Hépatites auto-immunes : actualités

Les hépatites autoimmunes (HAI) sont un groupe sans doute hétérogène de maladies de cause(s) inconnue(s), caractérisées par des lésions hépato-cytaires nécrotico-inflammatoires, la présence d’auto-anticorps particuliers et une grande sensibilité au traitement corticoïde. Cette courte mise au point vise à préciser les éléments essentiels du diagnostic (notamment en dehors de la présence d’auto-anticorps ) et du traitement (particulièrement les condi-tions d’arrêt).

Diagnostic

» Caractéristiques cliniques [1, 2]

La prévalence des HAI est estimée entre 0,1 et 1,2 cas pour 100 000 personnes dans les pays occidentaux. Dans en-viron 25 % des cas, le mode de révé-lation est aigu et il existe même de rares cas sous forme d’hépatite fulmi-nante ou subfulminante. Néanmoins, dans la grande majorité des cas, le syn-drome clinique est celui d’une hépatite chronique pouvant se manifester par une fatigue et plus rarement par un ictère ou le bilan d’un syndrome dys-immunitaire. La révélation peut être plus tardive, au stade de cirrhose, avec la mise en évidence d’une hépatomé-galie, de signes d’insuffisance hépato-cellulaire chronique ou d’une hyper-tension portale La mise en évidence peut s’effectuer encore plus tardive-ment au stade des complications de la cirrhose. Dans 15 à 50 % des cas, des manifestations extra-hépatiques de na-ture autoimmune sont associées (Tableau I).

TABLEAU I
PRINCIPALES MALADIES AUTOIMMUNES ASSOCIÉES AUX HAI [d'après 1]

Fréquentes

Atteinte thyroïdienne autoimmune
Colite ulcéreuse
Arthrites
Syndrome sec

Plus rares

Polyarthrite rhumatoïde
Lichen plan
Diabète
Purpura thrombopénique autoimmun
Anémie hémolytique
Vitiligo

 

» Caractéristiques biologiques [1, 2]

Comme dans toute hépatite, il existe une augmentation de l’activité des transaminases (d’intensité très variable) et parfois de la bilirubinémie. Un élé-ment plus précis d’orientation est l’aug-mentation (très fréquente mais non constante) de la concentration sérique des gammaglobulines, en particulier de type IgG. Le signe biologique es-sentiel est toutefois la présence d’auto-anticorps [3]. Ceux-ci sont recherchés habituellement par immunofluores-cence indirecte. Pour les adultes, il s’agit essentiellement des anticorps anti-noyaux, anti-muscles lisses et moins souvent anti-microsomes de type 1 (anti-LKM1) et anti-cytosol (anti-LC). Les deux premiers anticorps sont souvent associés. Les anticorps anti-LKM1 sont plus souvent retrouvés chez l’enfant ou l’adulte jeune. Il est important de noter que l’IFI est une technique non automatisable, néces-sitant une grande expérience. Chez l’adulte, le seuil de positivité est de 1/80 pour les AAN et AML et de 1/40 pour les anti-mitochondries, les anti-LKM et les anti-LC. En seconde inten-tion, des techniques complémentaires (Western blot, Dot blot, Elisa) peuvent être utilisées pour mieux caractériser ces anticorps ou détecter d’autres auto-anticorps, anti SLA (Soluble Liver Antigen) en particulier. Les autoanti-corps anti-cytoplasme de polynucléaire neutrophile (p-ANCA) sont recherchés par IFI sur polynucléaire (seuil de positivité au 1/20). Enfin, il existe des marqueurs immunogénétiques, en particulier la présence de l’haplotype HLA B8 DR3 (DRB1*0301) ou DR4 (DRB1*0401) mais qui ne sont pas demandés en première intention.

» Caractéristiques histologiques

Bien qu’il n’existe pas de signes his-tologiques spécifiques, la réalisation d’une ponction-biopsie hépatique est recommandée [1]. Les HAI sont ca-ractérisées par des lésions nécrotico-inflammatoires à prédominance péri-portale (piece-meal necrosis) d’intensité souvent marquée. Cette nécrose peut être en pont ou panlobulaire. L’exis-tence de formes à nette prédominance centrolobulaire doit être connue [4]. L’infiltrat inflammatoire est lympho-plasmocytaire. Des signes de régéné-ration et de désorganisation des tra-vées hépatocytaires, en particulier sous forme de « rosettes », peuvent être pré-sents [5]. En outre, l’examen histolo-gique apprécie l’importance de la fi-brose, (une cirrhose peut être présente dès la première biopsie), et contribue à éliminer d’autres causes ou, au contraire, à suggérer l’existence d’une autre hépatopathie (éventuellement associée dans le cadre d’un overlap syndrome).

Histoire naturelle et pronostic

Il est important de noter que l’évolu-tion est fluctuante et en conséquence, une amélioration biologique spontanée peut être observée transitoirement. Globalement, le pronostic à long terme dépend largement des degrés d’in-flammation et de fibrose. Lorsque l’augmentation des transaminases est de l’ordre de 5 à 10 fois la limite de la normale et que les gammaglobulines sériques sont à 2 fois la normale ou plus, la mortalité sans traitement est de l’ordre de 90 % à 10 ans [6]. Une cir-rhose survient en 5 ans dans environ 20 % des cas lorsqu’il existe une simple inflammation péri-portale et dans en-viron 80 % des cas lorsqu’il existe une nécrose en pont ou une nécrose lobu-laire. En cas de cirrhose, le risque de mortalité spontanée est d’environ 60 % en 5 ans. Cependant, même au stade de cirrhose, l’HAI reste très sensible au traitement corticoïde, et le pronostic sous traitement (à condition que la cirrhose ne soit pas décompensée) est comparable à celui des formes sans cirrhose [7]). L’évolution de l’HAI est aussi influencée par les facteurs im-munogénétiques. La présence de HLA B8 est associée à une plus grande sévérité dans le degré d’inflammation à la découverte diagnostique et à un plus grand risque de rechute après trai-tement [8]). Les patients avec HLA DR3 ont une plus faible probabilité de ré-mission sous traitement et des rechutes plus fréquentes. Ils constituent plus souvent des indications de transplan-tation hépatique. Le type HLA DR4 constitue un groupe caractérisé par un âge plus élevé et un meilleur pronostic.

 

Diagnostic des hépatites autoimmunes

La démarche diagnostique ne se résume pas à la recherche d’auto-anticorps.

L’absence de critères totalement spé-cifiques rend nécessaire l’utilisation de critères diagnostiques négatifs. Le dia-gnostic d’HAI est donc en grande partie un diagnostic d’exclusion.

 

» Critères diagnostiques négatifs [1, 2]

Il s’agit d’une étape capitale dans la démarche diagnostique. En fonction de la présentation (aiguë ou chronique, peu ou très cholestatique), il convient donc d’éliminer les diagnostics indiqués dans le tableau II. Dans les formes cholestatiques, il faut en particulier réaliser une cholangio-IRM (en l’ab-sence d’anticorps anti-mitochondries).


TABLEAU II
DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL DES HAI

Révélation sous forme d'hépatite chronique

Hépatite B
Hépatite B et D
Hépatite C
Stéato-Hépatite (NASH)
Hépatites médicamenteuses
Maladie de Wilson
Hémochromatose
Déficit en alpha-antitrypsine
Alcoolisme chronique
Cirrhose biliaire primitive
Cholangite sclérosante

Révélation sous forme d'hépatite aiguë

Hépatite A
Hépatite B, B-D
Hépatite C
Hépatite E
Virus d'Epstein-Barr
Virus herpès simplex
Cytomégalovirus
Hépatites médicamenteuses
Maladie de Wilson

 

» Critères diagnostiques positifs [1, 2]

Comme indiqué précédemment, devant une hépatite, il existe plusieurs critères cliniques, biologiques, immunologiques ou histologiques en faveur d’une HAI. Individuellement, aucun n’est spéci-fique. Cependant, pris collectivement, ils ont une très forte valeur prédictive positive pour le diagnostic. Ces cri-tères sont le sexe féminin qui est très prédominant, une élévation des IGG dépassant 2 fois la limite supérieure de la normale, la présence d’auto-anticorps, l’existence d’une hépatite histologique d’intensité marquée avec un infiltrat lympho-plasmocytaire. Un haplotype HLA B8 DR3 ou DR4, l’association à d’autres manifestations autoimmunes et des antécédents fami-liaux de maladie autoimmune renfor-cent la suspicion diagnostique.

 

» Score diagnostique d’hépatite autoimmune

En 1992, un groupe international (International Autoimmune Hepatitis Group, [IAIHG]) a établi un score dans un but de recherche pour uniformiser les critères diagnostiques dans les fu-tures études contrôlées [9]. Ce score comporte des critères négatifs (dia-gnostics à éliminer) et des critères po-sitifs. De plus, il tient compte de la sensibilité aux corticoïdes, de sorte qu’il existe un score avant traitement, mais également un score après traite-ment, et même éventuellement après rechute en cas d’arrêt du traitement, qui est un argument important en fa-veur d’HAI. Chacun des paramètres est affecté d’un score. Le score total donne une évaluation sur la probabilité du diagnostic d’HAI. Le diagnostic est considéré comme certain lorsque le score total est supérieur à 15 avant traitement et à 17 après traitement ; il est probable pour un score compris entre 10 et 15 avant traitement et entre 12 et 17 après traitement. Une deuxième version du score de l’IAIHG ayant pour but d’augmenter sa spéci-ficité a été publiée en 1999 [10] (Tableau III). La sensibilité globale du score diagnostique de certitude ou de forte probabilité d’HAI est d’environ 90 %. Cependant sa sensibilité pour le diagnostic des formes mixtes HAI-ma-ladies cholestatiques est faible (voir plus bas). En outre, son utilisation est malaisée car il comprend de nombreux items qui sont très rarement déterminés dans leur totalité en pratique courante, ce qui peut conduire à utiliser un lan-gage faussement commun.
 

TABLEAU III
SCORE MODIFIÉ DE L'IAIHG (1999)
Sexe
masculin
féminin + 2 1/80 + 2
M. auto-immune associée (1) Prise de médicament (2) + 2 1/40 < 1/40 + 1 0
oui 4 Anticorps anti-mitochondries + 4
non + 1
Histologie :
Alcool nécrose parcellaire + 3
> 60 g/j 2 infil. lympho-plasmocytaire + 1
< 25 g/j + 2 rosettes + 1
Marqueurs viraux (3) absents + 3 aucun de ces signes « signes biliaires » (6) autres signes (7) 5 3 3
positifs ?-globulines 3 Autres marqueurs (8) autre autoanticorps + 2
> 20 g/l + 3 HLA DR3 ou DR4 + 1
15-20 g/l + 2
10-15 g/l + 1 Diagnostic : CERTAIN : > 15
< 10 g/l 0 PROBABLE : 10 à 15
Pal/ALAT ou ASAT (4) Traitement (9)
< 1,5 N + 2 réponse complète + 2
1,5-3 N 0 rechute à l'arrêt + 3
> 3 N

0 > 1/80 + 3

2

Auto-Ac (AAN, AML, ALKM) (5)

Diagnostic : CERTAIN : > 17
PROBABLE : 12 à 17

Notes explicatives
1. Présence d’une autre maladie autoimmune chez le patient ou chez un parent du premier degré (voir tableau I).
2. Prise récente ou en cours d’un médicament connu comme étant hépatotoxique.
3. Marqueurs des virus A, B, et C. En cas de doute, les marqueurs des virus EBV et CMV doivent être réalisés.
4. PAL et transaminases ALAT ou ASAT exprimées en multiples de la valeur supérieure de la normale.
5. Titres déterminés par immunofluorescence indirecte sur coupes tissulaires de rongeurs, ou sur cellules Hep2 pour les AAN.
6. « Signes biliaires » : signes évidents de CSP ou de CBP, prolifération néoductulaire, cholangiolite ou dépôts de cuivre.
7. Autre marqueur histologique évoquant une autre étiologie que l’HAI.
8. Les points pour la présence d’un autre autoanticorps connu pour être associé à l’HAI (2 points) ou celle du marqueur HLA-DR3 ou DR4 (si ce marqueur est disponible) (1 point) ne sont attribués qu’en cas de négativité des auto-anticorps conventionnels. Ces anticorps comportent les pANCA, anti-LC1, anti-SLA, anti-asialoglycoprotéines, anti-LP et anti-sulfatide. Un point peut être attribué pour un autre groupe HLA de classe II connu comme étant associé à l’HAI dans des ethnies particulières.
9. Réponse au traitement
. • Complète : l’un ou les 2 paramètres suivants : Amélioration des signes cliniques et normalisation des transaminases, des g-globulines, et de la bilirubine, dans l’année suivant la mise en route du traitement, et durant au moins 6 mois sous traitement, ou biopsie hépatique montrant, pendant cette période, une ac-tivité histologique minime ou l’un ou les 2 paramètres suivants : amélioration des signes cliniques et amé-lioration d’au moins 50 % des marqueurs biologiques, avec des transaminases continuant à baisser au-dessous de 2 fois la limite supérieure de la normale dans les 6 mois, ou biopsie hépatique montrant, dans l’année, une activité histologique minime.
. • Rechute : l’un ou les 2 paramètres suivants : augmentation des transaminases au-dessus de 2 fois la limite supérieure de la normale, ou biopsie hépatique montrant des signes d’activité histologique, avec ou sans réapparition de signes cliniques, après une réponse complète définie comme ci-dessus, ou réappa-rition des signes cliniques suffisante pour obliger à réintroduire le traitement, accompagnée d’une réaugmentation quelconque des transaminases, après une réponse complète définie comme ci-dessus.

 

Classification des hépatites autoimmunes [1-3]

Celle-ci repose de façon pratique mais un peu artificielle sur la présence des auto-anticorps détectés dans le sérum.

» HAI de type 1

L’HAI-1 est caractérisée par la présence d’AAN (40-60 %) et surtout d’AML(> 80 %). Cependant, les AAN sont les anti-tissus les moins spécifiques et peuvent être présents dans de nombreuses situations : CBP, hépatites virales ou médicamenteuses, hépatopathies alcooliques, NASH… La spécificité des AML est meilleure sous réserve de leur
caractérisation en anti-actine [1]) (IFI sur cellules HEp-2 traitées à la colchicine) qui, toutefois, peut être observée au cours d’hépatites virales ou médicamenteuses. Le type anti-vimentine est par contre peu spécifique (hépatites virales, maladies de système…). En association avec ces anticorps, des anti p-ANCA sont décrits dans 1/3 des cas et des anti-SLA dans 10-15 %.

» HAI de type 2

L’HAI-2 est caractérisée par la présence de 2 marqueurs plus spécifiques, les anti-LKM1 et les anti-LC1. Le titre de ces anticorps peut baisser (voire se né-gativer) sous traitement. Les anti-LKM1 sont observés dans les HAI-2 et les hé-patites chroniques C. La cible antigé-nique est le cytochrome P450 2 D6 (CYP2D6) qui a une homologie avec certains constituants du VHC. Cepen-dant, les séquences peptidiques re-connues sur la même molécule de CYP2D6 au cours des HAI-2 et des hé-patites C sont différentes [12]. La re-cherche des anti-LC1 est de pratique plus récente. Ils peuvent être soit associés aux anti-LKM1 (30 %), soit isolés (10 % des HAI-2) [13]. Leur cible est la formiminotransferase cyclo-désaminase [14]. Ils ne sont pas tota-lement spécifiques de l’HAI-2 mais ne sont présents qu’exceptionnellement au cours des hépatites C.

 

» HAI de type 3

L’HAI-3 est caractérisée par la présence d’anti-SLA, encore appelés anti-SLA/LP [15] détectés par une technique de type Elisa complexe. En fait, l’individualisation de ce type d’HAI est très discutée car celle-ci apparaît peu différente de l’HAI-1. Le principal intérêt de la recherche des anti-SLA est d’aider au diagnostic des patients séronégatifs pour les autres auto-anticorps puisqu’ils sont retrouvés dans 20 % des hépatites « cryptogénétiques » qu’ils permettent de reclasser en HAI [16].

» Difficultés dans l’interprétation de la présence d’auto-anticorps

Comme déjà souligné, aucun anticorps n’est totalement spécifique d’une ma-ladie. Du fait de la prévalence de l’hé-patite C, celle-ci est la cause la plus fréquente de positivité des anti-tissus.
En effet, des auto-anticorps à un titre significatif sont présents au cours de l’hépatite chronique C dans environ 10 % des cas pour les AAN et les AML, 3 % pour les anti-LKM1, 1 % pour les anti-M2, 0,4 % pour les anti-LC1 et ex-ceptionnellement pour les anti-actine. Fait important, la présence isolée de ces auto-anticorps n’est plus consi-dérée comme une contre indication au traitement antiviral (interféron-riba-virine) [2].

» Autres formes d’hépatite autoimmune

HAI « SÉRONÉGATIVES »

Dans un pourcentage de cas difficile à préciser, des patients ont les critères diagnostiques d’une HAI, mais sans auto-anticorps identifiés [1, 2]. Ces formes d’HAI s’apparentent aux HAI de type 1 avec une bonne réponse au traitement immunosuppresseur. Cela indique qu’il existe très probablement d’autres formes d’HAI dont les auto-anticorps ne sont pas encore caractérisés.

FORMES MIXTES OU « OVERLAP SYNDROMES »

Il existe des formes associant HAI et maladies cholestatiques autoimmunes. En effet, une HAI peut précéder, ac-compagner ou compliquer l’évolution d’une cirrhose biliaire primitive (CBP) ou d’une cholangite sclérosante pri-mitive (CSP). Le diagnostic en est par-ticulièrement difficile. L’utilisation du score de l’IAIHG est biaisée par le fait qu’il a été conçu à l’origine pour dif-férencier HAI et maladies cholesta-tiques en tenant compte de manière négative des signes de lésions biliaires. Il ne peut donc pas raisonnablement être préconisé dans le diagnostic d’overlap syndrome car ne permet de diagnostiquer que les formes carica-turales [17]. En pratique, en cas de ma-ladie cholestatique, les signes devant faire suspecter une HAI associée sont : 1) une élévation de l’activité des trans-aminases supérieure à 5 N, 2) une élé-vation des IgG supérieure à 2 N ou la présence d’anti-muscles lisses de spé-cificité anti-actine, 3) des lésions in-flammatoires périportales et lobulaires marquées. Le diagnostic d’overlap syn-drome CBP ou CSP/HAI peut être retenu lorsqu’au moins 2 des critères de CBP ou CSP et 2 des critères de HAI sont présents [18]. Sa prévalence est d’environ 10% dans les CBP. Un trai-tement combiné acide ursodésoxy-cholique-corticoïdes apparaît le plus souvent nécessaire [18, 19].

 

Diagnostic des hépatites autoimmunes en pratique

En pratique clinique, la recherche des auto-anticorps occupe une place im-portante mais non exclusive et il n’est pas nécessaire de recourir systémati-quement au score de l’IAIHG. Devant une augmentation de l’activité des transaminases, les éléments essentiels en faveur du diagnostic d’HAI sont in-diqués dans le tableau IV. Si les élé-ments recueillis n’emportent pas la conviction (formes atypiques), le score de l’IAIHG doit être utilisé [20] sauf en cas de suspicion d’association à une CBP ou une CSP (voir paragraphe pré-cédent).

 

TABLEAU IV
ARGUMENTS ESSENTIELS EN FAVEUR D'UNE HAI DEVANT UNE AUGMENTATION DE L'ACTIVITÉ DES TRANSAMINASES
Absence d'autre cause
Présence d'auto-anticorps à un taux signi-ficatif Gammaglobulines ou IgG > 1,5 N
Hépatite d'interface à la ponction biopsie hépatique

 

Traitement

Le traitement de l’HAI repose sur l’ad-ministration d’immunosuppresseurs. Ce traitement permet d’obtenir dans 80 % des cas une rémission clinique et biologique associée à une diminution significative des lésions histologiques nécrotico-inflammatoires. Le traitement diminue de façon majeure la mortalité des formes très actives (de 70 % à 10 % à 10 ans) et une régres-sion partielle de la fibrose peut égale-ment être observée.
La Société Américaine d’Hépatologie (AASLD) a récemment élaboré des re-commandations de pratique clinique [20]. Le traitement de l’HAI peut donc sembler efficace et codifié. En réalité, les effets secondaires du traitement sont nombreux et il persiste de nom-breuses incertitudes sur ses indications et les modalités pratiques, notamment sur sa durée. En effet, les études contrô-lées n’ont concerné que des maladies sévères, les schémas thérapeutiques utilisés en France diffèrent habituel-lement de ceux proposés par les auteurs anglo-saxons et le risque de re-chute est élevé à l’arrêt du traitement. Enfin, la place des nouveaux immu-nosuppresseurs n’est pas encore bien établie.
Seul le traitement médical (n’incluant pas la prévention des effets secon-daires) des HAI de l’adulte sera considéré.

Indications

Les indications du traitement selon l’AASLD sont détaillées dans le tableau V. Les indications dites « absolues » correspondent aux patients inclus dans les 3 grands essais thérapeutiques historiques menés dans les années 1960-70 (Royal Free Hospital [21, 22], Mayo Clinic [6, 23] et King’s College Hospital [24]), et ayant montré l’effet bénéfique majeur du traitement. Dans les formes moins sévères, en particulier celles caractérisées par une activité des transaminases peu élevée, les indications sont moins claires car l’histoire naturelle de ces formes est très mal connue, d’autant plus que les rares séries publiées comportaient très probablement des hépatites chroniques C.

TABLEAU V
INDICATIONS DU TRAITEMENT (recommandations de l'AASLD, [20].

Absolues Relatives

Transaminases >= 10 N
ou
Transaminases >= 5 N et
Gamma globulines >= 2 N
ou
Nécrose en pont ou multilobulaire

Symptômes (fatigue, arthralgies, ictère)

Augmentation Transaminases et/ou Gamma globulines moindre que dans les critères absolus

Hépatite d'interface.

Les auteurs favorables au traitement [25] soulignent la mauvaise corréla-tion entre la biologie et l’histologie (hépatite histologiquement active avec transaminases normales ou peu éle-vées), le caractère spontanément fluc-tuant de l’HAI (rémission spontanée souvent suivie d’une aggravation («flare-up ») pouvant être méconnue) et le pourcentage élevé de cirrhose (environ 1/3) au moment du diagnostic d’HAI suggérant que ces patients asymptomatiques auraient très proba-blement bénéficié d’un traitement institué précocement.

Pour d’autres, le rapport bénéfice/risque du traitement est incertain en raison de la fréquence des effets secondaires (corticothérapie en particulier) si bien que, pour eux, l’abstention thérapeutique est recommandée notamment chez les patients ayant une ostéoporose, une hypertension artérielle mal contrôlée ou une pathologie psychiatrique, c’est-à-dire à risque élevé de développer une complication du traitement.

En pratique, l’association d’une augmentation de l’activité des transaminases supérieure à 2 N et d’une hépatite d’interface d’activité intermédiaire ou sévère fait habituellement indiquer le traitement [2]. Par contre, une cirrhose inactive ne constitue pas une indication pour la plupart des auteurs.

 

» Modalités du traitement

MODALITÉS CLASSIQUES (AASLD)

Traitement initial

Le but du traitement initial est la mise en rémission de la maladie. Les définitions des réponses au traitement initial sont indiquées dans le tableau VI. Il est intéressant de noter que ces définitions ne sont malheureusement pas strictement les mêmes que celles utilisées dans le score de l’IAIHG et que l’évolution de la fibrose n’a pas été prise comme critère de jugement. Les grands essais thérapeutiques déjà cités, en particulier ceux de la Mayo Clinic [6, 23], ont permis d’établir que le traitement d’attaque doit être basé sur les corticoïdes. Prednisone ou prednisolone peuvent être utilisées. En effet, la métabolisation de la prednisone en prednisolone n’est pas significativement modifiée au cours des cirrhoses. Deux modalités de traitement sont possibles, soit corticoïdes en monothérapie, soit association corticoïdes-azathioprine (Tableau VII). A dose égale, l’efficacité des corticoïdes est considérablement renforcée par l’adjonction d’azathioprine. Cette association permet donc d’utiliser une dose moindre de corticoïdes et ainsi de limiter leurs effets secondaires. Par conséquent, la plupart des auteurs recommande le traitement combiné sauf en cas de cytopénie, de déficit en thiopurine méthyl transferase (enzyme du métabolisme de l’azathioprine), de grossesse ou de pathologie cancéreuse. Alors que les corticoïdes agissent rapidement, on estime qu’au moins 3 mois de traitement sont nécessaires à la pleine efficacité de l’azathioprine [26].

Le traitement permet d’obtenir un taux de rémission de 65 % à 18 mois et de 80 % à 3 ans [20]. La rémission clinique et biologique est habituellement obtenue rapidement (dans les 6 premiers mois de traitement) mais la rémission histologique est retardée de 6 à 12 mois ce qui rend indispensable la poursuite du traitement pendant cette durée après l’obtention de la rémission biologique. Les facteurs prédictifs d’échec sont une nécrose submassive (nécrose extensive avec collapsus de lobules adjacents) ou l’existence initiale d’un ictère et d’une ascite s’aggravant. La présence d’une cirrhose n’est pas prédictive d’une résistance au traitement et une diminution de la fibrose peut même-être observée [27]. Chez les patients traités selon les recommandations de l’AASLD, la durée moyenne de traite-ment jusqu’à l’obtention d’une rémission complète est de 22 mois [20]. Il est important de noter que les complications sévères de la corticothérapie surviennent surtout pour une posologie quotidienne supérieure à 10 mg un facteur prédictif dans l’expérience pendant plus de 18 mois et que la prévalence des effets secondaires est supérieure à 60 % (diabète, hypertension artérielle, ostéoporose, modifications cutanéophanériennes…) pour une posologie >= 20 mg/j pendant 2 ans, [23]. Schématiquement, les patients sont donc traités pendant 2 ans et 80 % sont mis en rémission clinico-biologique. Une biopsie hépatique est alors recommandée car ses résultats sont les principaux facteurs prédictifs d’évolution à l’arrêt du traitement. En effet, la rechute après arrêt du traitement, définie par une augmentation de l’activité des transaminases > 3 N et/ou une augmentation de l’activité des gamma globulines > 20 g/L est très de fréquente, globalement de 50 % à 6 mois et de 70 % à 3 ans [28]. Aucune des caractéristiques initiales des patients ne permet d’identifier les patients qui vont rechuter à l’arrêt du traitement sauf peut-être une concentration plus élevée de gamma globulines (33 g/l vs 28 g/l) [29]. La durée du traitement initial n’est pas non plus un facteur prédictif dans l'expérience de la Mayo Clinic mais les patients non rechuteurs tendent à avoir été mis en rémission plus rapidement [29]. Par contre, la fréquence de la rechute à 6 mois n’est que de 20 % si la biopsie de contrôle est normale, de 50 % en cas d’hépatite purement « portale » et de 100 % si une hépatite d’interface est présente ou s’il y a eu constitution d’une cirrhose sous traitement [30]. A nouveau, il faut noter la mauvaise corrélation entre l’histologie et la biologie puisqu’une hépatite d’interface peut être présente chez 55 % des patients ayant une réponse biologique [31].

En l’absence d’hépatite d’interface, le traitement est arrêté sur une période 6 semaines. Durant le sevrage en corticoïdes, les tests hépatiques sont répétés toutes les 2 semaines puis tous les 3 mois pendant la 1re année. En présence d’une hépatite d’interface le traitement, sauf en cas d’effets secondaires majeurs, doit être prolongé aux doses minimales permettant de maintenir la réponse clinico-biologique.

 

TABLEAU VI
CRITÈRES DE RÉPONSE AU TRAITEMENT INITIAL (recommandations de l'AASLD [20].
Définition Critères
Rémission Absence de symptômes
Bilirubine et gamma globulines N
Transaminases < 2 N
Histologie normale ou inflammation minime sans hépatite d'interface
Échec Aggravation clinique, biologique et histologique malgré une bonne observance
Augmentation des transaminases >= 67 %
Apparition d'un ictère, d'une ascite ou d'une encéphalopathie
Réponse incomplète Amélioration nulle ou partielle des éléments
cliniques, biologiques et histologiques
Rémission non atteinte après 3 ans de traitement.

TABLEAU VII
MODALITÉS DU TRAITEMENT INITIAL SELON LES RECOMMANDATIONS
DE L'AASLD [20]

Prednisone seule (mg/j) Traitement combiné
Prednisone (mg/j) Azathioprine (mg/j)
Semaine 1
Semaine 2
Semaine 3
Semaine 4
Semaine 5
60
40
30
30
20
30
20
15
15
10
50
50
50
50
50

 

Traitement des rechutes

Si le diagnostic de rechute (définie selon les critères indiqués plus haut) est précoce, le traitement d’attaque est à nouveau efficace, mais la probabilité d’obtenir ensuite une rémission prolongée à l’arrêt du traitement diminue [32]. Un taux élevé de 28 % de rémission prolongée après traitement d’une première rechute a été récemment rapporté [11] mais il est clair que les malades qui rechutent ont un risque accru de progression vers la cirrhose et de développement d’effets secondaires du traitement, notamment à partir de la seconde rechute (jusqu’à 70 %) [29, 32].

En cas de rechutes multiples (>= 2), un traitement au très long cours est indiqué. Plusieurs options thérapeutiques de prévention des rechutes sont proposées par l’AASLD [20] après obtention d’une nouvelle rémission : soit corticoïdes seuls <= 10 mg/J, soit corticoïdes faibles doses et azathioprine 1 mg/kg/J, soit azathioprine 2 mg/kg/j en monothérapie. Aucun essai n’a omparé ces 3 schémas thérapeutiques. Cependant, l’efficacité de l’azathio prine dans la prévention des rechutes a été clairement établie par les travaux du Kings’College (Tableau VIII ) [33-36]. Le travail de Johnson et al, mené chez 72 patients mis en rémission complète pendant au moins un an par un traitement combiné, a notamment bien montré que l’augmentation de la posologie d’azathioprine à 2 mg/kg/j associée à l’arrêt progressif des corticoïdes permettait de maintenir une rémission clinico-biologique chez 83 % des patients durant un suivi médian de 5 ans et demi [36]. Cette rémission clinico-biologique était presque constamment associée à une rémission histologique (39/42). L’azathioprine apparaît donc remarquablement efficace dans la prévention des rechutes mais expose, au moins théoriquement, au risque de complications d’une immunosuppression prolongée (cancers en particulier). Cependant, ce risque n’est pas clairement documenté en de hors du contexte de transplantation d’organe. En effet, il n’a pas été démontré d’augmentation significative du risque de pathologie maligne chez des patients traités de façon prolongée par azathioprine pour colite inflammatoire [37] ou hépatopathie chronique [38, 39]. Dans le cadre de l’HAI, le risque semble donc faible en l’absence d’antécédent récent de cancer ou d’état pré-cancéreux qui doivent être recherchés au cours du bilan pré-thérapeutique. La recherche d’un déficit en thiopurine méthyltransférase par génotypage ou phénotypage est souhaitable avant le début du traitement. En effet, ce déficit expose à une insuffisance médullaire sévère et précoce [40].

 

TABLEAU VIII
AZATHIOPRINE ET PRÉVENTION DES RECHUTES
Traitement Rechute (%)
3 ans (1) 1 an (2) 5 ans (3)
Aza 1 mg/kg/j

Aza 2 mg/kg/j
Aza 1 mh/kg/j

+ Pred 5-12 mg/j
Pred 5-12 mg/j
 
6
32
 
0

0

10
20

(1) Stellon et al. Lancet 1985, (2) Stellon et al. Hepatology 1988, (3) Johnson et al. N Engl J Med 1995.

Attitude thérapeutique en cas d’échec ou de réponse incomplète au traitement initial

Les recommandations de l’AASLD dans ces 2 situations (telles quelles ont été définies précédemment) sont rapportées dans le Tableau IX.
En cas de survenue d’insuffisance hé-patique aiguë ou subaiguë malgré le traitement, une transplantation hépa-tique doit être réalisée très rapidement. Dans les situations moins rapidement évolutives, d’autres traitements médi-camenteux peuvent sans doute être proposés malgré la rareté des données de la littérature (voir autres modalités).

 

TABLEAU IX
PROPOSITIONS THÉRAPEUTIQUES EN CAS D'ÉCHEC OU DE RÉPONSE INCOMPLÈTE AU TRAITEMENT INITIAL SELON LES RECOMMANDATIONS DE L'AASLD [20]
Échec

Prednisone 60 mg/j

Ou

Prednisone 30 mg/j et Azathioprine 150 mg/j pendant au moins un mois

Puis

Diminution mensuelle (10 mg et 50 mg respectivement) en cas d'amélioration jusqu'aux doses habituelles d'entretien

Réponse incomplète

Diminution des posologies au niveau le plus bas permettant l'absence d'aggravation

Traitement au long cours

 

 

AUTRES MODALITÉS ET PERSPECTIVES

En réalité, le schéma thérapeutique adopté en France est habituellement différent. Le traitement comporte sché-matiquement 3 phases : a) un traite-ment d’attaque, suivi b) d’une recherche de la dose minimale maintenant la ré-mission, et finalement c) un traitement d’entretien pour éviter la survenue de rechute (D. Valla, communication per-sonnelle). Les principales raisons ayant mené à ces propositions de modifica-tions du schéma thérapeutique « clas-sique » sont : la fréquence des effets secondaires, la possible constitution d’une cirrhose chez des patients consi-dérés comme mis en rémission (jus-qu’à 16 %) [28] et le taux relativement faible d’arrêt prolongé du traitement apparaissant réellement possible (20-25 % ?). Cependant, bien que reposant sur des bases rationnelles, les résultats de ce schéma thérapeutique n’ont pas encore été évalués sur un grand nombre de patients (travail en cours).

Traitement d’attaque

Ce traitement consiste en l’association de corticoïdes à la posologie de 25 ou 30 mg/j et d’azathioprine à une poso-logie de 50 ou 75 mg/j, selon le poids. Ensuite, la posologie des corticoïdes n’est pas baissée rapidement et à échéance fixe comme dans le schéma de l’AASLD mais en fonction de la ré-ponse biologique, c’est-à-dire lorsque l’activité des transaminases devient < 2 N, ce qui se produit généralement en 1 à 4 mois. Cette attitude adaptée à l’évolution biologique pourrait per-mettre d’obtenir une meilleure réponse histologique. Le traitement entre en-suite dans sa 2e phase, c’est-à-dire de :

Recherche de dose minimale efficace de corticoïdes

En cas d’effet secondaire précoce ou sévère des corticoïdes, cette phase peut se faire dès la diminution de l’activité des transaminases à moins de la moitié de leur valeur initiale.
On peut recommander de simultané-ment augmenter la posologie d’aza-thioprine à 2 mg/kg/J (100 ou 150 mg/j) et diminuer la posologie des corticoïdes par palier de 5 mg/J jusqu’à la poso-logie de 10 mg/J, puis par palier de 2,5 mg/J [26]. La durée des paliers de décroissance des corticoïdes n’est pas clairement établie. Elle peut varier de 1 à 4 semaines.
Idéalement, la durée totale de la cor-ticothérapie est de moins de 1 an. Cette notion de relative brièveté de la cor-ticothérapie est importante en raison de la forte prévalence des effets se-condaires d’une corticothérapie pro-longée.
Une réaugmentation de l’activité des transaminases supérieure à 2 N au cours de la période de décroissance justifie un arrêt de la décroissance puis, si l’augmentation persiste après un mois, une reprise de la dose du palier précédent. Cette éventualité apparaît rare si la posologie de 2 mg/kg/J d’aza-thioprine a été utilisée.

Traitement d’entretien

Son but est de prévenir la rechute et consiste (en l’absence de contre-indi-cation ou d’intolérance) en l’azathio-prine 2 mg/kg/J (100 ou 150 mg/j). Il n’y a pas données rigoureuses per-mettant d’en fixer la durée. Une étude récente non contrôlée menée sur seu-lement 28 malades suggère qu’un trai-tement initial de durée supérieure ou égale à 4 ans détermine un taux de ré-mission prolongée plus élevé (67 %), qu’en cas de traitement d’une durée de 2 à 4 ans (17 %) ou de 1 à 2 ans (10 %) [41]). Actuellement, en l’absence d’effet indésirable ou de pathologie associée que le traitement pourrait aggraver, on peut recommander de maintenir ce traitement d’entretien pendant au moins 2 ans avant d’envisager son in-terruption. Une ponction biopsie hé-patique est alors souhaitable. En l’ab-sence d’hépatite d’interface, une décroissance progressive de 25mg/j par paliers d’une durée de 1 à 3 mois peut être proposée. Les propositions de Heneghan et McFarlane pour les modalités d’arrêt de traitement sont données à titre d’exemple dans le ta-bleau X [26] car aucun schéma d’arrêt n’a été validé.

Attitude thérapeutique en cas d’échec ou de réponse incomplète au traitement initial

L’échec du traitement d’attaque peut résulter soit de la nécessité d’arrêter le traitement en raison d’effets secon-daires graves, soit d’une résistance. En cas d’effets secondaires de l’azathio-prine, une substitution par la 6-mer-captopurine peut être proposée mais les données proviennent essentielle-ment des patients atteints de colite in-flammatoire. En conséquence, l’atti-tude habituelle est d’introduire le mycophénolate mofétyl (Cellcept®) dont une courte série a suggéré l’intérêt dans l’HAI à la posologie de 2g/j [42]. En cas de résistance, il est raisonnable de vérifier l’observance du traitement et l’exactitude du diagnostic (en se mé-fiant particulièrement d’un syndrome de chevauchement avec la cirrhose biliaire primitive ou la cholangite sclé-rosante primitive). Après cette étape, différentes attitudes sont possibles : soit augmentation des doses de corti-coïdes et d’azathioprine (schéma AASLD), soit introduction de la ciclo-sporine ou du mycophénolate mofétyl. Dans cette situation, la ciclosporine (ciclosporinémie visée : 200 ng/ml), est sans doute la molécule dont l’efficacité est la moins mal établie [43, 44]. A nouveau, la survenue d’une compli-cation de la maladie du foie sous traitement doit faire indiquer la trans-plantation sans attendre les compli-cations d’un traitement immunosup-presseur prolongé à fortes doses.
En cas de réponse incomplète, le choix entre un contrôle imparfait de la ma-ladie (nécessitant des évaluations his-tologiques régulières) par des médica-ments à une posologie « minimale » (schéma AASLD) et l’introduction de nouvelles molécules douées d’effets secondaires mais d’efficacité simple-ment suggérée doit être fait sur une base individuelle. Les médicaments qui ont été proposés sont, outre la ciclo-sporine et le mycophénolate mofétyl, l’acide ursodésoxycholique [45], le bu-désonide [46, 47], la 6-mercaptopu-rine [48], le tacrolimus [4]), le métho-trexate [50, 51] et le cyclophosphamide [52]. Les données ne reposent que sur des cas cliniques ou de très courtes sé-ries. Le seul essai randomisé a concerné l’acide ursodésoxycholique et s’est avéré négatif [45]. L’intérêt du busé-noside en cas d’effets secondaires de la prednis(ol)one n’est pas bien établi [46, 47].

 

TABLEAU X
PROTOCOLE D'ARRÊT DU TRAITEMENT CHEZ LES PATIENTS EN RÉMISSION PROLONGÉE SELON HENEGHAN ET McFARLANE [26]

Tt d'entretien par Azathiopine (2 mg/kg/j) ou Prednisone (5-15 mg/j)

Tests hépatiques N depuis au moins 2 ans

Absence d'activité histologique

?___ Azathiopine 25 mg/mois, (?___ Prednisone 2,5 mg/3 mois)

ALAT et gammaglobulines chaque mois

Si ??___ ALAT : réintroduction corticoïdes

 

CONCLUSIONS

Le diagnostic d’HAI repose sur un en-semble de critères cliniques, biolo-giques, immunologiques et histo-logiques et l’exclusion d’autres causes. Il ne se résume pas à l’application aveugle et systématique d’un score. Le traitement a une efficacité clinico-biologique immédiate remarquable mais ne doit pas être arrêté précoce-ment. Le degré d’activité histologique résiduelle sous traitement est le prin-cipal facteur prédictif de récidive à l’arrêt. Lorsque le risque de récidive apparaît relativement faible, il est sou-haitable de proposer une tentative d’arrêt en raison de la fréquence des complications du traitement. La place des autres immunosuppresseurs devra être précisée par des essais contrôlés multicentriques.

 

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