palliative (57).

 

Mise en place d'une prothèse d'apposition pat voie échoendoscopie - cholédocoduodénostomie

A : mise en place du dispositif de largage de la prothèse en face de la voie biliaire principale dilatée à 17 mm
B : ponction de la voie biliaire au moyen du cystotome intégré
C : largage sous contrôle échoendoscopique de la colleret proximale de la prothèse d’apposition
D : largage sous contrôle endoscopique de la colleret distal de la prothèse d’apposition dans la lumière duodénlae :
issue de bile en abondance.
E et F : vue échoendoscopique et endoscopique finale de la prothèse, après retrait du dispositif de largage, entre la voie biliaire principale et le duodénum

Figure 5 : Mise en place d’une prothèse d’apposition par voie échoendoscopique – cholédocoduodénostomie

 

L’ablation par radiofréquence (RF)

Nous n’aborderons pas le traitement par photothérapie dynamique qui n’est plus réalisé à ce jour.

La RF agit en délivrant de l’énergie à une fréquence « radio » conduisant à une coagulation thermique des tissus, entraînant ainsi une nécrose et une mort cellulaire. Des sondes de RF dédiées à une application endo-biliaire au travers du duodénoscope est disponible (58, 59). La sonde biliaire de RF introduite sur un fil guide dans la voie biliaire peut être utilisée sur des lésions non résécables avant la pose d’une prothèse pendant la CPRE.

De rares études, avec de petits effectifs, ont été publiées jusqu’à présent avec un bon résultat clinique et une possible amélioration de la survie (60, 61). Une méta-analyse de 9 études comprenant 505 patients atteints d’OBDM chez qui la pose d’une prothèse biliaire métallique était réalisée avec ou sans application préalable de la RF par voie endoscopique ou percutanée. Dans le groupe RF, on a observé un allongement significatif de la perméabilité de la prothèse (50 contre 37 jours, p< 0,002) et de la survie (285 contre 248 jours, p< 0,001). La douleur abdominale est le seul évènement indésirable plus fréquent dans le groupe RF (61).

Cas particuliers

Drainage d’une sténose biliaire indéterminée

Dans le cas d’une sténose d’origine indéterminée, les recommandations de l’ESGE déconseillent l’utilisation d’une prothèse biliaire métallique non couverte car on sait que ce type de prothèse présente une faible perméabilité à long terme dans les maladies bénignes et qu’il est difficile, voire impossible, de la retirer (39).

Obstruction duodénale associée à l’obstruction biliaire

Aujourd’hui, aucune étude n’a comparé l’approche endoscopique à l’approche chirurgicale pour l’obstruction biliaire et duodénale associée chez un même patient. Les recommandations de l’ESGE suggèrent la pose de prothèses biliaire et duodénale métalliques (39).

Conclusion

Malgré les progrès récents, le diagnostic et la prise en charge des OBDM reste un défi clinique. Tant un diagnostic correct qu’une gestion thérapeutique appropriée nécessitent une approche multidisciplinaire. La combinaison des paramètres cliniques et biologiques, des caractéristiques d’imagerie et d’endoscopie, ainsi que de l’anatomopathologie par le biais de prélèvements biopsiques, permet de définir la cause sous-jacente. Le développement de la cholangioscopie est prometteur, avec la possibilité de pratiquer des biopsies ciblées en cas d’échec des techniques standards. L’endoscopie est la pierre angulaire du traitement de ces patients, permettant le drainage biliaire chez des patients sélectionnés en cas de tumeur résécable, ainsi que le drainage biliaire palliatif. En cas de drainage bilaire pré-opératoire, la pose d’une prothèse métallique est recommandée. En ce qui concerne le drainage des patients en situation palliative, le choix entre une prothèse métallique couverte et non couverte est toujours débattu, chaque type de prothèse ayant ses propres avantages et inconvénients. Enfin, le drainage biliaire sous échoendoscopie des OBDM est une technique en pleine expansion, notamment grâce à l’arrivée des prothèses d’apposition, bien qu’il ne s’agisse pas pour le moment d’une thérapie de première ligne.

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