La cholécystite aiguë lithiasique, diagnostic, critères de gravité, traitement. Quand et comment chercher une lithiase de la voie biliaire principale ? Comment traiter une lithiase de la voie biliaire principale, associée ou non à une lithiase vésiculaire ?

La cholécystite aiguë lithiasique, diagnostic, critères de gravité, traitement

Objectifs pédagogiques

  • Faire le diagnostic d’une cholécystite aiguë lithiasique
  • Connaître les critères de gravité de la cholécystite aiguë lithiasique
  • Connaître le traitement de la cholécystite aiguë lithiasique

Introduction

La cholécystite aiguë lithiasique est une inflammation de la paroi vésiculaire plus ou moins associée à une infection du son contenu ; compte tenu de la fréquence de la pathologie lithiasique, on considère que 15 % de la population générale présente une lithiase, celle-ci représente 90% des causes des cholécystites aiguës. Les précédentes recommandations concernant cette pathologie et la prise en charge de la lithiase de la voie biliaire principale (LVBP) remontaient à 1991, ainsi, il paraissait nécessaire d’actualiser les connaissances sur ces problèmes médicaux fréquents. Pour ce faire, sous l’égide d’un comité d’organisation composé de nombreuses sociétés savantes, un groupe de travail s’est constitué, le fruit de leurs travaux a été revu par un groupe de lecture et nous proposons ici des extraits des recommandations actualisées (listes des groupes jointes en annexe).

Comment faire le diagnostic de cholécystite aiguë lithiasique ?

Le diagnostic de la cholécystite aiguë lithiasique repose sur 3 types de signes : cliniques, biologiques et radiologiques.

Les signes cliniques

Le principal signe clinique est la douleur biliaire qui se caractérise par une douleur d’apparition brutale de l’hypochondre droit ou de l’épigastre (dans près 50 % des cas), avec une irradiation qui peut être en hémiceinture droite ou en bretelle. Cette douleur apparaît souvent en postprandiale ou de façon nocturne, elle est persistante plusieurs heures et est souvent associée à des nausées et des vomissements. L’examen clinique retrouve une douleur qui bloque l’inspiration profonde (signe de Murphy), et une défense localisée dans l’hypochondre droit. Cette douleur peut être absente chez les personnes âgées.

Ce tableau peut s’accompagner de signes généraux d’inflammation et d’infection avec une fièvre qui peut être associée à des signes de choc septique et de défaillance multiviscérale.

Les signes biologiques

Les signes biologiques d’inflammation et d’infection sont une élévation de la CRP ou/et une polynucléose neutrophile. Les tests hépatiques sont le plus souvent normaux.

Les signes radiologiques

L’examen de première intention pour le diagnostic de cholécystite aiguë lithiasique est l’échographie. Elle permet un diagnostic positif dans plus de 90 % des cas [1]. Les signes échographiques en faveur de ce diagnostic sont : un épaississement de la paroi vésiculaire (> 4 mm), la présence d’un liquide périvésiculaire, une douleur au passage de la sonde sur l’aire vésiculaire (signe de Murphy radiologique), une image de calcul intra-vésiculaire. La sensibilité et la spécificité de l’échographie dans la cholécystite sont respectivement de 94% et 78 % [2]. La présence de calcul à l’échographie associée à un signe de Murphy échographique a une valeur prédictive positive de cholécystite aiguë lithiasique de 92 %, l’association de calcul et d’épaississement de la paroi vésiculaire à l’échographie à une valeur prédictive positive de 95 % [3]. Les autres examens qui permettent le diagnostic de cholécystite aiguë sont : la tomodensitométrie abdominale qui montre un épaississement de la vésicule biliaire > 4 mm et une infiltration de la graisse périvésiculaire. Les autres signes sont la présence de liquide périvésiculaire, d’un oedème pariétal, d’air intraluminal, d’une muqueuse irrégulière, d’une augmentation de taille de la vésicule à plus de 5 cm de petit axe ou de 8 cm de grand axe et d’une hyperdensité du contenu vésiculaire [4]. Le diagnostic positif peut être fait quand 3 de ces signes sont présents ou bien 2 signes à l’exclusion de la distension et de l’hyperdensité vésiculaire.

Les critères de gravité de la cholécystite aiguë lithiasique [5]

Les cholécystites aiguës lithiasiques sont classées en fonction de leur gravité en 3 grades, de ces derniers dépendra la prise en charge (chirurgicale ou par drainage) de la cholécystite.

Cholécystite aiguë lithiasique de gravité faible (grade 1)

Il s’agit de patients présentant une cholécystite aiguë lithiasique qui ne correspond pas aux critères des cholécystites aiguës de gravité modéré ou sévère décrits ci-dessous. Ces patients ne présentent pas notamment de défaillance multiviscérale mais uniquement une inflammation modérée de la vésicule biliaire.

Cholécystite aiguë de gravité modérée (grade 2)

Les patients présentent un ou des signes suivants :

  • élévation des globules blancs (> 18 000/mm3),
  • masse palpable dans l’hypochondre droit,
  • durée des signes clinique de plus de 72 h,
  • marqueurs d’infection locale comme : péritonite biliaire localisée, abcès périvésiculaire, abcès hépatique, cholécystite gangréneuse, cholécystite emphysémateuse.

Cholécystite aiguë de gravité sévère (grade 3)

Ces malades présentent un ou des signes suivants :

  • dysfonctionnement cardio-vasculaire (hypotension artérielle nécessitant un traitement par dopamine > 5µg/kg/min ou n’importe quelle dose de dobutamine ou noradrénaline),
  • dysfonctionnement neurologique (diminution du niveau de conscience),
  • dysfonctionnement respiratoire (ratio PaO2/FiO2 < 300),
  • dysfonctionnement rénal (oligurie, créatininémie sérique > 2,0 mg/dl),
  • dysfonctionnement hépatique (TP-INR > 1,5),
  • dysfonctionnement hématologique (nombre de plaquettes < 100 000/mm3).

Le terrain sur lequel se développe cette maladie va jouer un rôle important avec des formes plus sévères ou de diagnostic tardif chez les personnes âgées, diabétiques, immunodéprimées par exemple.

Le diagnostic de cholécystite aiguë lithiasique doit être suspecté sur les signes cliniques et/ou biologiques, et confirmé par l’échographie abdominale. La prise en charge et son délai seront ensuite adaptés à la gravité (voir tableau 1) de la cholécystite qui dépend essentiellement de l’apparition de signes généraux septiques.

Modalités du traitement de la cholécystite aiguë lithiasique

A – Le traitement chirurgical est le traitement curatif de la cholécystite aiguë lithiasique (CAL), car il permet la prise en charge en un temps de la cause : la lithiase et de la conséquence l’infection [6].

Quand réaliser le geste chirurgical ?

Il a été observé chez les malades qui avaient une prise en charge chirurgicale différée qu’une nouvelle complication des calculs vésiculaires survenait dans 17,5 % à 36 % des cas [7], de ce fait, il est préférable de réaliser la cholécystectomie précocement en cas de CAL [8].

Quelle voie d’abord choisir entre la laparotomie et la coelioscopie ?

La cholécystectomie par coelioscopie est devenue le traitement de référence de la prise en charge de la pathologie lithiasique vésiculaire à froid et a été validée par au moins 38 études randomisées, comparant la cholécystectomie par laparotomie versus coelioscopie, rapportées dans une métaanalyse de la Cochrane Database en 2006 [9], il en est de même au cours des cholécystites aiguës lithiasiques [8].

Prise en charge des cholécystites aiguës lithiasiques en fonction de leur gravité

Pour les CAL de gravité faible (grade 1) la prise en charge doit être une cholécystectomie coelioscopique précoce. Cette prise en charge est identique pour les CAL de gravité modérée (grade 2), en sachant que les CAL se présentant sous une forme gangréneuse ou sous une forme emphysémateuse présentent un risque plus important de taux de conversion et de morbidité postopératoire. Pour les CAL de gravité sévère (grade 3), aucun essai randomisé n’a été publié sur leur prise en charge. Cependant, dans ce groupe de patients à haut risque chirurgical avec une ou plusieurs défaillance(s) viscérale(s) associée(s), la chirurgie est un facteur de risque important de complications et de mortalité [10,11]. Dans ce sousgroupe le traitement du foyer septique est indispensable, et c’est probablement le drainage de la vésicule biliaire par voie percutanée qui paraît être le traitement le plus efficace avec la plus faible morbidité.

B – Quelle place pour l’antibiothérapie dans le traitement de la cholécystite aiguë lithiasique ?

La cholécystite aiguë lithiasique a comme point de départ une obstruction du canal cystique responsable d’une stase biliaire qui va initier une cascade de phénomènes inflammatoires, ischémiques et nécrotiques de la paroi responsable d’une translocation et d’une prolifération bactérienne [12].

Quand débuter les antibiotiques et pendant combien de temps ?

Aucune étude ne permet de répondre à cette question. Il semble préférable de débuter les antibiotiques dès que le diagnostic de cholécystite aiguë lithiasique est posé, sauf dans les formes de gravité légère (grade 1) pauci-symptômatiques [13]. Idéalement cela doit être fait après des prélèvements bactériologiques sanguins (hémocultures) réalisés si la température est supérieure à 38,5 °C ou systématiquement chez les malades âgés ou immunodéprimés. La durée de l’antibiothérapie n’a pas été évaluée dans la littérature. Il semble cependant préférable de ne pas continuer les antibiotiques après la cholécystectomie, sauf dans les formes sévères et/ou en cas de sujet immuno-déprimé [13].

Quels antibiotiques choisir ?

Le traitement antibiotique doit être entrepris avec des antibiotiques qui ont une bonne diffusion biliaire et une bonne activité sur les germes fréquemment en cause, ceux-ci sont rapportés dans le tableau 2 [13,14]. Notons par ailleurs que des travaux récents ont montré la possibilité de contamination des voies biliaires par des Candida au cours des CAL sévères [15].

Au total, un antibiotique actif sur les germes Gram négatif et à bonne diffusion biliaire doit être administré de façon systématique à toutes les cholécystites aiguës lithiasiques avant la prise en charge chirurgicale à l’exception de celles de gravité faible (grade 1), pauci-symptômatiques. Dans tous les cas, il faut essayer, notamment dans les formes sévères, d’avoir une bactériologie par hémoculture ou par prélèvement de bile. Le maintien du traitement antibiotique après la cholécystectomie ne semble pas nécessaire, à l’exception des formes sévères ou des CAL chez des sujets à risque.

Quand et comment chercher une lithiase de la voie biliaire principale ?

Objectifs pédagogiques

  • Connaître les examens qui permettent le diagnostic d’une lithiase de la voie biliaire principale
  • Dans quelles circonstances utiliser les examens permettant le diagnostic d’une lithiase de la voie biliaire principale

Introduction

La recherche d’une lithiase dans la voie biliaire principale (LVBP) va se justifier dans deux situations cliniques différentes en fonction de la présence ou non d’une atteinte vésiculaire. En l’absence de pathologie vésiculaire associée, la présence d’une LVBP peut être asymptomatique [16]. Si les calculs obstruent la voie biliaire, alors ils provoquent une douleur qui peut être intermittente, et/ou un ictère, et/ ou des anomalies des tests hépatiques, et/ou une angiocholite, cette dernière présente un tableau clinique varié ; classiquement, il s’agit de la triade de Charcot : douleur, fièvre et ictère, toutefois la fièvre peut être isolée ; si la prise en charge est tardive, peuvent apparaître une confusion, des signes de choc [16]. Enfin, si le ou les calculs obstruent le confluent bilio-pancréatique, ils peuvent entraîner une pancréatite aiguë [17].

En cas d’atteinte vésiculaire, faut-il rechercher systématiquement une LVBP avant cholécystectomie ?

La recherche d’une LVBP avant une cholécystectomie va dépendre de la prise en charge de celui-ci ; en cas de traitement chirurgical, il n’y a pas d’intérêt à rechercher une LVBP en préopératoire si le chirurgien réalise systématiquement une cholangiographie peropératoire. Si la prise en charge de ces calculs est combinée (sphinctérotomie endoscopique et cholécystectomie), il y a par contre un intérêt à les rechercher avant la cholécystectomie. Dans ce dernier cas, la recherche des calculs pourra être sélective, orientée par la présentation clinique, la biologie et l’échographie pour éviter la réalisation systématique d’examens coûteux et invasifs [18- 20]. Notons cependant qu’aucune étude randomisée n’a été publiée sur l’intérêt ou non de la recherche systématique de LVBP en préopératoire.

Diagnostic préopératoire d’une lithiase de la VBP

La présence d’un LVBP en préopératoire peut être suspectée sur l’histoire clinique, les tests biologiques hépatiques, l’échographie abdominale, le scanner abdominal, l’écho-endoscopie, la bili-IRM. On peut différencier deux types d’examens, ceux de première intention, facilement disponibles (clinique, biologie, échographie abdominale) et les examens d’imagerie de deuxième intention (bili-IRM, écho-endoscopie). Les examens de première intention permettent d’avoir un diagnostic préopératoire de probabilité d’avoir une LVBP, alors que le diagnostic de certitude préopératoire requiert la réalisation d’examens d’imagerie de deuxième intention.

Le diagnostic préopératoire de probabilité va reposer sur une combinaison d’éléments cliniques, biologiques et échographiques. De nombreuses études ont proposé des scores prédictifs de LVBP [21-24]. Il s’agissait le plus souvent d’études rétrospectives avec un nombre de malades limités. La sensibilité et la spécificité de ces facteurs prédictifs varient de 80 à 98 % dans ces différents scores. En pratique, chez les malades présentant une bilirubinémie totale, une mesure des phosphatases alcalines, de la gamma-glutamyl transférase, une activité sérique de l’alanine amino transférase normales et un diamètre de le voie biliaire principale < 8 mm le risque d’avoir une LVBP est inférieur à 5 % voir tableau 3. Le diagnostic de certitude préopératoire de LVBP repose sur l’écho-endoscopie et la bili-IRM ; la cholangiographie rétrograde endoscopique n’étant plus utilisée à visée diagnostique en raison de ses risques. Les performances diagnostiques de ces différentes techniques sont résumées dans le tableau 4.

Diagnostic peropératoire d’une lithiase de la VBP

Le diagnostic peropératoire d’une LVBP est fait par la cholangiographie per-opératoire, examen de référence du diagnostic de LVBP, ses performances diagnostiques sont rappelées dans le tableau 4. Le taux de succès de la procédure varie de 75 à 100 % selon les études [32, 33]. Chez un malade programmé pour une cholécystectomie, en l’absence de critères préopératoires prédictifs cliniques, biologiques et échographiques (tableau 3), il y a plus de 95 % de chance pour qu’il n’y ait pas de calcul de la voie biliaire principale ; il paraît donc licite de ne pas réaliser d’exploration de la voie biliaire principale pour rechercher un calcul que ce soit en préopératoire ou en per-opératoire (voir schéma 1). En présence de critères préopératoires prédictifs de LVBP, l’attitude à tenir va dépendre de la prise en charge du calcul de la voie biliaire principale. Si une prise en charge entièrement chirurgicale par coelioscopie est envisagée, il sera inutile de réaliser des examens diagnostiques préopératoires supplémentaires. Il sera réalisé une cholécystectomie avec cholangiographie per-opératoire associée au traitement du calcul de la voie biliaire dans le même temps. Si cette prise en charge est un traitement combiné avec une sphinctérotomie endoscopique préopératoire suivi d’une cholécystectomie par coelioscopie, il est recommandé de réaliser un examen diagnostique préopératoire afin d’éviter une sphinctérotomie endoscopique inutile. Les examens d’imagerie de confirmation seront donc la clef du diagnostic, ils doivent être utilisés à bon escient en respectant les règles de bonne pratique radiologique (Société Française de Radiologie 2005), ainsi, l’abdomen sans préparation (ASP) n’est pas indiqué ; si l’échographie est l’investigation de base pour la lithiase vésiculaire, elle ne permet pas d’exclure la présence d’une LVBP ; l’IRM complète l’échographie en montrant mieux les anomalies cholédociennes et la morphologie d’ensemble des voies biliaires, en précisant la répartition des calculs, parfois situés dans les voies biliaires intra-hépatiques, mais aussi, les anomalies pouvant gêner la réalisation des gestes endoscopiques (diverticule duodénal…). L’échoendoscopie peut aussi prendre toute sa place dans cette situation, elle offre l’avantage de pouvoir être suivie en cas de confirmation diagnostique d’une sphinctérotomie endoscopique durant la même anesthésie, si l’organisation du centre d’endoscopie le permet, ce qui recommandé [34].

En cas d’absence d’atteinte vésiculaire

Plusieurs situations cliniques peuvent se présenter, d’une part la découverte fortuite d’un calcul asymptomatique de la VBP sur un examen d’imagerie, d’autre part, une situation symptomatique avec des douleurs abdominales de type biliaire, et/ou des perturbations du bilan hépatique, un tableau d’angiocholite, ou une pancréatite aiguë [17], autant de symptomatologies justifiant la recherche d’une lithiase de la voie biliaire principale. Les examens d’imagerie sont comme nous l’avons précisé ci-dessus la clef du diagnostic, l’échographie normale ne permettant pas d’exclure une LVBP, l’IRM et l’écho-endoscopie seront les deux examens de référence dans cette recherche [35,36] (voir schéma 1).

Comment traiter une lithiase de la voie biliaire principale, associée ou non à une lithiase vésiculaire ?

Objectifs pédagogiques

  • Quel est le meilleur traitement de la LVBP (chirurgie avec ou sans endoscopie) ?
  • Quand un traitement endoscopique (TE) a été réalisé faut-il réaliser une cholécystectomie secondairement ?
  • Quelles sont les complications à long terme des traitements de la lithiase de la voie biliaire principale ?
  • Place de l’antibiothérapie et des gestes de décompression biliaire ?
  • Faut-il traiter toute lithiase de la voie biliaire principale ?

Quel est le meilleur traitement de la LVBP

Plusieurs stratégies thérapeutiques peuvent être proposées aux malades présentant une LVBP, un traitement « tout chirurgical » ou une chirurgie associée à un traitement endoscopique (TE), habituellement une sphinctérotomie endoscopique (SE). Afin de comparer ces différentes prises en charge plusieurs études ont comparé les différentes stratégies. Celles-ci ont été analysées dans 2 métaanalyses publiées en 2006, l’une par le groupe Cochrane [37] et l’autre par Clayton et al. [38]. Les principaux résultats de ces deux métaanalyses sont résumés dans le tableau 5.

Dans la métaanalyse du groupe Cochrane, 13 essais randomisés ayant inclus 1 351 malades ont été exploités. Les critères de sélection étaient les essais randomisés uniquement. Huit essais (n = 760 malades) ont comparé le TE à la chirurgie traditionnelle, 3 essais (n = 425 malades) ont comparé le TE préopératoire à la coelioscopie. Deux essais (n = 161 malades) ont comparé le TE postopératoire à la coelioscopie. Enfin, il n’existe pas d’essai randomisé comparant le TE à la coelioscopie chez les malades cholécystectomisés.

Dans la deuxième métaanalyse publiée par Clayton et al. en 2006 [38], 12 essais contrôlés ont été analysés ; 7 comparant le TE à la chirurgie classique et 5 études le TE à la coelioscopie. Un des essais inclus dans cette métaanalyse ne fait pas partie de la métaanalyse Cochrane ; dans cette étude le TE était réalisé en peropératoire ; inversement deux essais inclus dans la métaanalyse Cochrane ont été exclus de celle de Clayton et al. car il s’agissait de publications sous forme de résumés. Il n’existe pas d’étude permettant de comparer le TE en pré et postopératoire. Globalement ces deux métaanalyses montrent que les différentes prises en charge sont équivalentes notamment en terme de mortalité et morbidité, voir tableau 5.

Ainsi, selon les récentes recommandations anglaises [34] et françaises (voir site internet de la Société Nationale Française de Gastroentérologie, SNFGE), pour les malades présentant une LVBP chez qui une cholécystectomie coelioscopique est envisagée, le traitement de la LVBP peut-être réalisé par voie chirurgicale dans le même temps opératoire ou par un TE en périopératoire. La prise en charge chirurgicale seule ou chirurgie plus TE doit tenir compte des compétences de chaque centre. Chez les malades cholécystectomisés présentant une LVBP un TE et une extraction des calculs sont recommandées.

Quand un TE a été réalisé, faut-il réaliser une cholécystectomie secondairement ?

Après un TE de la LVBP, la question d’une cholécystectomie secondaire se pose. 15 à 37 % des malades ayant eu un TE de leur LVBP présenteront, dans les 17 mois à 5 ans, des symptômes justifiant la réalisation d’une cholécystectomie. Dans une métaanalyse publiée en 2007 incluant 5 essais randomisés et regroupant 662 malades, le groupe Cochrane conclu à l’existence d’une surmortalité chez les malades suivis sans cholécystectomie comparés aux malades cholécystectomisés (RR 1,78 ; 95 % 1,15 à 2,75, P = 0,01) et ce indépendamment des facteurs de risque chirurgicaux [39]. Compte tenu de ces données, une cholécystectomie est recommandée chez les malades ayant eu l’extraction d’une lithiase de la VBP ; sous réserve qu’il n’existe pas de contre indication à la réalisation d’un acte chirurgical.

Quelles sont les complications à long terme du traitement endoscopique de la lithiase de la VBP ?

La section du sphincter d’Oddi entraîne une perte définitive de la fonction sphinctérienne et une contamination bactérienne de la bile. Les complications tardives (à 10 ans en moyenne) surviennent chez 5 % des malades. Il s’agit d’une récidive symptomatique de la LVBP favorisée par une sténose de la SE dans la moitié des cas, ou d’angiocholite par reflux [40, 41], chez les malades sphinctérotomisés par voie endoscopique deux études rétrospectives récentes sur des grandes cohortes de malades suivis pendant 20 ans ne mettent pas en évidence de lien entre la SE et le développement d’un cholangio- carcinome [42,43].

Place de l’antibiothérapie dans le traitement de la lithiase VBP

En cas d’angiocholite, l’antibiothérapie et le drainage des voies biliaires sont les deux éléments essentiels du traitement de l’angiocholite aiguë lithiasique. L’antibiothérapie instituée empiriquement doit viser au minimum les bacilles gram négatifs de la flore intestinale, et être élargie en cas de critères de sévérité et/ou de possible infection nosocomiale. Compte tenu de la fréquence des résistances aux antibiotiques des germes isolés et de la fréquence des bactériémies associées, la mise en culture systématique de bile et la réalisation d’hémocultures sont recommandées chaque fois que possible. Pour un premier épisode d’angiocholite, sans contexte d’antibiothérapie ni de manoeuvre biliaire préalable, et en dehors de co-morbidités particulières, la prescription empirique d’une antibiothérapie de type amoxicilline-acide clavulanique et aminosides paraît justifiée en première intention, en attendant le résultat des cultures bactériologiques qui permettront une adaptation du traitement.

Par ailleurs, il est nécessaire de couvrir les anaérobies chez les malades présentant une anastomose bilio-digestive (par une association de type amoxicilline- acide clavulanique ou ceftriaxone + métronidazole).

En cas d’infection considérée comme nosocomiale, il est recommandé d’élargir le spectre de l’antibiothérapie administrée notamment au Pseudomonas aeruginosa (Pipéracillinetazobactam + amikacine ou Imipénème + amikacine ou Ceftazidime + métronidazole + amikacine). Aucun consensus sur la durée optimale de l’antibiothérapie ne se dégage de la littérature : des durées de moins de cinq jours ne semblent pas associées à un moins bon contrôle de l’infection, ni à des récidives plus fréquentes dans le suivi évolutif à plusieurs mois [44]. Le préalable indispensable à une durée « courte » d’antibiothérapie est un drainage biliaire efficace et l’amendement du syndrome infectieux clinique.

Cas particulier de l’angiocholite grave

La gravité de l’angiocholite est liée à la dissémination de l’infection avec risque de choc et de troubles neuropsychiques. L’association d’un choc et d’une confusion à la triade de Charcot constitue « la pentade de Reynolds » [16]. La définition de l’angiocholite grave dans les essais thérapeutiques récents était : l’existence d’un choc septique, la persistance d’un état septique malgré l’antibiothérapie ou la survenue d’une confusion [45]. Cette forme grave est observée chez 10 à 15 % des malades [45].

Le traitement de l’angiocholite grave repose sur d’une part l’antibiothérapie et d’autre part une désobstruction en urgence par voie endoscopique [46], en plus de méthodes de réanimation habituelle.

Le drainage biliaire est donc primordial dans le traitement de l’angiocholite grave. Le traitement chirurgical en urgence est grevé d’une forte mortalité (20 à 40 %) [47] et un traitement endoscopique est actuellement recommandé. L’étude randomisée de Lai et al. [46] a comparé le traitement chirurgical et le drainage endoscopique chez 82 malades ayant une angiocholite sévère définie par l’existence d’un choc septique ou la persistance d’un état septique malgré un traitement antibiotique adapté. Les résultats ont montré des différences significatives en faveur du traitement endoscopique en ce qui concerne la morbidité (34 contre 66 %) et la mortalité (10 contre 32 %). Ainsi, le traitement endoscopique est devenu depuis la méthode de drainage biliaire de référence chez les malades atteints d’angiocholite grave. Notons que le drainage radiologique est plus invasif et n’a pas amélioré la mortalité du traitement chirurgical dans une étude [48].

Faut-il traiter tous les calculs de la voie biliaire principale ?

Il est habituellement recommandé de traiter tous les calculs de la voie biliaire principale en raison du risque de complications graves. Cette attitude a été discutée en cas de calculs asymptomatiques. Deux situations se présentent pour la prise en charge des calculs asymptomatiques de la VBP : 1/ celle de la découverte fortuite en peropératoire ; 2/ celle de la découverte fortuite sur un examen d’imagerie.

Découverte en peropératoire d’une LVBP asymptomatique

La question du traitement systématique se pose lorsqu’on découvre un calcul asymptomatique de la voie biliaire principale sur une cholangiographie peropératoire. La prévalence cholecysde la LVBP asymptomatique découverte au cours d’une cholécystectomie faite chez un malade sans facteurs prédictifs de LVBP est inférieure à 5 %. La question se pose surtout lorsque la voie biliaire principale est fine (<6mm) car son ouverture est difficile et expose à plus de complications postopératoires à type de sténose [49], alors que les calculs de la voie biliaire principale asymptomatiques peuvent migrer spontanément dans 30 à 50 % des cas [50, 51]. Deux études prospectives récentes (2004 et 2008), chez des malades ayant une LVBP diagnostiquée en per-opératoire avec une voie biliaire principale fine, montrent que la LVBP peut migrer spontanément et sans symptômes et préconisent de laisser un drain transcystique en place pendant 6 semaines avant de traiter cette LVBP [50, 51]. Le travail de Collins et al [50] est une étude prospective non randomisée qui montre que 25%des images de calculs découvertes à la cholangiographie per-opératoire avaient disparu à la cholangiographie faite par le drain transcystique entre 48 et 72 h après l’intervention (faux positifs), et que 35 % des calculs asymptomatiques de la voie biliaire principale étaient passés spontanément dans le duodénum à 6 semaines de l’intervention. Le passage spontané des calculs serait d’autant plus fréquent que la taille du calcul est inférieure à 8 mm [52]. Le travail de Balandraud et al est une étude prospective qui suit le même protocole que le travail de Collins et al. Cette étude montre que le taux de faux positifs à la cholangiographie faite à 48 h était de 16,7 %, et que 50 % des calculs de la voie biliaire principale asymptomatiques étaient passés lors de la cholangiographie réalisée par le drain transcystique à 6 semaines, au total seuls 33,3 % des malades porteurs d’une LVBP au décours de la cholécystectomie avaient eu besoin d’une sphinctérotomie endoscopique [51]. Par ailleurs, la première étude rétrospective évaluant la mise en place d’un drain transcystique dans cette indication a été publiée en 1995 [53] : il avait été observé un passage spontané des calculs dans 11 cas sur 24 (46 %). Celle-ci avait été suivie en 1997 par une étude prospective qui montrait que 30 % des calculs de la voie biliaire principale asymptomatiques passaient spontanément sans donner de symptômes [54]. L’évolution spontanée à long terme des calculs asymptomatiques de la voie biliaire principale n’est pas connue.

Découverte fortuite d’un calcul asymptomatique de la VBP sur un examen d’imagerie

Il n’y a pas d’étude comparative sur la prise en charge de ces malades entre une attitude attentiste et interventionnelle. Les recommandations anglaises sur la prise en charge des calculs de la voie biliaire principale proposent un traitement de tout calcul suspecté dans la voie biliaire principale [34] du fait du risque à long terme de survenue d’une cirrhose et des risques de complications (pancréatites, angiocholites). La prise en charge doit être évaluée au cas par cas en fonction du rapport bénéfice/risque attendu, particulièrement chez le sujet âgé fragile.

Compte tenu de l’ensemble de ces données, en cas de découverte à la cholangiographie per-opératoire d’un calcul asymptomatique de la voie biliaire principale, le traitement curatif de celui-ci peut ne pas être réalisé ni en per-opératoire, ni en postopératoire immédiat notamment quand la VBP est fine. Il est licite de laisser en place un drain transcystique et de faire une cholangiographie à 6 semaines. Si le calcul persiste, une extraction de celui-ci est recommandée par voie endoscopique [34]. En cas de découverte fortuite à l’imagerie d’un calcul de la voie biliaire principale asymptomatique sur un examen d’imagerie il est recommandé de le traiter en tenant compte du rapport bénéfice/risque pour chaque malade [34].

Références

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Les 5 points forts

  1. La cholécystite aiguë lithiasique de grade 1 ou 2 justifie d’une cholécystectomie coelioscopique le plus rapidement possible, plus ou moins associée à une antibiothérapie.
  2. La cholécystite aiguë lithiasique de grade 3 justifie d’une prise en charge des défaillances viscérales, d’un drainage biliaire et d’une antibiothérapie adaptée aux germes.
  3. Chez les malades présentant une LVBP chez qui une cholécystectomie coelioscopique est envisagée, le traitement de la LVBP peut être réalisé par voie chirurgicale dans le même temps opératoire ou par un traitement endoscopique en périopératoire. La prise en charge doit tenir compte des compétences de chaque centre.
  4. Une cholécystectomie est recommandée chez les malades ayant eu l’extraction d’une lithiase de la VBP ; sous réserve qu’il n’existe pas de contre-indication à la réalisation d’un acte chirurgical.
  5. Il est recommandé de traiter tous les calculs de la VBP en raison du risque de complications graves.