Inhibiteurs de Janus kinase dans les MICI

POST'U 2025

MICI

Objectifs pédagogiques

  • Connaître les molécules disponibles, leurs spécificités et leurs singularités
  • Connaître les critères de choix d’un inhibiteur de JAK et savoir évaluer le rapport bénéfice-risque
  • Connaître les données d’efficacité et leur profil de tolérance
  • Connaître le bilan pré-thérapeutique et le suivi sous traitement

Testez-vous

Nous vous invitons à tester vos connaissances sur l’ensemble des QCU tirés des exposés des différents POST'U. Les textes, diaporamas ainsi que les réponses aux QCM seront mis en ligne à l’issue des prochaines journées JFHOD.

Testez vos connaissances sur le sujet.

Les 5 points forts

  1. Les inhibiteurs de JAK sont des petites molécules administrées par voie orale, de demi-vie courte et d’action rapide.
  2. Tous les inhibiteurs de JAK ont démontré leur efficacité dans la RCH, et ont obtenu une AMM et un remboursement en troisième ligne de biothérapie après échec d’un anti TNF et du vedolizumab.
  3. Dans la MC, seul l’upadacitinib a démontré son efficacité et a obtenu une AMM et un remboursement en deuxième ligne de biothérapie après échec d’un anti TNF.
  4. Le risque de réactivation du zona semble plus élevé avec l’upadacitinib et le tofacitinib qu’avec le filgotinib.
  5. Les taux de cancers et d’évènements cardiovasculaires majeurs sont faibles chez les patients avec une MICI traités par les inhibiteurs de JAK.

Vidéo

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Liens d’intérêt

Recherches cliniques : AbbVie
Advisory Boards: AbbVie, Alfa sigma, Pfizer
Cours, formations : AbbVie, Alfa sigma, Pfizer
Aides pour des recherches : AbbVie, Alfa-sigma, Pfizer

Mots clés

JAK-inhibiteur ; Crohn ; RCH

Abréviations

MICI : maladies inflammatoires de l’intestin,
RCH : Rectocolite Hémorragique,
MC : maladie de Crohn, JAK : Janus kinases,
i-JAKs : inhibiteurs de Janus Kinase,
EI : effets indésirables,
IL : interleukine,
EPO : érythropoïétine,
MEI : manifestations extraintestinales,
Colite aiguë grave (CAG),
Localisations anopérinéales (LAP),
Comité de pharmacovigilance (PRAC),
Évènements cardiovasculaires majeurs (MACE),
Maladies thromboemboliques veineuses (MTE),
ALAT : alanines aminotransférases,
ASAT : aspartates aminotransférases ;
HDLc : high density lipoprotein cholesterol,
GT : Gamma-glutamyltransferase,
LDLc : low density lipoprotein cholesterol,
VIH : virus de l’immunodéficience humaine,
VZV : virus varicelle-zona.

Introduction

Au cours des deux dernières décennies, des progrès ont été réalisés dans la compréhension de la physiopathologie des maladies inflammatoires de l’intestin (MICI) et ont permis le développement de thérapies biologiques ciblant les principaux médiateurs clés de l’inflammation, notamment le TNF, les interleukines (IL) 12-23, et les intégrines (1). Bien que ces biothérapies aient révolutionné la prise en charge médicale de la Rectocolite Hémorragique (RCH) et de la maladie de Crohn (MC), ~30 % des patients ne répondent pas au traitement d’induction et 40 % des patients sont en perte de réponse (2). Pour remédier à ces écueils, un net intérêt dans le développement de petites molécules pour le traitement des MICI s’est imposé. Parmi elles, la classe des inhibiteurs de Janus Kinase (i-JAKs) s’est distinguée (3). Pour aider à positionner ces nouveaux agents oraux dans l’arsenal thérapeutique des MICI, nous nous proposons dans cette FMC d’évaluer l’efficacité et l’innocuité des i-JAKs actuellement disponibles pour les patients atteints de RCH et de MC.

Molécules disponibles, leurs spécificités et leurs singularités

Molécules disponibles

Trois i-JAKs ont obtenu l’AMM dans le traitement de la RCH : le tofacitinib, le filgotinib et l’upadacitinib, et un i-JAK l’AMM pour la MC, l’upadacitinib (4). Il est important d’insister d’emblée sur le remboursement en France des i-JAKs, qui concerne les patients atteints de RCH modérée à sévère en cas de non-réponse ou d’intolérance au traitement conventionnel, à au moins un antiTNF et au védolizumab pour les 3 molécules et concerne les patients atteints de MC modérée à sévère en cas de non-réponse ou d’intolérance au traitement conventionnel, à au moins un antiTNF pour uniquement l’upadacitinib (4).

Tous les i-JAKs s’administrent par voie orale. Le tofacitinib est prescrit en induction à la posologie de 10 mg × 2/j. Après 8 semaines de traitement, en cas de réponse suffisante, la posologie recommandée à long terme est de 5 mg × 2/j ; toutefois, si la réponse n’est que partielle, la posologie peut être maintenue à 10 mg × 2/j. Le filgotinib est prescrit à la posologie de 200 mg/j en 1 seule prise, aussi bien en induction qu’en entretien. Chez les patients présentant une réponse partielle après 10 semaines de traitement, il peut être proposé de le poursuivre 10 semaines supplémentaires (répondeurs dits « tardifs »). La posologie peut alors être diminuée à 100 mg/j à la semaine 10 chez les patients considérés comme à risque d’événements indésirables. La posologie d’upadacitinib en induction est de 45 mg/j en 1 seule prise pendant 8 semaines. Elle peut être prolongée à 16 semaines au total pour les patients présentant une réponse incomplète. En cas de non-réponse après 16 semaines de traitement, l’upadacitinib devra être arrêté. En traitement d’entretien, l’upadacitinib sera poursuivi à la posologie de 30 mg ou de 15 mg/j (4). Les comprimés ne doivent pas être écrasés ou cassés.

Ces petites molécules présentent plusieurs avantages potentiels, notamment l’absence d’immunogénicité (elles n’ont pas le haut poids moléculaire des biothérapies, sont bien plus petites (5), une demi-vie courte, très intéressante en cas d’effets indésirables (EI) et surtout, une très grande facilité d’utilisation puisque d’administration orale (5).

Singularités pré-cliniques

Physiopathologie

Avant d’aborder leur efficacité clinique, pour connaitre les spécificités des i-JAKs, il nous faut nous intéresser à quelques données de physiopathologie : les Janus kinases (JAK) correspondent à 4 tyrosines kinases intracytoplasmiques, JAK1, JAK2, JAK3 et tyrosine kinase 2 (TYK2) (6). Ces protéines se lient aux régions membranaires intracellulaires des sous-unités des récepteurs des cytokines, ces différentes isoformes de JAK se liant à des récepteurs différents. Tout est double dans le monde des JAK : la liaison du ligand à son récepteur en 2 unités induit l’activation d’une paire de monomères JAK qui activent à leur tour (phosphorylation) un duo de facteurs de transduction intracellulaires appelés « STAT », apportant l’information au noyau de la cellule. Ces protéines « STAT » régulent ensuite de nombreuses fonctions cellulaires importantes. La JAK-inhibition permet de réduire le nombre de récepteurs de cytokines (7). Les i-JAKs vont bloquer les voies de signalisation des cytokines, les familles de l’interleukine 6 (IL-6) qui stimulent l’inflammation, la production d’interféron-a, impliqué dans la réponse immunitaire innée, de l’IL-2 initiant la prolifération lymphocytaire et l’homéostasie, d’interféron-g, qui a un rôle dans la défense anti virale (notamment contre l’herpès-zona virus), enfin la famille de l’érythropoïétine (EPO) contrôlant l’hématopoïèse et la production de plaquettes (8). L’inhibition de JAK offre donc la possibilité de moduler les effets de plusieurs cytokines d’où leur efficacité dans les MICI. Le tofacitinib est nommé « panJAK inhibiteur » puisqu’il inhibe JAK1, JAK2 et JAK3, le filgotinib et l’upadacitinib sont quant à eux qualifiés d’inhibiteur « sélectifs » puisqu’ils bloquent préférentiellement l’action de JAK1 (encadré 1). Néanmoins le concept de sélectivité préférentielle pour JAK1 est relatif et conditionné notamment par la dose du médicament. Cette notion de JAK-sélectivité est aussi à mettre en exergue avec l’effet pléiotropique de JAK1, acteur essentiel d’activation des familles IL-6, interféron-a, IL-2, interféron-g mais pas de l’EPO, où seul JAK2 est concerné (moindre risque théorique d’EI à la NFS-plaquettes lors de la JAK-inhibition avec upadacitinib et filgotinib) (9). A contrario de l’efficacité, l’inhibition de la voie de l’interféron-g (JAK1, JAK2, TYK2) favoriserait les infections opportunistes (herpès-zona), le blocage de la voie de l’IL6 (JAK1, TYK2) l’augmentation des CPK en bloquant l’oncostatine de type M (induction d’une différenciation des myoblastes et expression de CPK), celui de la famille de l’IL2 (JAK1, JAK3) l’augmentation des taux de LDL et HDL cholestérol par le biais de la modulation de la cholesteryl ester transfert protein (5, 8-10).

Encadré 1 : Sélectivité des inhibiteurs de JAK in vitro en fonction de l’IC 50 * (d’après réf 7-11)

 

 

Compound

Enzyme assay IC (nm)

50

JAK1 JAK2 JAK3 TYK2
Tofacitinib 15.1 77.4 55.0 489
Filgotinib 363 2400 >10,000 2600
Upadacitinib 8 600 139 NA

*L’IC 50 est la quantité nécessaire pour inhiber la phosphorylation de STAT (et diminuer l’effet de la voie JAK-STAT) de 50 %. Plus l’IC 50 est bas, plus l’inhibition est profonde.

Pharmacologie et métabolisme

En termes de pharmacologie très pratique, l’on retiendra que les demi-vies du tofacitinib, du filgotinib et de l’upadacitinib sont respectivement de 3 heures, 7 heures (19 heures pour son métabolite actif) et 9-14 heures respectivement (10). Ces demi-vies courtes sont d’évidents atouts en cas d’infections ou de chirurgie programmée. Le métabolisme sera surtout hépatique pour le tofacitinib, rénal pour le filgotinib et (un peu) plus hépatique pour l’upadacitinib, le métabolisme hépatique du tofacitinib et de l’upadacitinib passant préférentiellement par le cytochrome CYP3A4, tandis que le métabolisme du filgotinib est modulé par les estérases rénales notamment CES2 : le risque d’interaction médicamenteuse impliquant CYP3A4 (par exemple, le fluconazole et le kétoconazole majorent alors que la rifampicine atténue leur efficacité) est moindre avec le filgotinib (11). Le filgotinib n’est donc pas un inhibiteur ou inducteur cliniquement significatif de la plupart de ces enzymes ou transporteurs couramment impliqués dans les interactions telles que les enzymes du cytochrome P450 (CYP) et les UDP-glucuronosyltransférases 11. Ainsi, si l’insuffisance hépatique sévère (Child C) est une contre-indication aux 3 i-JAKs, l’insuffisance hépatique modérée (Child B) fait préconiser une adaptation de dose du tofacitinib (5 mg X2/j). A contrario, on n’adaptera pas la dose du tofacitinib dans l’insuffisance rénale chronique légère à modérée, mais on réduira la dose de tofacitinib à 5 mg/j dans l’insuffisance rénale sévère tandis qu’une dose de 100 mg/j est recommandée pour le filgotinib et de 30 mg/j en induction et 15 mg/j en entretien avec l’upadacitinib en cas d’insuffisance rénale modérée (précaution d’emploi dans ces situations). Le filgotinib et l’upadacitinib ne sont pas recommandés dans l’insuffisance rénale chronique sévère, le tofacitinib peut se discuter mais à 5 mg x 2/j (10, 11).

Singularités cliniques : efficacité

RCH

Rémission clinique

Les essais cliniques OCTAVE 1 (patients en échec du traitement conventionnel) et OCTAVE 2 (en échec des antiTNF) ont démontré que le tofacitinib à 10 mg × 2/j induisait une rémission clinique (ou plus exactement clinico-endoscopique puisque basée sur le score Mayo) chez 18 et 16 % des patients respectivement, à la semaine 8 (contre 8 % et 4 % pour le placebo, p=0,007 et p<0,001), et l’étude de maintenance OCTAVE Sustain a montré une rémission clinique à 1 an chez 35 % des patients sous tofacitinib à 5 mg × 2/j contre 11 % dans le bras placebo (p <0,001) (12). Le filgotinib quant à lui est le 1er inhibiteur sélectif de JAK à avoir obtenu l’AMM dans la RCH en 2021. Les études de phase IIb/III SELECTION (13) ont montré qu’à la semaine 10, le taux de rémission clinique était significativement plus important sous filgotinib 200 mg/j, chez le naïf aux antiTNF (26,1 % versus 15,1 % pour le placebo, delta de 10,8 %, p=0,0157) mais aussi chez les patients préalablement exposés aux anti-TNF (11 % versus 4 %, p=0,0103). À la semaine 58, l’efficacité chez les patients recevant du filgotinib à 200 mg/j se maintenait et continuait à s’améliorer par rapport à ceux sous placebo (37,2 versus 11,2 % ; delta 26 %, p<0,0001). Il n’existait pas de différence significative pour le filgotinib 100 mg/j par rapport au placebo à la semaine 10, mais l’on notait une différence significative à la semaine 58 (23,8 versus 13,5 % ; p=0,04) (13). Une singularité du filgotinib est son dosage unique de 200 mg/j à la fois en induction et en entretien. L’upadacitinib est l’autre inhibiteur sélectif de JAK1 disponible ayant obtenu l’AMM à la suite des résultats des études contrôlées randomisées U-ACCOMPLISH (induction) et U-ACHIEVE (induction et entretien) (14). À la semaine 8, dans les 2 études d’induction, la rémission clinique sous upadacitinib 45 mg/j était significativement supérieure au placebo (26 % et 34 % versus 5 % et 4 % ; p<0,0001). 451 patients étaient ensuite randomisés dans U-ACHIEVE pour recevoir en maintenance soit de l’upadacitinib 15 mg/j (n=148) ou 30 mg/j (n=154) ou le placebo (n=149). Les patients traités par l’upadacitinib étaient en rémission clinique de façon significativement plus importante de 42 % et 52 % respectivement, contre 12 % dans le groupe placebo (p<0,0001) (14).

Rapidité d’action

L’un des très grands points forts des i-JAKs est leur potentielle rapidité d’action. Dans une analyse des études de phase IIb/III SELECTION du filgotinib 200 mg/, les rectorragies des patients (score de saignement Rectal Bleeding Score ou RBS) pouvaient disparaître (RBS=0) dès le 7e jour chez certains malades (15). Cependant ce ne sont pas tant les selles liquides ou les rectorragies qui impactent la vie quotidienne de nos malades mais bien les besoins impérieux ou urgences défécatoires (5). Les résultats sont tout aussi impressionnants : pour l’upadacitinib 45 mg/j, lors d’une analyse de l’étude d’induction de phase 2b U-ACHIEVE, une plus grande proportion des malades déclarait ne plus ressentir d’urgence intestinale sous traitement par upadacitinib qu’avec le placebo, les améliorations pouvant s’observer… dès la deuxième semaine de traitement. À la semaine 8, les patients recevant la dose de 45 mg par jour présentaient les améliorations les plus significatives par rapport au placebo, 46 % d’entre eux n’ayant pas signalé d’urgence défécatoire (versus 9 % ; p≤0,001) et 38 % n’ayant pas signalé de douleurs abdominales (vs. 13 %pour le placebo ; p=0,015) (16). Cette singularité clinique très intéressante fait qu’au tout début de l’ère des thérapies combinées avancées (combinaison de biothérapies et petites molécules) (9), les i-JAKs pourraient devenir l’équivalent de « corticoïdes 2.0 » (avis de l’auteur).

Répondeurs lents

Néanmoins, tous nos patients ne vont pas répondre aussi rapidement, il faut parfois savoir attendre : les patients qui n’avaient pas obtenu de réponse clinique à la semaine 8 dans les essais d’induction du tofacitinib (OCTAVE) ont pu entrer dans un essai ouvert à long terme ([OCTAVE Open) en poursuivant le traitement à la dose d’induction, soit 10 mg deux fois par jour. À la semaine 8 de cette phase d’extension (soit après un total de 16 semaines de traitement d’induction), 51,2 % des patients avaient atteint la réponse clinique (17). Chez ces malades ayant obtenu une réponse clinique après 16 semaines d’induction, 72,9 % d’entre eux maintenaient une réponse clinique à la semaine 52. Il convient de noter que les patients qui ne répondaient toujours pas aux 8 semaines de prolongation interrompaient l’essai (17). En pratique, pour le tofacitinib, après 8 semaines de traitement, la posologie est diminuée à 5 mg x2 par jour (matin et soir), si possible, en fonction de la réponse clinique. En cas de réponse insuffisante après 8 semaines, il est possible de poursuivre jusqu’à 16 semaines compte tenu de la possibilité de réponse tardive (12). Pour le filgotinib, la dose recommandée est de 200 mg une fois par jour en dose d’induction puis d’entretien. En cas de réponse partielle après 10 semaines, il est possible de poursuivre jusqu’à 12 semaines supplémentaires compte tenu de la possibilité de réponse tardive (13). Enfin, l’upadacitinib peut être prolongé 16 semaines au total pour les patients présentant une réponse incomplète. En cas de non-réponse après 16 semaines de traitement, l’upadacitinib sera interrompu (4).

Réduction de doses

La question est de savoir si, chez ces malades souvent réfractaires, en 3e ligne, nous pouvons désescalader leur dose de traitement d’entretien. C’était l’objet de l’étude randomisée en double aveugle RIVETING (18), dans laquelle des patients avec RCH sous tofacitinib 10 mg x2/j depuis plus de 2 années consécutives, en rémission depuis≥ 6 mois, pouvaient soit recevoir la dose de 5 mg X2/j, soit poursuivre la dose de 10 mg X2/j : à 6 mois, 77,1 % et 90,0 % des patients des groupes 5 et 10 mg deux fois par jour, respectivement, étaient en rémission selon le score de Mayo modifié (différence ajustée entre les 2 groupes de 12,9 % ; intervalle de confiance à 95 % [IC] de 0,5 à 25,0). Des différences plus faibles entre les groupes de traitement étaient observées chez les patients avec un sous-score endoscopique initial de 0 par rapport à 1 [9,8 % ; IC de [-3,0-22,6], et 21,1 % ; IC de[-6,1-48,2], respectivement], nous permettant d’insister sur l’importante condition d’avoir obtenu un contrôle endoscopique préalable de la RCH avant d’envisager une diminution de dose (18).

Manifestations extraintestinales (MEI)

Nonobstant leur rapidité d’action, les i-JAKs sont tout aussi efficaces sur le terrain des MEI : les données issues des études d’induction (U-ACHIEVE Induction et U-ACCOMPLISH) et d’entretien (U-ACHIEVE Maintenance) de l’upadacitinib concernant upadacitinib RCH active modérée à sévère randomisée selon un ratio 2:1 pour recevoir 8 semaines de traitement d’induction par 45 mg d’upadacitinib 1x/j ou un placebo ont permis de recenser la présence de MEI à l’induction puis à chaque visite jusqu’à la semaine 52. À 1 an, le taux de résolution des arthropathies périphériques ou axiales était de 66,0 %, 38,2 % et 22,2 % pour l’upadacitinib 30 mg/j, l’upadacitinib 15 mg/j et le placebo respectivement (delta de l’upadacitinib 30 mg de 44,4 % versus placebo, p=0,010) (19). Avec les anti-TNF, les i-JAKs ont donc toute leur place dans ces situations de MEI articulaires.

Colite aiguë grave (CAG)

La grande rapidité d’action (quelques jours) des i-JAKs, en font des candidats potentiels dans la prise en charge thérapeutique de la CAG. Dans une étude rétrospective cas-témoins de 40 patients avec CAG ayant préalablement reçu des biothérapies, sous corticothérapie intraveineuse (i.v.) et recevant du tofacitinib, une diminution significative du risque de colectomie à 90 jours était observée, à forte dose (10 mg × 3/j) de tofacitinib (20). Un essai contrôlé randomisé a également étudié l’efficacité du tofacitinib associé à la corticothérapie intraveineuse, contre placebo, chez des patients atteints de CAG (21). À J7 de traitement, le taux de réponse clinique était de 83 % sous tofacitinib contre 58,8 % sous placebo (p=0,007), avec diminution du recours à une autre ligne de traitement dans cet intervalle dans le bras tofacitinib. Les données d’innocuité sont aussi à prendre en compte avec des infections, des évènements thrombotiques et des décès chez ces patients fragiles avec CAG à risques. Pour l’upadacitinib, les données sont pour l’heure fragmentaires. En attendant d’autres études, les signaux sont encourageants en faveur des i-JAKs dans la CAG mais avec des questions en suspens quant à leur place dans la stratégie (à la place /en relais de la corticothérapie intraveineuse ? En sauvetage après échec de l’infliximab IFX ?). Nous manquons de données d’essais randomisés (infliximab vs. i-JAKs ?), de données en vie réelle et enfin, aux prémices de la médecine de précision, de prédicteurs de réponse. Les i-JAKs ne doivent pas, à l’heure actuelle, être proposés dans cette indication hors discussion au cas par cas en centres experts.

Maladie de Crohn (MC)

Rémission clinique, réponse endoscopique

Même si la méthodologie des essais dédiés (doses testées, précocité d’évaluation du critère de jugement principal pour la MC, etc.) est discutable, Il n’en reste pas moins que le tofacitinib et le filgotinib n’ont pas démontré de différence significative d’efficacité par rapport au placebo dans la MC (22-23), à la différence de l’upadacitinib, dont la singularité est d’être le seul i-JAK actuellement utilisable dans cette situation (24) : dans deux essais d’induction de phase 3 (U-EXCEL et U-EXCEED), des patients atteints de MC modérée à sévère ont été randomisés pour recevoir soit 45 mg/j d’upadacitinib soit le placebo (ratio 2:1) une fois par jour pendant 12 semaines. Les patients obtenant une réponse clinique entraient dans l’essai de maintenance U-ENDURE et pouvaient recevoir 15 mg/j d’upadacitinib, 30 mg/j d’upadacitinib ou un placebo (ratio 1 :1:1) une fois par jour. La rémission clinique (évaluée par le score clinique d’activité CDAI< 150, mais aussi par les PROs2, douleur abdominale et nombre de selles) était significativement plus importante chez les MC ayant reçu 45 mg d’upadacitinib que sous placebo (dans l’étude U-EXCEL, 49,5 % contre 29,1 % ; dans l’étude U-EXCEED, 38,9 % contre 21,1 %) tout comme la réponse endoscopique, définie par la diminution de> 50 % du Simple Endoscopique Score SES-CD (dans l’étude U-EXCEL, 45,5 % contre 13,1 % ; dans l’étude U-EXCEED, 34,6 % contre 3,5 %) (P<0,001, avec des deltas que nous n’avions plus l’habitude de voir depuis l’avènement des anti TNF), ce que confirme l’étude de maintenance U-ENDURE, avec à un an des taux de rémission clinique statistiquement supérieurs pour 15 mg d’upadacitinib (37,3 %) ou 30 mg d’upadacitinib (47,6 %) qu’avec le placebo (15,1 %), et une réponse endoscopique se maintenant mieux avec 15 mg (27,6 %) ou 30 mg d’upadacitinib (40,1 %) qu’avec le placebo (7,3 %) (P<0,001) (24). Comme pour la RCH, les analyses ancillaires ont également montré la grande rapidité d’action de cet i-JAK et la possibilité d’être répondeur lent : au total, la posologie d’upadacitinib en induction est de 45 mg/j en 1 seule prise pendant 12 semaines. Elle peut être prolongée à 16 semaines au total pour les patients présentant une réponse incomplète. En phase d’entretien le choix de la dose sera adapté aux caractéristiques individuelles de chaque patient : la dose de 30 mg une fois par jour apparaissant être appropriée pour certaines MC, notamment dans le cadre d’un fort retentissement (charge inflammatoire) de la maladie (3-5).

Cas particulier : localisations anopérinéales (LAP) de la maladie de Crohn

Le pronostic effroyable et le retentissement majeur sur la vie quotidienne de nos patients n’est plus à démontrer, et, au-delà des anti-TNF (IFX et adalimumab), nous sommes toujours à la recherche de nouvelles solutions thérapeutiques innovantes et efficaces. Une analyse post hoc des phases 3 sus-citées a évalué les résultats de l’upadacitinib chez 143 patients atteints de LAP. Les malades recevant l’upadacitinib obtenaient significativement plus de résolution du suintement des fistules périanales par rapport au placebo à la fin du traitement d’induction (placebo, 5,6 %, n/N=1/18 ; UPA 45, 44,7 %, n/N=17/38 ; P=0,003) et en entretien (placebo, 0 %, n/N=0/11 ; UPA15, 28,6 %, n/N=4/14 ; P=0,105 ; UPA 30 mg, 23,1 % n/N=3/13 ; P=0,223) ainsi que la fermeture des orifices externes de fistule périanale (induction : placebo, 4,8 %, n/N=2/42 ; UPA45, 22,1 %, n/N=19/86 ; P=0,013 ; entretien : placebo, 0 %, n/N=0/30 ; UPA15, 18,8 %, n/N=6/32 ; P=0,024 ; UPA30 mg, 16,0 %, n/N=4/25 ; P=0,037). Les résultats d’études dédiées sont attendus avec grande impatience (25).

Positionnement et critères de choix d’un i-JAK

Outils pour comparer les différents inhibiteurs de JAK

L’arsenal thérapeutique s’étoffe dans les MICI, ce qui est une très bonne nouvelle pour nos patients : nous avons donc trois molécules i-JAKs efficace dans la RCH (tofacitinib, filgotinib et upadacitinib) et une dans la MC (upadacitinib), et déjà un cadre de prescription, via l’AMM et le remboursement français (3e ligne après échec d’un anti TNF et du védolizumab dans la RCH, 2e ligne après échec du traitement conventionnel et d’un anti-TNF pour l’upadacitinib dans la MC). La question reste cependant de savoir comment les comparer entre elles et les situer par rapport aux biothérapies (26) : l’idéal et gold standard serait d’avoir à disposition des essais en face-face, conçus pour permettre une comparaison formelle entre différentes thérapies actives. À ce jour, aucun essai de ce type n’est encore publié avec les i-JAKs (26). Les outils utilisables sont soit les méta- analyses en réseau, qui intègrent les résultats de nombreuses études individuelles (très souvent des essais contrôlés randomisés) en appliquant des formules statistiques objectives, soit des études de vie réelle, qui collectent systématiquement des données sur l’état de santé des patients à partir de nombreuse sources (exemple des registres) en utilisant souvent une analyse de correspondance de « scores de propension » pour des comparaisons adéquates (26). En termes d’efficacité clinico-endoscopique dans la RCH modérée à sévère, une métanalyse, publiée en 2023 a montré qu’en 1re ligne et en seconde ligne (après échec d’infliximab), par rapport à un traitement « idéal », l’upadacitinib était le traitement le plus efficace devant les autres i-JAKs et les biothérapies (27), et si l’on s’intéresse à des critères encore plus stricts (la rémission histologique, la réponse histologique et l’amélioration endo-histologique) en traitement de maintenance, c’est encore l’upadacitinib 30 mg/j en traitement de fond qui apparaît être le plus efficace dans une autre méta-analyse en réseau de thérapies avancées dans la RCH (28). En étude de vraie vie, une cohorte rétrospective a comparé la rémission clinique sans stéroïdes (RCSC) à 52 semaines chez 155 patients ayant commencé à prendre de l’upadacitinib (n=81) ou du tofacitinib (n=74). En utilisant un score de propension, les auteurs ont montré que l’upadacitinib était associé à une probabilité significativement plus élevée de RCSC par rapport au tofacitinib à 3 et 12 mois (odds ratio 3,01, intervalle de confiance à 95 % 1,39-6,55) et cet effet se maintenait chez les patients sous upadacitinib préalablement traités par tofacitinib (29). Ces données sur la RCH suggèrent donc, en l’absence d’essai face-face, une plus grande efficacité de l’upadacitinib par rapport au tofacitinib et au filgotinib, et les cohortes de vraie vie, qu’après exposition à un i-JAK, on puisse discuter le switch vers un second i-JAK. Pour la maladie de Crohn, en seconde ligne après échec d’un anti-TNF, en comparaison indirecte avec les autres biothérapies, une méta-analyse en réseau positionne en première place l’upadacitinib 30 mg/jour pour la rémission clinique en maintenance (30).

Critères de choix

Outre les données d’efficacité à disposition, on tiendra en compte dans le choix de l’i-JAk, des données de galénique (mono vs. double prise quotidienne), de la possibilité d’interactions médicamenteuses (métabolisme hépatique ou intestinal), du type de MICI, Crohn (upadacitinib) ou RCH (tofacitinib, filgotinib, upadacitinib), de la compliance du patient, de la dose d’induction intensifiée vs. la dose d’induction-entretien unique (filgotinib) et l’expérience du prescripteur avec ces molécules (5, 9, 11). Enfin, point majeur, il convient d’aborder maintenant la tolérance des i-JAKs.

Tolérance et évaluation du bénéfice-risque

Recommandations du PRAC

Pour commencer, nous nous devons de mettre en exergue, pour les rappeler, les recommandations du comité de pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (EMA) (31), recommandations émises afin de « réduire le risque d’effets secondaires graves (troubles cardiovasculaires, caillots sanguins, infections graves, cancers) associés aux i-JAKs, quand ces médicaments sont utilisés dans le traitement de maladies inflammatoires chroniques ».

Le comité a recommandé que ces médicaments ne soient utilisés qu’en l’absence d’alternative thérapeutique appropriée (nous soulignons) chez les patients :

  • Âgés de plus de 65 ans
  • Avec des facteurs de risque d’évènements cardiovasculaires majeurs (tels qu’une crise cardiaque ou un accident vasculaire cérébral)
  • Avec des facteurs de risque de cancer
  • Présentant un tabagisme (présent ou passé) (lire aussi encadré 2)

Par ailleurs, le PRAC recommande que « les inhibiteurs de JAK soient utilisés avec prudence chez les patients présentant des facteurs de risque de caillots sanguins dans les poumons et dans les veines profondes (risque de thrombo-embolie veineuse ) : antécédents de cancer, de maladie héréditaire de la coagulation, de thrombose, ainsi que chez les patientes traitées par contraceptifs hormonaux combinés, traitements hormonaux substitutifs, intervention chirurgicale importante ou patients immobiles), quelle que soit l’indication et la posologie (31)

Enfin, que « la posologie de l’i-JAK prescrit soit réduite pour certains groupes de patients présentant un risque de thrombo-embolie veineuse, de cancer ou d’évènements cardiovasculaires majeurs » (31). Ces recommandations proviennent surtout du coup de tonnerre induit par l’étude randomisée, ouverte, multicentrique, post-marketing, de non infériorité, ORAL Surveillance, qui comparait la tolérance des 2 doses de tofacitinib versus la tolérance des anti TNF : les risques d’évènements cardiovasculaires majeurs MACE et de cancers étaient plus élevés avec le tofacitinib et ne répondaient donc pas aux critères de non-infériorité, les rapports de risque hazard ratio HR étant de 1,33 (intervalle de confiance à 95 % [IC], 0,91 à 1,94) pour les MACE et de 1,48 (IC à 95 %, 1,04 à 2,09) pour les cancers , notamment pulmonaires (32). Cette étude a été depuis très discutée, rappelons simplement que l’étude ORAL Surveillance ne concernait uniquement que des patients porteurs de polyarthrite rhumatoïdes (pas de MICI), âgés de de 50 ans et plus et porteurs au minimum d’un facteur de risque cardio-vasculaire (dont le tabac). Qu’en est-il pour les MICI ?

Encadré 2 : Conclusions de la réévaluation des i-JAKs par l’EMA après ORAL surveillance (d’après réf 31)

Mise à jour des recommandations visant à réduire les risques de tumeurs malignes, d’événements indésirables cardiovasculaires majeurs, d’infections graves, d’évènements thromboemboliques veineux et de mortalité liée à l’utilisation des inhibiteurs de Janus kinase (JAK).

  • Une augmentation de l’incidence de tumeurs malignes, d’événements indésirables cardiovasculaires majeurs (MACE), d’infections graves, d’évènements thromboemboliques veineux et de mortalité a été observée avec le traitement par inhibiteurs de JAK par rapport aux anti-TNF-alpha chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde (PR) présentant certains facteurs de risque.
  • Ces risques sont considérés comme des effets de classe et sont applicables à l’ensemble des indications approuvées des inhibiteurs de JAK dans les maladies inflammatoires et dermatologiques.
  • Ces inhibiteurs de JAK ne doivent être utilisés qu’en l’absence d’alternative thérapeutique appropriée chez les patients :
    • âgés de 65 ans et plus ;
    • fumeurs ou ayant fumé pendant une longue durée ;
    • présentant d’autres facteurs de risque cardiovasculaire ou de tumeur
    • Les inhibiteurs de JAK doivent être utilisés avec prudence chez les patients présentant des facteurs de risque thromboemboliques veineux autres que ceux énumérés ci-dessus.
    • Les recommandations posologiques sont réajustées pour certains groupes de patients présentant des facteurs de
    • Un examen cutané régulier est recommandé pour tous les
    • Les prescripteurs doivent discuter avec les patients des risques associés à l’utilisation des inhibiteurs de JAK

Évènements cardiovasculaires majeurs MACE

Dans la foison d’articles publiés suite à ORAL Surveillance sur la tolérance des i-JAKs dans les MICI, nous citerons une étude rétrospective utilisant une vaste base de données multi-institutionnelle TriNetX (33), de patients atteints de MICI entre 2015 et 2023 (113 729 malades avec MICI !), présentée au congrès américain DDW 2024. L’analyse portait sur l’évolution vers une complication cardiovasculaire (infarctus du myocarde (IDM), geste de revascularisation coronarien (stent et pontage), accident vasculaire cérébral [AVC) ischémique et MACE (critère composite)]. Les traitements suivants étaient évalués : les 4 anti-TNF utilisés aux États-Unis, le védolizumab, l’ustékinumab et le risankizumab pour l’anti-IL12-23, l’upadacitinib et le tofacitinib pour les i-JAKs (le filgotinib n’est pas disponible aux États-Unis). Si les anti-TNF diminuaient le risque de MACE avec et sans ajustement sur l’âge, le sexe, les facteurs de risque cardiovasculaires, les antécédents cardiovasculaires, l’anémie et la prise de statines, (OR ajusté= 0,56 ; p=0,002 et ORa= 0,78 ; p=0,005), respectivement, les patients sous i-JAKs présentaient de même une baisse de MACE, sans atteindre la significativité, en tout cas ils n’augmentaient pas ce risque. Le design de cette base de données ne permet pas de savoir si ces résultats, plutôt favorables et rassurants, sont liés au contrôle de la MICI et/ou au mécanisme de la molécule. Par ailleurs, les taux de facteurs de risque cardiovasculaires étaient faibles dans cette population (5 %) plutôt d’âge jeune (45 ans en moyenne) (33). Outre ces données rassurantes, un groupe d’experts a publié une prise de position sur la prévention et la gestion des effets cardiovasculaires chez les patients avec MICI sous i-JAKs (34), la seconde déclaration de ce positionnement est très claire : « Les données disponibles sur l’ensemble de la population atteinte de MICI n’indiquent pas un risque plus élevé d’événements cardiovasculaires avec les inhibiteurs de JAK (niveau de preuve 3, degré d’accord 100 %). De plus, rejoignant « l’absence d’alternative thérapeutique appropriée » du PRAC (31), « le risque potentiel d’événements cardiovasculaires associé aux inhibiteurs de JAK doit être mis en balance avec celui d’une inflammation non contrôlée » (34). Il est utile de rappeler que la MICI en elle-même peut être un facteur de risque cardiovasculaire, par le biais de l’inflammation (35).

En termes de lipidologie, si les i-JAKs sont associés à des élévations modérées des taux de cholestérol total, cholestérol HDL-c, LDL-c) (34), (par le biais de la cholesteryl ester transfert protein 5, 8-10), le rapport LDL/HDL reste globalement stable. Ces modifications du profil lipidique sont réversibles, le plus souvent spontanément ou avec un traitement par statines (34).

Maladies thromboemboliques veineuses (MTE)

Sur le plan de l’explication physiopathologique, le lien entre i-JAKs et MTE reste ardu à définir, car aucun biomarqueur sanguin de thrombose à l’inclusion d’ORAL surveillance (32) n’a pu être associé avec la survenue de MTE veineuse et aucun biomarqueur n’a démontré une association mécanistique claire avec le risque accru de MTE veineuse sous tofacitinib par rapport aux anti-TNF (32). Olivera et al. ont réalisé une méta-analyse de dix études contrôlées portant sur 5 143 patients atteints de maladies inflammatoires, dont les MICI, exposés à des i-JAKs. Aucune différence significative dans le risque de MTE veineuse n’a été observée (36). Une autre analyse récente menée auprès de patients atteints de RCH traités au tofacitinib a révélé que sur les 1 157 patients de cette cohorte, cinq patients du groupe tofacitinib ont développé une MTE (une TVP, quatre EP) contre deux patients du groupe placebo (37). Il est très important de souligner que tous les patients ayant présenté une MTE l’ont faite lors de l’étude d’extension ouverte, et non au cours des études d’induction ou même d’entretien. Ces cas ont tous été observés avec la dose la plus élevée de 10 mg deux fois par jour. En outre, ces patients présentaient au moins un facteur de risque de MTE, tel que l’obésité, un traitement hormonal substitutif ou des antécédents de MTE (37). On rattachera ces résultats à un travail du GETAID (étude FOCUS) (38), première cohorte spécifiquement conçue pour évaluer les risques de MTE veineuse et cardiovasculaire chez 1 051 patients atteints de RCH : plus de neuf patients sur dix ne présentaient aucun facteur de risque élevé de MTE et ≤1 facteur de risque modéré, et les trois quarts avaient ≤1 facteur de risque cardiovasculaire (38). Des données de nouveau rassurantes chez un grand nombre de nos patients, mais que faire chez un patient porteur d’une maladie inflammatoire avec antécédent veineux thromboembolique « en l’absence d’alternative thérapeutique appropriée » (31) ? Cette question a été évaluée par l’équipe de Lowell et al (39). Les auteurs, dans une étude observationnelle rétrospective ont comparé le risque de récidive de MTE chez des maladies inflammatoires avec ou sans anticoagulant préventif (32 patients et 47 patients, respectivement). Les récidives concernaient des patients avec polyarthrite rhumatoïde sans troubles de la Le risque était de 9 MTE pour 100 patients-années dans le bras sans anticoagulants et de 0 MTE pour 100 patients-années, la différence étant significative (intervalle de confiance IC95 : 0-0. ; p=0,02). L’utilisation d’une anticoagulation préventive pourrait protéger ces patients à risque (39). Des études prospectives à plus grande échelle sont indispensable pour confirmer ces résultats.

Cancers

À partir de la base de données multi-institutionnelle TriNetX, des auteurs ont analysé le risque de développer un cancer, quel qu’en soit le type, et ont évalué ce risque sur 4 ans de suivi entre des groupes traités ou non par les petites molécules (40), puis en comparant les petites molécules et les biothérapies (anti-TNF, védolizumab, ustékinumab) et, enfin, chez les patients de plus de 50 ans, avec ou sans i-JAKs, en utilisant à chaque fois un score de propension ajusté sur l’âge, l’ethnie, le sexe, la consommation de tabac et d’alcool, le type de traitement de la MICI, les antécédents familiaux de cancer, la présence d’une cholangite sclérosante primitive, d’un virus de l’hépatite B ou de l’hépatite C, d’une infection par le papillomavirus humain (HPV) et d’autres comorbidités. Ces résultats, bien qu’à court terme pour des pathologies néoplasiques (4 ans) sont rassurants : aucun sur-risque n’est rapporté, avec (5 089 patients) ou sans traitement (5 089 patients également) par petites molécules, aucun sur-risque avec les petites molécules par rapport aux biothérapies et enfin, aucun sur-risque n’est identifié sous i-JAKs (quel qu’il soit) après 50 ans (40). Des études à long terme sont évidemment nécessaires, mais il s’agit d’un premier signal

Infections

Une autre singularité des i-JAKs est leur association au risque d’infection par le virus herpès-zona ( inhibition de la voie de l’interféron-g (8-10) : une méta-analyse en réseau (25 essais, 9 935 patients) a mis en évidence que le tofacitinib 10 mg x2/j (Risque Relatif RR=6,90 ; IC95 % : 1,56- 30,63, nombre nécessaire pour nuire number needed to harm NNH=97 ; IC95 % : 19-1022) et l’upadacitinib 45 mg/j (RR=7,89 ; IC95% : 1,04- 59,59, NNH=83 ; 95 % CI 10-14,305) étaient significativement plus susceptibles d’augmenter ce risque d’infection par le zona. Les inhibiteurs de Janus kinase étaient la classe thérapeutique la plus à risque, et ce risque s’élevait avec les plus fortes doses (RR avec la dose la plus faible = 3,16 ; IC 95 % : 1,02-9,84, NNH=265 ; IC95 % : 65-28,610, RR avec la dose la plus élevée = 5,91 ; IC95 % ; 2,21-15,82, NNH=117 ; 95 % CI 39-473), le filgotinib apparaissant moins impacté par ce risque (41). Une autre spécificité potentielle est celle de l’apparition d’une acné. L’équipe de Leuven a évalué sa prévalence en cohorte de vraie vie chez 46 patients traités par tofacitinib, 40 par filgotinib et 79 par upadacitinib (42). Aucun des patients traités par tofacitinib ou filgotinib n’a fait état d’une poussée d’acné. En revanche, 17 (21,5 %) patients ont spontanément signalé de l’acné pendant le traitement par upadacitinib, les lésions prédominant sur le visage (82,3 %), et le phénotype de l’acné comprenait des papules (66,7 %). L’effet était dose dépendant – le plus souvent en tout début de traitement avec résolution subséquente – et aucun des malades n’a cependant interrompu l’upadacitinib malgré l’acné (42).

Critères de choix d’un i-JAK selon la tolérance

En l’absence d’essai face-face comparant les i-JAKs entre eux dans la RCH (26), nous nous retournons de nouveau vers la méta-analyse en réseau de Panaccione et al., publiée en 2023 (27). La comparaison indirecte de toutes les thérapies avancées pour le traitement de la RCH modérée à sévère, même si l’on s’intéresse spécifiquement aux i-JAKs, ne mettait pas en évidence de différence significative pour les EI graves ni les infections graves (27).

Bilan pré-thérapeutique et suivi sous traitement

Clinique

Les conclusions du PRAC (31) sont en vérité une occasion unique pour mieux prendre en charge nos patients (prise en charge globale dite

« holistique »), et avant d’introduire un i-JAK, plusieurs points sont à aborder à la consultation :

  • Tout d’abord, existe-t-il une « alternative thérapeutique appropriée » (31) ? Les dossiers complexes se discuteront de façon collégiale en RCP
  • En « l’absence d’alternative thérapeutique appropriée », si l’on prescrit, en décision médicale partagée, le traitement i-JAK, il convient alors de :
    • (re)faire le point sur les comorbidités de notre patient et d’évaluer tout d’abord son risque cardiovasculaire, que l’on peut estimer simplement et rapidement, via notre objet connecté, par l’application de la société européenne de cardiologie : SCORE, qui évalue le risque de mortalité cardio−vasculaire à 10 ans, en fonction du sexe, de l’âge (de 40 à 70 ans), du statut tabagique, de la TA systolique et des concentrations de cholestérol total (CT) (43). L’application situe le malade selon un code couleur, qui, schématiquement, va du vert (risque faible) au rouge (risque élevé). Rappelons qu’à l’heure actuelle, 10 % de nos patients MICI français seront concernés par le risque cardiovasculaire (38). L’application SCORE et son code couleur nous permettent de donner à nos patients MICI leur risque cardiovasculaire et d’entamer une discussion centrée sur une modification de leur mode de vie pour qu’il soit « sain » et bénéfique pour leur santé (34). La prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaire (contrôler et surveiller les tabagisme, HTA, dyslipidémie, obésité et sédentarité) « doit suivre les recommandations utilisées en population générale en collaboration avec les cardiologues et les médecins de premier recours » (34). La définition du « gros fumeur » est intéressante à rappeler : il s’agit d’un homme de 50 à 80 ans, tabagique actif, consommant> 20 paquets- année ; a contrario, le patient sort de la zone de risque s’il a arrêté sa consommation tabagique depuis plus de 15 ans (44). Sur le plan lipidologique, si le tofacitinib et l’upadacitinib ont un potentiel d’interactions médicamenteuses via leur métabolisme hépatique (10,11), ce qui pourrait être problématique en cas d’utilisation concomitante d’hypolipémiants., tels que les statines (34), il a été montré que ces i-JAKs n’avaient pas d’effet clinique pertinent sur la pharmacocinétique des statines couramment utilisées (45-46).

Encadré 3 : Facteurs de risque thrombo-embolique veineux (selon réf 36-38)

Facteurs de risque majeurs

  • Âge ≥ 65 ans
  • Antécédent thromboembolique veineux
  • Obésité
  • Néoplasie
  • Thrombophilie acquise

Facteurs de risque mineurs

  • Sexe masculin
  • Tabagisme
  • Traitement hormonal substitutif
  • Contraception orale
  • Antidépresseurs
  • Sédentarité
  • Grossesse
  • Rhumatisme inflammatoire chronique
  • Activité de la maladie

Facteurs favorisants transitoires thromboemboliques veineux

  • Hospitalisation
  • Voyage ≥ 4 heures
  • Chirurgie
  • Immobilisation> 7 jours
  • Assaut cortisonique
  • Poussée de polyarthrite rhumatoïde

L’association d’un facteur de risque majeur à un facteur favorisant transitoire fait préconiser une thromboprophylaxie (36-38)

  • Évaluer le risque thrombo-embolique veineux, et en cas de prescription de l’i-JAK, maintenir la vigilance en particulier dans les situations favorisantes d’événements thrombo-emboliques veineux (voyages en avion de longue durée) (36-38) et encadré 3.
  • Évaluer le risque de cancers pour insister sur leur prévention : outre la recherche d’antécédents familiaux et personnels de cancer et de radiothérapie, d’un tabagisme et d’une consommation d’alcool, on s’aidera des recommandations de sociétés savantes (47) et de l’HAS (48). L’annexe 1 recense les organes à surveiller pour le dépistage et les conseils à apporter.
  • Informer le patient du risque d’infections notamment de zona pour qu’il consulte rapidement et savoir gérer celui-ci. En cas d’infection bactérienne ou virale évolutive (hormis un rhume « banal » ou un herpès labial), il est préférable de suspendre le traitement par i-Jak, le temps de contrôler l’infection, d’où le grand intérêt de cette classe thérapeutique en termes de demi-vie courte. L’annexe 2 décrit la conduite à tenir face à un zona selon les recommandations de l’HAS (49) et nous souhaitons surtout rappeler l’arrivée récente d’un vaccin VZV recombinant (non vivant) : La HAS recommande la vaccination contre le zona avec le vaccin VZV recombinant des personnes de 18 ans et plus dont le système immunitaire est défaillant, en raison des pathologies innées (par exemple, un déficit immunitaire primitif) ou d’un traitement (par exemple, la corticothérapie au long cours ou les traitements immunosuppresseurs). Le rythme d’injection est d’une dose vaccinale à répéter à 2 mois (50). La HAS recommande la vaccination avant d’initier une thérapie immunosuppressive. Il est recommandé de l’administrer le plus en amont possible, pour que la vaccination soit terminée idéalement 14 jours avant l’initiation du traitement. Dans cette situation, l’intervalle entre les deux doses de vaccin peut être réduit à un mois (50). Pour obtenir le remboursement dans cette situation, on indiquera sur l’ordonnance « Prescription dans le cadre d’un accès direct ». Vaccinons nos patients sous i-JAKs !
  • Informer le patient du risque d’acné sous upadacitinib : si nous ne nous substituerons évidemment pas à nos confrères dermatologues, une courte proposition de prise en charge se trouve dans l’annexe 3 (51).
  • D’emblée discuter de l’observance thérapeutique chez notre patient et, selon certains profils-patients, se rapprocher d’un centre MICI agréé en éducation thérapeutique.
  • Prendre en compte des interactions médicamenteuse éventuelles rares chez nos patients jeunes (annexe 4) (10, 11).
  • Prendre en considération tout projet de grossesse

En l’état actuel des connaissances et en raison d’une tératogénicité chez l’animal, les femmes en âge de procréer doivent être sous contraception efficace pendant le traitement i-JAK et il faut attendre au moins 4 semaines après la dernière dose d’i-JAK pour le projet de grossesse. Les i-JAKs sont contre-indiqués pendant la grossesse, tout comme l’allaitement en cas d’exposition (52).

  • En phase d’entretien, il convient de viser la dose efficace la plus faible pour maintenir la rémission avec les i-JAKs. En miroir, la dose d’entretien la plus élevée doit être idéalement évitée chez les patients avec MICI présentant des facteurs de risque cardiovasculaire et/ou de MTE connus (34).

Bilan biologique pré i-JAK et de suivi sous i-JAKs

Le bilan biologique pré i-JAks et de suivi reprend celui que nous avons appris et connaissons avant d’instaurer toute biothérapie (53) (encadré 4), la différence majeure est que lors de l’instauration d’un i-JAK, « le profil lipidique (comprenant cholestérol total, le LDL-C, le HDL-C et les triglycérides) doit être réalisé à l’initiation du traitement, puis monitoré après l’induction, et régulièrement tous les 6 mois. La prise en charge de la dyslipidémie doit être conforme aux directives actuelles. (Niveau de preuve : 5. Accord : 82 %) » (34). Pour le suivi de la NFS-plaquettes, se référer à l’annexe 5.

Autres situations pratiques : se référer à l’annexe 6

Encadré 4 : Bilan pré thérapeutique et suivi (d’après Résumés des Caractéristiques du Produit de Filgotinib, Tofacitinib et Upadacitinib réf 53)

Bilan pré-thérapeutique avant d’initier un i-JAK

  • Hémogramme
  • Electrophorèse des protéines sériques
  • ASAT/ALAT, bilirubine, gamma-GT
  • Créatininémie, clairance de la créatinine
  • Radiographie du thorax
  • Bilan lipidique (Cholestérol total, LDLc, HDLc, triglycérides)
  • Dépistage tuberculose latente de moins de 2 ans : Test in vitro ou Intradermoréaction à la tuberculine 5 UI
  • Sérologies de moins de 5 ans : hépatites B et C, sérologie VIH (accord du patient) et sérologie VZV (patient sans antécédent de varicelle)
  • Règles de bonnes pratiques de dépistage des facteurs de risque de néoplasie (cf. Annexe 1)

Suivi biologique minimal d’un patient sous i-JAK

  • Avant la fin du 1er mois : NFS, créatinine, transaminases
  • À 3 mois : NFS, créatinine, transaminases, bilan lipidique
  • À partir du 6e mois : NFS, créatinine, transaminases tous les 3 mois, bilan lipidique tous les 6 mois (Pas d’intérêt clinique au suivi des CPK)

Conclusion

Alors que les inhibiteurs de JAK se sont avérés très efficaces dans les MICI (voie orale, absence d’immunogénicité, rapidité d’action, grand intérêt dans les MEI), et que les dernières données de tolérance abordées dans cet exposé semblent tendre vers un aspect plus favorable, certains cliniciens continueront à se montrer prudents en raison des profils de risque cardiovasculaire, thromboemboliques veineux et de cancer associés à cette classe thérapeutique. De même, nos patients peuvent également être réticents à l’égard de médicaments portant des avertissements (encadré 2). Toutefois, reconnaissons que chaque patient évalue différemment les avantages /bénéfices et que ses préférences en termes de choix de traitement sont influencées par un ensemble unique (et personnel) de facteurs impactant ce qui apparaît être le plus important à leurs yeux (54). Nous, médecins, avons tendance à sous-estimer les risques que nos patients sont prêts à accepter afin d’obtenir un meilleur contrôle de leur maladie pour éviter des complications (55) surtout lorsqu’un médecin spécialisé dans leur prise en charge est en mesure de les aider (55), en particulier lorsqu’un processus de « décision médicale partagée » est initié (56). Par conséquent, avant l’avènement de la médecine personnalisée, pour chaque décision thérapeutique, chaque scénario clinique de MICI, tenons compte de ces facteurs associés au patient, et de l’absence d’alternative raisonnable.

Remerciements : Thomas Château, Marc Girard, Xavier Roblin (MICI Institut Privé).

Annexe 1 : Dépistage et prévention du risque de cancer chez les patients sous i-JAKs (d’après réf 47 et 48 recommandations HAS)

Dépistage

  • Col utérin (58,2 %) :
    • 25-29 ans : examen cytologique frottis/3 ans après 2 premiers tests normaux à 1 an d’intervalle
    • 30-65 ans : test HPV-HR 3 ans après dernier cytologie puis /5 ans
  • Sein (45,6 %) : 50-74 ans mammographie/2 ans
  • Colon (28,9 %) : 50-74 ans/2 ans
  • Prostate (discuté, non recommandé par HAS) : 50-74 ans avec espérance de vie>10 ans : PSA + TR/an
  • Poumon : >50 ans + fumeurs actif ou sevrés <10 ans + 15 cig/j pdt >25 ans ou >10 cig/j pendant >30 ans
    • TDM thoracique faible dose non injectée/2 ans
  • Consultation dermatologique annuelle : Spino/Basocellulaire

Conseils aux patients

  • Sevrage tabac et alcool : consultations spécialisées
  • Alimentation équilibrée
  • Activité physique adaptée

Annexe 2 : Gestion du zona sous i-JAK (d’après réf 49 recommandations HAS)

  • Informer le patient du risque de zona
  • Vaccin VZV recombinant
    • d’une dose vaccinale à répéter à 2 mois
    • mentionner sur l’ordonnance « Prescription dans le cadre d’un accès direct »
  • Suspendre le traitement par i-JAK, le temps de contrôler l’infection
  • Zona non compliqué : valaciclovir per os 3 g/j 7 jours
  • Zona compliqué : aciclovir IV 10 mg/kg/8 h pendant au moins 8 jours
    • En cas d’infection sévère, un arrêt définitif peut être discuté avec l’infectiologue
  • Traitements des douleurs associées
    • Phase aiguë : antalgiques de classe II ou III
    • Algies post-zostériennes (avis Centre anti-douleur) Amitriptyline 12,5 à 75 mg/j (AMM)

Si besoin : Carbamazépine (400 à 1 200 mg/j, hors AMM) Gabapentine (1 800 à 3 600 mg/j, AMM)

Annexe 3 : gestion de l’acné sous upadacitinib (d’après réf 51)

  • Informer le patient du risque d’acné
    • qui ne devrait pas justifier d’interruption thérapeutique
  • Prise en charge commune avec le dermatologue
    • antibiotiques topiques, peroxyde de benzoyle, rétinoïdes si nécessaire

Annexe 4 : Liste (non exhaustive) des interactions médicamenteuses potentielles sous,i-JAKs (d’après réf 10,11)

  • Avec inhibiteurs ou inducteurs du cytochrome P450
    • tacrolimus, ciclosporine, kétoconazole, fluconazole,
  • ou inducteurs du cytochrome P3A4
    • rifampicine, phénobarbital, carbamazépine, etc.

Annexe 5 : Paramètres de NFS-plaquettes où l’i-JAK peut être initié ou poursuivi (d’après Résumé des Caractéristiques du Produit tofacitinib, filgotinib, upadacitinib)

Tofacitinib

  • Hb > 9 g/dl
  • Lymphocytes >750/mm3
  • PNN >1000/mm3

Filgotinib

  • Hb > 8 g/dl
  • Lymphocytes > 500/mm3
  • PNN >1000/mm3

Upadacitinib

  • Hb > 8 g/dl
  • Lymphocytes > 500/mm3
  • PNN >1000/mm3

À l’inverse, en cas d’anémie (Hb< 8 g/dl) ou de lymphopénie < 500/ mm3, de thrombopénie :

–     le traitement ne doit pas être initié ou doit être interrompu au moins temporairement

Annexe 6 : Autres situations pratiques (d’après Résumé des Caractéristiques du Produit tofacitinib, filgotinib, upadacitinib)

Conduite à tenir en cas d’oubli de dose d’un i-JAK ?

  • Prendre son traitement à l’heure habituelle sans rien modifier

Conduite à tenir si extractions dentaires prévues pour poser des implants sois I-JAKs

  • Prescription d’une antibioprophylaxie
  • Suspendre 7 jours l’i-JAK avant les soins d’extractions (règle des 5 demi-vies)
  • Reprise de l’i-JAK au moment de la cicatrisation muqueuse

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