Prise en charge des métastases atypiques des cancers digestifs – Partie 2 : les métastases osseuses
POST'U 2025
Cancérologie
Objectifs pédagogiques
- Connaître les indications et les modalités de traitement des métastases osseuses
Les 5 points forts
-
Les modalités de prise en charge des métastases cérébrales incluent la chirurgie, la radiothérapie en condition stéréotaxique et l’irradiation de l’encéphale en totalité, utilisées seules ou en association.
- Les métastases ovariennes sont habituellement chimiorésistantes et leur résection chirurgicale bilatérale à visée symptomatique doit être discutée même dans un contexte palliatif.
- En situation de maladie oligométastatique, la résection chirurgicale des métastases surrénaliennes ou des métastases ganglionnaires para- aortiques sous-rénales pourrait permettre d’améliorer la survie globale chez des patients sélectionnés.
- En cas de métastases osseuses, la radiologie interventionnelle permet un bon contrôle tumoral, de soulager les symptômes et d’éviter certaines complications.
- Tout traitement locorégional de métastases doit être discuté en réunion de concertation pluridisciplinaire avec un représentant de toutes les spécialités impliquées dans les options thérapeutiques possibles.
Vidéo
Connaitre les indications et les modalités de traitement des métastases osseuses
Lambros Tselikas
Lien d’intérêt
L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt en rapport avec sa présentation
Mots-clés
Qualité de vie ; Mini-invasif ; Imagerie
Abréviations
Non communiquées
Introduction
Les métastases osseuses représentent une complication fréquente et complexe dans le cadre des pathologies oncologiques. Si elles sont bien documentées dans les cancers mammaires, pulmonaires ou prostatiques, leur prévalence et leur présentation clinique dans les cancers digestifs sont plus hétérogènes. Les hépatocarcinomes et les tumeurs neuroendocrines sont les principales tumeurs digestives associées à des métastases osseuses. En revanche, dans les cancers colorectaux, gastriques, cholangiocarcinomes ou pancréatiques, de telles localisations sont rares. Cette rareté explique, en partie, les retards diagnostiques souvent observés, retardant d’autant la mise en œuvre de traitements appropriés.
Les métastases osseuses marquent souvent une étape charnière dans l’évolution de la maladie oncologique. Elles sont à l’origine de douleurs chroniques invalidantes, d’une détérioration marquée de la qualité de vie et d’une augmentation significative des risques de complications graves, telles que les fractures pathologiques ou les compressions neurologiques (1). La radiologie interventionnelle (RI) a émergé comme une discipline essentielle pour répondre à ces défis, offrant des alternatives mini-invasives, efficaces et personnalisées. Cette présentation explore les techniques de RI et leurs applications spécifiques aux cancers digestifs.
Approches de Stabilisation Osseuse
La stabilisation osseuse constitue un pilier fondamental dans la prise en charge des métastases osseuses. Les fractures pathologiques, qu’elles surviennent au niveau du rachis ou des os périphériques, nécessitent une prise en charge rapide pour prévenir l’immobilisation prolongée et ses complications.
La cimentoplastie est une technique clé de stabilisation osseuse en radiologie interventionnelle. Elle consiste à injecter du ciment acrylique (poly- méthyl-méthacrylate, PMMA) dans une fracture pathologique ou ostéoporotique sous guidage fluoroscopique ou tomodensitométrique. Cette procédure est particulièrement efficace pour stabiliser les fractures des vertèbres et du sacrum. En plus de réduire la douleur mécanique, elle améliore significativement la qualité de vie en permettant une mobilisation rapide des patients.
Une autre technique utilisée dans les fractures plus complexes est l’ostéosynthèse percutanée. Celle-ci repose sur la fixation interne des fractures à l’aide de vis cimentées. Cette approche est souvent indiquée dans les fractures pelviennes ou du bassin, où la stabilisation mécanique est essentielle pour prévenir les douleurs chroniques et améliorer la mobilité fonctionnelle (2).
Destruction tumorale et contrôle Local
En complément des techniques de stabilisation, la radiologie interventionnelle offre des solutions efficaces pour le contrôle local des métastases osseuses (3) . Les techniques de destruction thermique percutanée, telles que la radiofréquence, la cryothérapie et les micro-ondes, permettent une destruction ciblée des cellules tumorales (4). Ces techniques, guidées par imagerie, sont particulièrement indiquées pour les métastases rachidiennes et périphériques associées à des douleurs invalidantes ou des compressions nerveuses. Des études récentes ont validé cette approche comme sûre et efficace aussi bien pour l’effet antalgique, la diminution de la consommation d’opioïdes mais également sur l’amélioration de la qualité de vie (5). L’éléctrochimiothérapie représente une avancée prometteuse, en particulier pour les métastases résistantes ou non accessibles aux autres traitements, telles que les lésions épidurales compressives après radiothérapie. Cette technique utilise des impulsions électriques pour augmenter la perméabilité des membranes cellulaires tumorales, facilitant ainsi l’effet cytotoxique des chimiothérapies (6).
Les bénéfices de ces approches ne se limitent pas à une réduction des symptômes. Ils incluent également une prévention des complications neurologiques et une amélioration du contrôle tumoral local. Ces interventions, souvent réalisées en une seule séance, permettent aux patients de bénéficier rapidement d’une diminution de leurs douleurs et d’une reprise des activités quotidiennes (5).
Dans le cas des métastases osseuses douloureuses associées à des fractures pathologiques, la cimentoplastie est souvent privilégiée pour son efficacité rapide sur les douleurs mécaniques. En revanche, dans les lésions à risque de compression nerveuse, les techniques de destruction thermique, éventuellement combinées à une consolidation par cimentoplastie, sont indiquées. Les décisions thérapeutiques doivent être discutées en réunion pluridisciplinaire pour intégrer les paramètres oncologiques et fonctionnels du patient.
Particularités dans les cancers digestifs
Les cancers digestifs présentent des particularités dans l’atteinte osseuse qui influencent la stratégie thérapeutique. Les tumeurs neuroendocrines, par exemple, peuvent être oligométastatiques ou à évolution lente, ce qui rend les techniques de destruction thermique particulièrement efficaces et indiquées. À l’inverse, les cancers colorectaux ou pancréatiques, lorsqu’ils présentent des métastases osseuses, sont souvent associés à une dissémination systémique importante. La prise en charge doit alors intégrer une approche multidisciplinaire combinant radiologie interventionnelle, radiothérapie en sus des traitements systémiques.
Figure 1 : technique de consolidation de lésions osseuses en radiologie interventionnelle
Exemples d’ostéosynthèse cimentée du bassin, vertébroplastie multiétagée et ostéosynthèse cimentée du col fémoral
Figure 2 : Métastase osseuse iliaque droite d’un hépatocarcinome, traitée par cryothérapie percutanée
Imageries en coupe axiale pré (IRM), per (scanner) et post (IRM) traitement
Figure 3 : Métastase vertébrale avec atteinte épidurale responsable d’une compression médullaire, progressive après radiothérapie. Traitement par électrochimiothérapie permettant une bonne réponse locale (décompression médullaire)
Bénéfices et limites de la radiologie interventionnelle
La radiologie interventionnelle se distingue par sa faible morbidité et son caractère mini-invasif, offrant des solutions efficaces pour des patients souvent fragilisés par leur maladie. Ces techniques permettent de limiter le recours à la chirurgie, de réduire les durées d’hospitalisation et d’améliorer la qualité de vie des patients.
Cependant, la RI ne remplace pas la radiothérapie ou la chirurgie. Dans les cas d’instabilité rachidienne sévère ou de compression médullaire significative, seule une décompression chirurgicale peut répondre aux besoins du patient. De plus, certaines métastases situées à proximité immédiate de structures neurologiques ou vasculaires sensibles peuvent limiter l’application des techniques de destruction thermique, et pour lesquelles une irradiation peut représenter une option intéressante.
Références
- Farooki A, Leung V, Tala H, Tuttle Skeletal-related events due to bone metastases from differentiated thyroid cancer. J Clin Endocrinol Metab. 2012 Jul;97(7):2433-9. doi: 10.1210/jc.2012-1169. Epub 2012 May 7. PMID: 22564664.
- Deschamps F, Farouil G, Ternes N, et Thermal ablation techniques: a curative treatment of bone metastases in selected patients? Eur Radiol.2014 Aug;24(8):1971-80. doi: 10.1007/s00330-014-3202-1. PMID: 24859596.
- Roux C, Tselikas L, Yevich S, Sandes Solha R, Hakime A, Teriitehau C, et al. Fluoroscopy and Cone-Beam CT-guided Fixation by Internal Cemented Screw for Pathologic Pelvic Radiology. 2019 Feb;290(2):418-425. doi: 10.1148/radiol.2018181105. Epub 2018 Nov 13. PMID: 30422090.
- Jennings JW, Prologo JD, Garnon J, et Cryoablation for Palliation of Painful Bone Metastases: The MOTION Multicenter Study. Radiol Imaging Cancer. 2021 Feb;3(2):e200101. doi: 10.1148/rycan.2021200101. PMID: 33817650.
- Goetz MP, Callstrom MR, Charboneau JW, et Percutaneous image-guided radiofrequency ablation of painful metastases involving bone: a multicenter study. J Clin Oncol. 2004 Jan;22(2):300-6. doi: 10.1200/JCO.2004.03.097. PMID: 14722039.
- Deschamps F, Tselikas L, Yevich S, et al. Electrochemotherapy in radiotherapy-resistant epidural spinal cord compression in metastatic cancer patients. Eur J Cancer. 2023 Jun;186:62-68. Doi: 10.1016/j.ejca.2023.03.012. PMID: 37030078
FMC HGE : Organisme certifié Qualiopi pour la catégorie ACTIONS DE FORMATION