Endoscopie bilio-pancréatique interventionnelle

Depuis 30 ans, l’endoscopie bilio-pancréatique interventionnelle a transformé le traitement des maladies des voies biliaires et du pancréas. Les évolutions récentes concernent le traitement des calculs (avec une conférence de consensus sur la pancréatite aiguë biliaire) mais aussi des mises au point sur la place de la sphinctérotomie avant ou après cholécystectomie laparoscopique, la dilatation de la papille pour le traitement des calculs de la VBP, la lithotripsie intra-corporelle par laser ou lithotripsie extra-corporelle des calculs biliaires d’extraction difficile, la prévention de la pancréatite post-CPRE, l’utilisation de l’endocoupe avec diminution de l’hémorragie et de la pancréatite post-sphinctérotomie, l’utilité ou pas de la cholécystectomie après sphinctérotomie, le traitement endoscopique des tumeurs adénomateuses de l’ampoule de Vater, la place persistante des prothèses biliaires en plastique, la non prévention de l’obstruction secondaire des prothèses par antibiothérapie, l’intérêt des orifices latéraux, le développement des prothèses métalliques couvertes et non couvertes, la place prépondérante de l’endoscopie dans le traitement palliatif des cancers des voies biliaires et du pancréas et l’association indispensable radio-endoscopie pour obtenir un taux de succès élevé de ces techniques, la mise en place de prothèse métallique pour le traitement des sténoses duodénales malignes, le traitement des sténoses oddiennes bénignes par sphinctérotomie et injection de toxine botulique comme facteur prédictif du résultat de la sphinctérotomie, le traitement endoscopique de la dystrophie kystique de la paroi duodénale, de la pancréatite chronique calcifiante sans oublier l’évolution des instruments réutilisables pour la sphinctérotomie endoscopique avec un développement de matériel de plus ou plus performant.

Le traitement des calculs

Un certain nombre d’indications sont indiscutables. D’autres ont fait l’objet de travaux récents, de conférences de consensus ou ne sont pas encore réglées.

» Le patient est cholécystectomisé

La sphinctérotomie endoscopique est le traitement de choix de la lithiase résiduelle quel que soit l’âge du patient au décours immédiat ou à distance de la cholécystectomie.

» La vésicule est en place

Si la chirurgie est récusée ou à haut risque, la sphinctérotomie endoscopique permet l’extraction des calculs de la voie biliaire principale dans un premier temps. Une cholécystectomie secondaire ne sera réalisée que si survient une cholécystite (moins d’un cas sur dix)

» La vésicule est alithiasique

La lithiase de la voie biliaire principale isolée sans calcul vésiculaire est traitée par sphinctérotomie quel que soit l’âge du patient. La cholécystectomie secondaire n’est peut-être pas nécessaire.

» L’angiocholite lithiasique grave

Il s’agit d’une urgence. L’angiocholite lithiasique grave est accompagnée d’au moins un des signes suivants : choc septique, insuffisance rénale aiguë, syndrome confusionnel, hémorragie digestive. La fréquence et la gravité des complications post-opératoires ont amené la plupart des auteurs à préconiser une sphinctérotomie endoscopique dont les résultats sont souvent spectaculaires.

» La pancréatite aiguë biliaire

(Conférence de consensus janvier 2001)

Traitement d’urgence : SE

  • Consensus
    • en cas d’angiocholite et/ou d’ictère obstructif, la sphinctérotomie endoscopique est indiquée quels que soient la durée d’évolution et le degré de gravité ;
    • dans les pancréatites aiguës d’évolution favorable, pas de sphinctérotomie en urgence.
  • Pas de consensus
    • dans les pancréatites aiguës graves, une sphinctérotomie peut être réalisée en urgence dans les 72 premières heures d’évolution.
    • dans les pancréatites aiguës vues à un stade précoce (12 premières heures), il est difficile de prédire la gravité de l’évolution.

Traitement différé

Pancréatite aiguë bénigne

Risque de récidive dans 30 % des cas.

– Cholécystectomie par laparoscopie au cours de la même hospitalisation.

– Stratégie au niveau de la LVBP en fonction de l’équipement et de l’expertise du centre.

  • Recherche d’une LVBP dans le même temps que la cholécystectomie avec opacification de la VBP.
    En cas de LVBP :

    – extraction sous coelioscopie dans le même temps ;
    – laparotomie ;
    – SE per ou postopératoire.

  • Recherche LVBP en pré-opératoire
    – écho-endoscopie (sensibilité et spécificité proche de 100 %) ou IRM ;

    – en cas de calcul, sphinctérotomie pré-opératoire ou chirurgie ;
    – une CPRE systématique pré-opératoire n’est pas recommandée.

    Pancréatite sévère (pronostic dominé par les complications générales et loco-régionales)

Une LVBP diagnostiquée doit être traitée par SE en cas de PA grave en raison de son risque potentiel et des difficultés chirurgicales.

Une sphinctérotomie est réalisée seule sans cholécystectomie chez les malades à très haut risque opératoire (tares viscérales sévères et/ou âgé avancé).

En dehors de ces cas, la cholécystectomie est réalisée à distance des phénomènes aigus.

» Cholécystectomie laparoscopique (CL)

Quelles stratégies diagnostiques et thérapeutiques ?

Les EES, la CPRE pré ou post CL., l’extraction laparoscopique des calculs de la VBP (ELCVBP) ont été étudiées [2].

Si le risque de LVBP est inférieur à 3 %, la CL doit être pratiquée en premier et la SE en second pour traiter les calculs méconnus.

Si le risque de lithiase est moyen (40 %), l’EES accompagnée d’une SE pré CL (plus faible mortalité) vient en concurrence avec l’ELCVBP moins chère pour une mortalité supérieure.

Si le risque de LVBP est très élevé, supérieur à 80 %, la SE pré CL a un meilleur rapport coût/efficacité.

» SE et CPRE pour le diagnostic et le traitement des complications et des lithiases résiduelles après cholécystectomie laparoscopique (CL)

Le diagnostic et le traitement peuvent être faits en un seul temps grâce au même examen car le tableau est assez caractéristique. Cholestase d’aggravation inexorable, syndrome douloureux associé à une cytolyse. L’opacification permet le diagnostic de fistule biliaire ou de sténose par clips sur le cholédoque. La sphinctérotomie est le traitement de choix de la fistule externe et en cas d’échec, une prothèse est mise en place. En cas de clips sur le cholédoque et d’impossibilité de mettre en place un ballon de dilatation pour lever le clip, le patient doit être réopéré.

En cas de lithiase résiduelle, soit méconnue lors de la CL, soit diagnostiquée, la sphinctérotomie secondaire permet l’extraction endoscopique dans près de 100 % des cas [3].

» Dilatation de la papille pour le traitement des calculs de la VBP chez des patients à risque (âge, cirrhose, diverticule)

Sur une série importante, le succès de la dilatation était de 226/229 cas avec une évacuation de la VBP dans 225 cas. La complication principale de cette technique est la pancréatite aiguë. Elle était présente dans 15 cas (6,6 %). Cette technique a comme avantage de n’entraîner aucune hémorragie et pas de perforation. Il était rapporté également 9 cas d’angiocholite (4 %) et 3 cholécystites (1,8 %) [4].

Une étude prospective multicentrique a confirmé l’importance de la pancréatite et la supériorité de la morbidité en cas d’utilisation de la dilatation de la papille par rapport à la sphinctérotomie et cela de façon significative [5].

La dilatation de la papille ne peut s’adresser qu’à des patients ayant un risque élevé d’hémorragie et porteurs de calculs de petite taille (8 à 10 mm) et peu nombreux, 3 en moyenne.

» Lithotripsie intra-corporelle (LIC) par laser et lithotripsie extra-corporelle (LEC) de calcul biliaire d’extraction difficile

La LEC peut être utilisée en cas de calcul inextirpable après sphinctérotomie et après échec de la lithotripsie mécanique. Dans une série comparant les deux techniques, la LIC a été supérieure et de façon significative à la LEC en terme de succès (97 % versus 73 %), en terme de séance, (1,2 séance versus 3 séances) et en terme de durée du traitement (0,9 jour plus ou moins 2,3 versus 3,9 jours plus ou moins 3,5). En outre, la LIC a permis de traiter la lithiase de la VBP dans 7 cas sur 8 lorsque la LEC a échoué [6].

Prévention des complications

» Peut-on prévoir la pancréatite post-CPRE ? Conférence de consensus janvier 2001

La pancréatite post-CPRE est définie par l’association des critères suivants : à savoir douleurs post CPRE, lipasémie ou amylasémie supérieure à 3 N, hospitalisation et nécessité d’emploi d’antalgique. Il y a plusieurs facteurs de risques.

Facteurs de risques liés au malade :

  • âge jeune
  • voies biliaires fines
  • pas de LVBP
  • syndrome de dyskinésie oddienne (SDO)
  • femme

Facteurs de risques liés à la technique :

  • nombre de canulations
  • nombre d’opacification du Wirsung
  • pression d’injection avec opacification des acinis.
  • précoupe
  • manométrie.

Facteurs liés à l’opérateur :

  • l’expérience diminue de façon significative le taux de PA.

Cependant, la PA post CPRE est imprévisible même en l’absence de tout facteur de risque.

» Peut-on prévenir la pancréatite post CPRE ?

La somatostatine et le gabexate n’ont pas d’intérêt prophylactique chez des patients à haut risque de pancréatite aiguë après CPRE [7]. Une étude prospective a été réalisée comparant la somatostatine, le gabexate et un placebo pour prévenir la survenue d’une pancréatite après CPRE chez des patients à haut risque de pancréatite à savoir porteurs de dyskinésie du sphincter d’Oddi, avec une VBP inférieure à 8 mm ayant eu une pancréatite biliaire antérieure ou une pancréatite post-CPRE et âgés de moins de 35 ans. Il y a eu 25 pancréatites sur 231 patients ayant eu de la somatostatine soit 22,8 %, 20 pancréatites sur 221 patients ayant eu du gabexate soit 9 % et 19 pancréatites sur 223 patients ayant eu du placebo soit 8,6 %.

» L’utilisation de l’endocoupe diminue-t-elle le pourcentage de pancréatites post-sphinctérotomies ?

Dans une étude rapportant de façon rétrospective l’expérience de février 1994 à novembre 1997 avec un bistouri Valley-Lab conventionnel puis avec un bistouri Erbé ICC 200 de novembre 1997 à septembre 2000, il n’a pas été retrouvé de différence significative en matière d’incidence de l’utilisation de l’endocoupe sur la pancréatite post-sphinctérotomie en cas de sténose oddienne bénigne. Par contre, il y avait moins de pancréatite dans le groupe avec prothèse pancréatique [8].

» Les hémorragies post-sphinctérotomies sont diminuées par l’utilisation de l’endocoupe

La même étude historique comparant l’utilisation du bistouri Valley-Lab conventionnel de février 1994 à novembre 1997 et le bistouri Erbé ICC 200 de novembre 97 à septembre 2000 montre une différence significative en matière d’hémorragie digestive immédiate. Avec le bistouri Valley-Lab, 68 hémorragies sont survenues sur 8 392 sphinctérotomies soit 5 % versus 13 hémorragies avec l’utilisation du bistouri Erbé chez 1316 patients soit 1 %. La différence est significative (< 0,001). Par contre, il n’y a pas de différence significative en matière d’hémorragies secondaires qui sont survenues dans 9 cas sur 1 392 sphinctérotomies utilisant le bistouri Valley Lab conventionnel soit 0,6 % versus 9 dans 1 316 cas utilisant le bistouri Erbé soit 0,7 % des cas.

» Faut-il cholécystectomiser les patients après sphinctérotomie ?

Chez les patients âgés, seuls 10 % sont cholécystectomisés après sphinctérotomie mais l’intervention en urgence augmenterait la mortalité. Une étude prospective compare la cholécystectomie secondaire systématique et l’abstention avec surveillance. Dans le groupe abstention, 40 % d’événements sont survenus entraînant 30 % de cholécystectomie chez 18 patients sur 64 composant ce groupe. Cette étude est en cours mais il ne semble pas y avoir de différence entre les deux groupes en matière de qualité de vie. Attendre et voir que survienne un événement pour pratiquer une cholécystectomie semble sans danger [9].

Résection endoscopique des tumeurs adénomateuses de l’ampoule de Vater

Les adénomes de l’ampoule de Vater peuvent être réséqués par ampullectomie endoscopique après un bilan écho-endoscopique préalable. Sur 24 patients diagnostiqués et traités entre 1987 et 1996, 16 sont en rémission endoscopique. Sur 9 qui ont eu des biopsies positives, 2 ont été opérés par duodénopancréatectomie céphalique en raison de récidive adénomateuse en dysplasie moyenne à sévère, 3 sont décédés de causes extra-digestives, 3 sont suivis cliniquement, 1 a refusé la chirurgie [10]. Ce traitement associe une sphinctérotomie endoscopique, une résection à l’anse et une coagulation par laser ou argon et s’avère être une alternative à la duodéno-pancréatectomie céphalique à partir du moment où les patients sont suivis de façon annuelle avec biopsie systématique de la papille.

Traitements endoscopiques des sténoses biliaires bénignes post-cholécystectomie laparoscopique
Les sténoses sont traitées par mise en place de prothèse, changée tous les 4 mois après dilatation au ballonnet, sur une série de 19 patients présentant dans 11 cas, une sténose du canal hépatique commun, dans 5 cas du cholédoque, dans 2 cas du canal hépatique gauche et dans 1 cas du canal hépatique droit. Une dilatation au ballonnet a été réalisée dans 84 % des cas (16 cas). La prothèse est changée tous les 4 mois. La CPRE est normale chez 17 patients à l’ablation de la prothèse sur 19, 1 patient est décédé, sans lien avec la technique, 2 patients ont été opérés (anastomose hépatico-jéjunale). Au total, le résultat est bon chez 16 patients soit dans 80 % des cas après un suivi médical de 27 mois [11].

Traitement endoscopique des sténoses malignes

» Peut-on prévenir les obstructions secondaires des prothèses biliaires par antibioprophylaxie ?

Sur une étude prospective comparant des patients sous norfloxacine à 400 mg par jour et un groupe sous placebo, l’antibiothérapie au long cours ne prévient pas l’obstruction des prothèses. La durée de fonctionnement dans le groupe norfloxacine est de 96 jours plus ou moins 19 et de 106 plus ou moins 14 jours dans le groupe sans antibiotique. Par contre, l’antibioprophylaxie pourrait sélectionner des germes résistants [12].

» Intérêt des orifices latéraux dans la durée de fonctionnement des prothèses biliaires

Les orifices latéraux des prothèses augmentent leur durée de fonctionnement et diminuent les obstructions précoces contrairement à ce qu’auraient pu faire penser des travaux amenant au développement de prothèse en plastique sans orifices latéraux. En fait, ces prothèses ont des problèmes de dysfonctionnement plus rapide. L’extrémité supérieure peut s’impacter dans une voie biliaire intra-hépatique et l’absence d’orifices latéraux empêche son fonctionnement, de même, le contact de l’orifice inférieur de la prothèse avec la paroi duodénale en vis à vis entraîne également un dysfonctionnement. Ces résultats ont été confirmés par une étude comparant des prothèses sans orifices latéraux et avec orifices latéraux. La durée de fonctionnement est de 71,7 jours plus ou moins 6,7 dans le groupe sans orifices latéraux et de 183 plus ou moins 22,7 dans le groupe avec orifices latéraux (p = 0,0002) [13].

» La mise en place de prothèse en plastique dans le traitement des tumeurs du hile est aussi efficace que la mise en place de prothèse métallique

Dans une étude prospective, l’efficacité du drainage à trois mois est de 82,3 % dans le groupe prothèse plastique versus 86,7 % dans le groupe prothèse métallique (sans différence significative) et l’efficacité du drainage à six mois est de 76 % versus 80 %. Le pourcentage de complications est très voisin avec 8 angiocholites dans le groupe plastique. L’utilisation de prothèses 7 french et 10 french est peut-être à l’origine de ce taux élevé d’angiocholite [14].

» Les prothèses métalliques versus les prothèses métalliques non couvertes

L’efficacité et le taux de complications sont identiques. Dans une étude prospective multicentrique, l’efficacité des prothèses non couvertes ou wallstent Boston était à trois mois de 92,6 %, à 6 mois de 64,3 % et à 9 mois de 50 %. Les prothèses couvertes Tae Woong avaient une efficacité de 87,9 % à trois mois, de 76,2 % à 6 mois et de 57,9 % à 9 mois. Il n’y a pas de différence significative en matière d’efficacité à trois ni à six mois. Il y a eu une complication avec les prothèses non couvertes à savoir une pancréatite et trois complications dans le groupe prothèse couverte à savoir une pancréatite, une cholécystite et une migration [15].

» Comparaison du traitement palliatif du cancer de l’ampoule de Vater par prothèse métallique et chirurgie palliative

Il n’y a pas de différence significative en faveur de la chirurgie pour le traitement palliatif de l’ampullome. Dans une série comparant les prothèses et la chirurgie, la survie médiane en mois est de 9 mois dans le groupe prothèse et de 13 mois dans le groupe chirurgie (NS).
La survie à 5 ans est de 7 % dans le groupe prothèse et de 17 % dans le groupe chirurgie (p > 0,05) [16].

» Les prothèses biliaires doivent être privilégiées dans le traitement palliatif des cancers bilio-pancréatiques

Trois études prospectives randomisées ont comparé des prothèses plastiques de 7 et 10 french à une simple ou double dérivation chirurgicale. Dans tous les cas, le pourcentage du succès de la mise en place des prothèses est identique au pourcentage de succès des dérivations chirurgicales avec une survie médiane voisine de 3 à 6 mois. Par contre, la mortalité chirurgicale est le double de la mortalité du traitement endoscopique avec une durée d’hospitalisation qui est double dans une série de Sheperd.

» L’association adio-endoscopique permet d’augmenter le succès du drainage palliatif des cancers du pancréas

Chez 116 patients porteurs de cancers du pancréas, le pourcentage de succès de mise en place de prothèse par voie endoscopique était de 82 % (95 cas). Les patients non drainés n’ont pas eu de geste complémentaire dans 4 cas et ont eu un traitement chirurgical dans 2 cas. Les autres patients ont bénéficié d’un drainage par mise en place de prothèse par voie radiologique [12], d’un drainage interne externe [1] ou d’un drainage externe [2]. 97 % des patients ont donc été traités de façon efficace par l’association radio-endoscopique [17].

Prothèses duodénales métalliques et sténoses duodénales malignes

La mise en place de prothèses métalliques a permis le traitement des sténoses duodénales malignes survenant secondairement chez les patients ayant eu un drainage endoscopique par prothèse biliaire. Chez 17 patients ayant une sténose duodénale maligne, l’alimentation orale a été maintenue chez 15 sur 17 soit dans 88 % des cas et il est survenu deux obstructions secondaires traitées par une nouvelle prothèse dans 1 cas et la deuxième est survenue peu avant le décès. Les patients présentant une double sténose bilio-digestive lors de la prise en charge par voie endoscopique peuvent bénéficier d’une double dérivation chirurgicale. Les prothèses métalliques expansives duodénales s’adressent essentiellement au patient porteur d’une endo-prothèse biliaire et qui développe une sténose duodénale secondaire [18].

Traitement de la sténose oddienne bénigne ou dysfonctionnement du sphincter d’Oddi

L’injection de toxine botulique dans le sphincter d’Oddi est une technique sans danger qui permet d’obtenir une diminution transitoire des troubles et prédire l’efficacité d’une sphinctérotomie dans les sténoses oddiennes bénignes de type 3.

Dans une étude de 22 patients porteurs d’une sténose bénigne de type 3, manométriquement prouvée et cholécystectomisés, une injection de 100 Mouse Units (1 ml) a été pratiquée dans le sphincter oddien. Chez 12 patients asymptomatiques après injection, il y a eu 11 récidives qui ont été traitées par sphinctérotomie endoscopique. Six mois après le traitement, ces patients sont asymptomatiques. Dans l’autre groupe comprenant dix patients toujours symptomatiques après injection de toxine bucolique, 2 sur les 5 patients ayant une pression sphinctérienne supérieure à 40 sont asymptomatiques après sphinctérotomie. 5 patients qui ont une pression sphinctérienne normale sont toujours symptomatiques après sphinctérotomie. Au total, il s’agit d’une technique sans danger puisqu’une seule pancréatite démateuse (4,5 %) est survenue après injection du sphincter. Elle permet d’obtenir une diminution transitoire des troubles qui récidivent au bout de quelques mois. Les patients devenus asymptomatiques après injection de toxine botulique peuvent être traités avec efficacité par sphinctérotomie endoscopique. Ceux qui restent symptomatiques après injection de toxine botulique semblent être de mauvais cas pour la pratique d’une sphinctérotomie endoscopique [19].

Enfin une seconde étude a montré que les patients ayant une pression initiale de base élevée répondent longuement et favorablement à une sphinctérotomie endoscopique biliaire [20].

Traitement des pathologies pancréatiques

La CPRE associée à la lithotripsie extra-corporelle permet de diminuer les douleurs et la nécessité de la chirurgie en cas de calcul pancréatique. 40 patients ont été traités de cette façon avec 46 séances de lithotripsie extra-corporelle et 89 CPRE. 11 sur 40 avaient des calculs uniques, 29 sur 40 des calculs multiples, 19 avaient une ou plusieurs sténoses, 7 une ou plusieurs fistules pancréatiques et 9 des pseudokystes. Les complications étaient de 7,7 % : une pancréatite, une complication infectieuse et une hémorragie. Les 28 patients suivis (4 décédés de cause extra-digestive et 8 opérés) ont eu une diminution des douleurs, 2,4 en baisse par rapport à 6,9 (p = 0,001). Une réadmission pour pancréatite (0,9 pour 3,4 avant traitement) (p = 0,01) et une diminution de l’utilisation des narcotiques (p = 0,03). 80 % des patients ont évité la chirurgie [21].

Le traitement endoscopique de la dystrophie kystique de la paroi abdominale est possible par voie endoscopique. Il s’agit d’une ouverture au bistouri diathermique. Chez des patients traités de cette façon, il y a une disparition immédiate de la douleur chez 9 patients dont 4 transitoires nécessitant 2 reprises endoscopiques et 2 dérivations chirurgicales [22].

Plusieurs séries ont rapporté le traitement endoscopique de la pancréatique chronique calcifiante avec une amélioration immédiate des douleurs allant de 74 à 100 %. L’amélioration à long terme de la douleur est de 24 à 95 % avec une morbidité de 39 à 6,5 %.

Association radio-endoscopique

» En cas d’échec de sphinctérotomie endoscopique

La sphinctérotomie endoscopique standard a un succès de 85,2 % (458 sur 538 patients de ma série personnelle non publiée). En cas d’échec, on fait appel à la sphinctérotomie montée sur fil guide dans 1,3 % des cas (8 patients) et à la ponction diathermique de l’infundibulum biliaire dans 8,11 % des cas (64 patients). Les rares échecs sont traités par mise en place d’un guide par voie percutanée dans 1,3 % des cas (7 patients). Cela permet d’obtenir un succès de la sphinctérotomie endoscopique dans 99,3 % des cas (534 patients sur 538).

» Traitement percutané des calculs de la VBP ou des voies biliaires intra-hépatiques inextirpables par voie endoscopique

L’extraction conventionnelle des calculs est possible dans 95,1 % des cas (508 fois sur 534 patients).
En cas d’échec, on utilise la lithotripsie mécanique dans 1,5 % des cas (8 patients) et la lithotripsie électrohydraulique dans 2,6 % des cas (14 patients). La lithotripsie électrohydraulique a été pratiquée par voie percutanée dans 5 cas. Un drainage percutané est mis en place au préalable. Il est remplacé par une gaine percutanée permettant l’introduction d’un cholangioscope et une lithotripsie électrohydraulique sous contrôle de la vue.

Dans 5 cas, la lithotripsie électrohydraulique a été effectuée par l’orifice de sphinctérotomie, une fois à l’aveugle dans le cholédoque et 3 fois par une anastomose cholédoco-duodénale. Il n’a jamais été effectué avec succès de lithotripsie électrohydraulique par utilisation de babyscope monté dans un duodénoscope passé par voie orale. L’ensemble de ces techniques de lithotripsie mécanique ou électrohydraulique par voie endoscopique ou par voie percutanée permet d’obtenir un succès d’extraction des calculs dans 99,2 % des cas soit chez 530 patients sur 534.

» En cas d’échec de mise en place des prothèses par voie endoscopique

Comme il a été dit dans le paragraphe des sténoses malignes, les échecs de mise en place de prothèse par voie endoscopique sont traités par mise en place de prothèse par voie percutanée.
La pratique de l’endoscopie interventionnelle des voies biliaires et pancréatiques implique le travail en équipe avec des radiologues interventionnels capables de mettre en place des drainages percutanés pour une sphinctérotomie endoscopique guidée, pour traitement par lithotripsie électrohydraulique par voie percutanée des calculs inextirpables par voie endoscopique, pour mise en place de prothèse biliaire par voie percutanée en cas d’échec de mise en place des prothèses par voie endoscopique.

Avantage des instruments réutilisables pour la sphinctérotomie endoscopique en matière de durabilité et de sécurité infectieuse

Dans une série de 230 patients, 7 avaient une septicémie, 6 étaient VHC+, 1 VHB+, 2 VIH+ lors du geste. Le nombre médian d’utilisations était de 13 fois pour le sphinctérotome KD5Q, de 5 fois pour le sphinctérotomie KD6G2Q et de 12 fois pour les dormia. Les recherches virologiques et bactériologiques sur les instruments étaient toutes négatives témoignant de l’absence de risque de transmission infectieux lors de l’utilisation d’instrument réutilisable et stérilisé [23]. Le coût attractif de l’autoclavable par rapport à l’usage unique n’a pas été quantifié. Dans une série multicentrique prospective comparant l’usage unique à l’autoclavable, il a été démontré que le coût de l’usage unique par patient était significativement supérieur au coût de l’autoclavable par patient [24].

Résumé

La sphinctérotomie endoscopique permet le traitement de la voie biliaire principale en cas de lithiase résiduelle (cholécystectomisé), en cas de lithiase cholédocienne sans lithiase vésiculaire, et en cas de lithiase cholédocienne et vésiculaire chez le patient à haut risque, avant ou après une cholécystectomie laparoscopique. Dans les pancréatites aiguës graves, elle est pratiquée dans les 72 heures en cas d’angiocholite et/ou d’ictère obstructif, avant ou après cholécystectomie par laparoscopie après diagnostic par écho-endoscopie ou seule (sans cholécystectomie) en cas de très haut risque opératoire.

La pancréatite aiguë après CPRE est imprévisible mais plus fréquente chez la jeune femme à voie biliaire principale fine sans calcul avec une SOB.

La somatostatine et le gabexate n’ont pas d’intérêt dans la prophylaxie de la pancréatite aiguë après CPRE.

L’endocoupe n’entraîne pas de pancréatite mais diminue les hémorragies immédiates au cours des SE.

La cholécystectomie après SE peut être réalisée uniquement si la vésicule devient symptomatique.

L’ampullectomie endoscopique permet le traitement radical des adénomes en dysplasie moyenne à sévère de l’ampoule de Vater.

Les prothèses plastiques permettent le traitement des sténoses bénignes post-chirurgicales de la VBP.

L’antibioprophylaxie au long cours ne prévient pas l’obstruction des prothèses et les orifices latéraux augmentent la durée de fonctionnement.

Les prothèses plastiques sont équivalentes aux prothèses métalliques au niveau du hile.

Les prothèses couvertes valent les prothèses non couvertes.

L’endoscopie fait mieux que la chirurgie en matière de traitement palliatif des cancers bilio-pancréatiques.

L’association radio-endoscopique permet de drainer avec succès pratiquement 100 % des cancers sous hilaires.

Les prothèses duodénales sont indiquées dans les sténoses duodénales survenant chez un patient porteur d’une prothèse biliaire.

Les SOB existent et peuvent être traitées avec succès et durablement par SE.

Les calculs du pancréas et les dystrophies kystiques de la paroi abdominale sont accessibles à un traitement endoscopique.

L’association radio-endoscopique est nécessaire en cas d’échec de la sphinctérotomie endoscopique, pour le traitement percutané des calculs de la VBP ou des voies biliaires intra-hépatiques inextirpables par voie endoscopique et en cas d’échec de mise en place des prothèses par voie endoscopique.

Les instruments auto-clavables et réutilisables pour la sphinctérotomie endoscopique sont supérieurs à l’usage unique en matière de durabilité avec la même sécurité sur le plan infectieux.

Conclusion

Formidable outil thérapeutique depuis 30 ans, la sphinctérotomie oddienne permet le traitement de 99 % des calculs de la VBP (précoupe, sphinctérotomie sur fil guide transpapillaire ou percutané, lithotripsie mécanique et électrohydraulique per-orale ou percutanée). Elle permet également le traitement des SOB, des fistules biliaires.

Véritable révolution depuis 20 ans, les prothèses permettent le traitement curatif des sténoses bénignes et des fistules, le traitement palliatif des cancers bilio-pancréatiques (plastique, métallique, couverte et non couverte, duodénal) avec 98 % de succès de drainage en associant la radiologie interventionnelle.

RÉFÉRENCES

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